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Vincent Descoeur
Question N° 5206 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 6 février 2018

M. Vincent Descoeur attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les difficultés que rencontrent certains vétérinaires, qui ont participé dans le cadre d'un mandat sanitaire à l'éradication des grandes épizooties qui sévissaient dans les élevages français entre les années 1950 et 1990, pour faire valoir leurs droits à la retraite. Ces vétérinaires ont perçu des rémunérations présentées par l'État comme des honoraires et, de ce fait, ils n'ont pas bénéficié d'une affiliation aux organismes sociaux et de retraite pour ces activités. Suite à deux arrêts du Conseil d'État du 14 novembre 2011 qui ont reconnu la faute de l'État, celui-ci a mis en place une procédure de traitement des demandes d'indemnisation du préjudice subi par ces vétérinaires du fait de leur défaut d'affiliation aux régimes général et complémentaire de sécurité sociale au titre des activités exercées avant 1990 dans le cadre du mandat sanitaire. Pour autant, les vétérinaires les plus âgés, en particulier ceux ayant fait valoir leurs droits à la retraite plus de quatre années avant que la faute de l'État n'ait été reconnue, se sont vus refuser toute indemnisation au motif que leur demande serait prescrite en application de la loi du 31 décembre 1968 sur la prescription quadriennale. L'État considère en effet que le délai de prescription court à compter du 1er janvier suivant le jour de la liquidation de la pension de retraite libérale, analyse validée par un arrêt du Conseil d'État du 27 juillet 2016. Or ces vétérinaires sont ceux qui ont le plus souvent les pensions de retraite les plus faibles et ceux qui ont consacré le plus de temps aux missions d'éradication de ces épizooties. C'est également une préoccupation pour les conjoints survivants qui peuvent se trouver dans une situation financière précaire. Il souhaite savoir si le Gouvernement envisage des mesures pour, à titre exceptionnel, permettre à ces vétérinaires ou à leurs conjoints survivants de recouvrer leurs droits.

Réponse émise le 6 mars 2018

L'État a tiré toutes les conséquences des deux décisions du Conseil d'État du 14 novembre 2011. Il a mis en place, dès 2012, une procédure harmonisée de traitement des demandes d'indemnisation du préjudice subi par les vétérinaires du fait de leur défaut d'affiliation aux régimes général et complémentaire de sécurité sociale au titre des activités exercées avant 1990 dans le cadre du mandat sanitaire. Cette procédure est longue et complexe. Elle s'appuie sur la reconstitution des rémunérations perçues annuellement par chaque vétérinaire sur la période d'exercice de son mandat sanitaire jusqu'en 1990. L'activité sanitaire des vétérinaires s'avère, en effet, avoir été très variable selon les praticiens et ce indépendamment du département d'exercice. 1 088 vétérinaires ont déposé un dossier recevable et complet et accepté la proposition d'assiette sur laquelle seront calculés les arriérés de cotisation dus aux caisses de sécurité sociale ainsi que les minorations de pension échues pour les vétérinaires déjà retraités. Au 12 février 2018, 948 vétérinaires ont d'ores et déjà été indemnisés. Certains dossiers présentent néanmoins des difficultés particulières en raison d'un dépôt tardif. L'article 1er de la loi no 68-1250 du 31 décembre 1968 dispose que « sont prescrites au profit de l'État… toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis ». Le Conseil d'État a confirmé, dans ses décisions no 388198 et 388199 du 27 juillet 2016, que le délai de prescription de la demande d'indemnisation courait à partir du 1er janvier suivant le jour de la liquidation de la retraite. Il a aussi souligné que la nature de salaires des sommes correspondant à la rémunération des missions effectuées par un vétérinaire dans le cadre d'un mandat sanitaire avait été clairement établie par ses décisions du 12 juillet 1969 et du 12 juin 1974 qui ont donné lieu à diffusion et à retranscription dans plusieurs instructions de la direction générale des impôts. Ce n'était qu'à compter du 1er janvier 1990, date d'entrée en vigueur de la loi du 22 juin 1989 modifiant et complétant certaines dispositions du livre deuxième du code rural, que les rémunérations perçues au titre des actes accomplis dans le cadre du mandat sanitaire avaient été « assimilées », pour l'application du code général des impôts et du code de la sécurité sociale, à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale. Ainsi le Conseil d'État a-t-il jugé que les vétérinaires ne pouvaient être légitimement regardés comme ignorants de leur créance au moment où ils ont liquidé leur droit à pension. Le Conseil d'État, dans une décision du 10 janvier 2007 (Mme Martinez, no 280217), a en outre jugé que l'erreur de l'administration était sans incidence sur la légalité de la décision par laquelle l'administration opposait la prescription quadriennale à la réclamation d'un administré. L'article 6 de la loi précitée dispose également que « les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription qui découle de la présente loi ». Si cet article prévoit aussi que les créanciers de l'État peuvent être relevés en tout ou partie de la prescription, ce n'est qu'en raison de circonstances particulières, notamment de la situation du créancier. Cette possibilité ne peut être qu'exceptionnelle, au risque, en cas de généralisation, de remettre en cause toute sécurité juridique et toute égalité des citoyens devant la loi. Conformément à l'objectif précédemment annoncé, le ministère a procédé en 2017 à l'indemnisation de 230 vétérinaires retraités, ainsi que d'une centaine de vétérinaires en activité, soit une augmentation de 38 % du volume de transactions réalisé comparé au même chiffre au titre de l'année précédente. 2018 verra cette dynamique se poursuivre avec, d'ores et déjà, 131 protocoles signés. Suite à la résolution des questionnements juridiques afférents, l'ensemble des veufs et veuves ainsi que les ayants droit éligibles de vétérinaire sanitaire, ayant déjà accepté une proposition d'assiette, se verront à leur tour soumettre un protocole transactionnel dans les toutes prochaines semaines. Les autres suivront. Enfin, l'annonce imminente de la clôture de la procédure transactionnelle, incluant une date limite de dépôt des nouvelles demandes au 15 mai prochain, devrait permettre le recensement des dernières requêtes recevables avec pour objectif l'indemnisation de la totalité des dossiers éligibles – toutes catégories confondues – d'ici à la fin de l'année 2018, comme le ministre de l'agriculture et de l'alimentation s'y était engagé.

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