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Muriel Roques-Etienne
Question N° 37350 au Ministère de l’agriculture


Question soumise le 23 mars 2021

Mme Muriel Roques-Etienne interroge M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les biais du Nutriscore pour certaines filières comme le lait de brebis. Devenue obligatoire au 1er janvier 2021, l'apposition d'un Nutriscore sur les produits alimentaires permet d'éclairer, grâce à un code couleur et une notation simples, les consommateurs sur la qualité nutritionnelle des denrées consommées. La filière lait de brebis estime cependant que les critères mis en œuvre par l'agence Santé publique France pour établir le Nutriscore défavorisent certaines filières agroalimentaires traditionnelles en occultant une partie de la composante positive de l'aliment, et pointe du doigt certaines incohérences politiques avec les principes de la loi « EGalim » promouvant la fourniture de produits alimentaires sous signes officiels de qualité et d'origine dans la restauration collective par exemple. Selon certaines simulations, 90 % des fromages obtiendraient avec les critères actuels un Nutriscore D ou E alors que le Haut Conseil de la santé publique recommande la consommation de deux produits laitiers par jour. Le caractère naturel du fromage ne serait pas suffisamment pris en compte quand des produits ultra-transformés obtiendraient de meilleures notations, l'ajout d'additifs ou de conservateurs étant ignoré dans le Nutriscore. La généralisation d'une base de consommation des produits à 100 grammes ne correspond pas à la consommation effective des denrées, un français adulte consommant en moyenne 38,5 grammes de fromage par jour quand une canette de soda de 33 centilitres une fois ouverte est entièrement bue. Enfin, certains bénéfices nutritionnels du fromage, comme les apports en calcium, en protéines et en matières grasses laitières, seraient peu pris en compte dans le calcul du Nutriscore. Au regard de ces constats et de la nécessité de soutenir les filières agricoles et agroalimentaires traditionnelles et pastorales, la députée souhaiterait savoir si le Gouvernement entend demander une évolution des critères pris en compte dans la constitution du Nutriscore à l'agence Santé publique France, et comment celui-ci accueille la possible demande d'exemption d'étiquetage obligatoire du Nutriscore sur les produits de la filière lait de brebis, à l'instar de demandes formulées en Espagne et en Italie.

Réponse émise le 15 juin 2021

Le Nutri-score est le dispositif que les pouvoirs publics français ont choisi de recommander à l'issue d'une démarche scientifique, innovante, inclusive et fondée sur le dialogue avec les parties prenantes. Ce logo fournit au consommateur, sur la face visible des emballages alimentaires, une information lisible et facilement compréhensible sur la qualité nutritionnelle globale des produits, au moment où il fait ses courses. Il peut ainsi comparer les produits et orienter ses choix vers des aliments de meilleure qualité nutritionnelle. Fondée par l'arrêté du 31 octobre 2017, la démarche d'engagement en faveur du Nutri-score est volontaire, en conformité avec le droit européen. Le Nutri-score n'est donc pas devenu obligatoire au 1er janvier 2021. Le Nutri-score est largement déployé par les professionnels de l'alimentation et plébiscité par les français. En juillet 2020, 415 entreprises étaient engagées dans la démarche Nutri-score en France, dont les parts de marché représentent environ 50 % des volumes de vente. Désormais, ce sont près de 500 entreprises qui se sont engagées en faveur du logo. De même, près de 94 % des français ont déclaré être favorables à sa présence sur les emballages. De nombreux travaux scientifiques ont permis de montrer que le Nutri-score était un outil efficace pour discriminer la qualité nutritionnelle des denrées alimentaires, de manière cohérente avec les recommandations alimentaires, en France mais également dans de nombreux pays européens. La démarche d'engagement en faveur du Nutri-score est volontaire, en conformité avec le droit européen. Le Nutri-score et les signes de l'origine et de la qualité (SIQO) répondent à des objectifs différents. Les SIQO constituent une « garantie » pour les consommateurs en termes de qualité, de savoir-faire, de protection de l'environnement, d'origine et de terroir, quand le Nutri-score informe le consommateur sur la qualité nutritionnelle des produits transformés, et permet de comparer les produits entre eux. Le Nutri-score est basé sur les valeurs nutritionnelles pour 100 g ou 100 ml, en conformité avec la recommandation de l'organisation mondiale de la santé et des structures de santé publique, car cela permet de comparer de façon objective les aliments entre eux sur la même base et d'éviter de faire appel à des tailles de portions qui ne sont pas standardisées et souvent définies par les industriels eux-mêmes. Par exemple pour des pizzas, la portion recommandée varie selon les marques, certaines proposant une portion de 100 g, d'autres 150 g, d'autres 175 g. Les fromages font déjà l'objet d'une adaptation dans le calcul du Nutri-score, pour prendre en compte leur teneur élevée en calcium. Si les fromages sont classés pour la majorité en D et parfois en E, ceci s'explique par le fait qu'ils contiennent des quantités non négligeables de graisses saturées et de sel et sont également caloriques. Mais, comme tous les produits classés D ou E avec le Nutri-score, les fromages peuvent parfaitement être consommés dans le cadre d'une alimentation équilibrée. Informer les consommateurs sur la réalité de la qualité nutritionnelle de ces aliments n'exclut pas de les consommer mais en quantités et/ou fréquences conformes aux recommandations nutritionnelles du programme national nutrition santé (deux produits laitiers par jour pour les adultes, trois produits laitiers pour les enfants), ce qui est totalement en cohérence avec la signification de leur classement sur l'échelle du Nutri-score. Il est néanmoins possible de tenir compte des spécificités nutritionnelles des fromages dans le cadre du processus existant, sur une base scientifique. Sept pays sont désormais engagés en faveur du Nutri-score : la France, la Belgique, l'Allemagne, les Pays-Bas, le Luxembourg et la Suisse. Une gouvernance a été mise en place entre ces pays, comprenant notamment un comité scientifique. Ce comité, composé d'experts scientifiques indépendants, s'est réuni pour la première fois le 12 février dernier et aura pour mission d'évaluer la pertinence scientifique des propositions d'évolution du mode de calcul Nutri-score. La France proposera dans le cadre de ce comité que les spécificités des produits sous AOP soient prises en compte. Néanmoins, toute évolution ne pourra être envisagée que sous réserve de validation scientifique par ce comité. La Commission européenne prévoit, dans sa stratégie « de la ferme à l'assiette » publiée en mai 2020 une proposition législative d'étiquetage nutritionnel en face avant harmonisé et obligatoire pour le 4e trimestre 2022. Dans ce cadre, le Gouvernement souhaite que le Nutri-score soit le dispositif retenu.

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