Intervention de Julie Sommaruga

Séance en hémicycle du 8 mars 2016 à 15h00
Liberté indépendance et pluralisme des médias — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulie Sommaruga :

J’ai, comme vous tous, une pensée émue à cette tribune en pensant à notre collègue Sophie Dessus.

En débattant aujourd’hui de la proposition de loi socialiste visant à renforcer la liberté, l’indépendance et le pluralisme des médias, nous nous inscrivons dans l’héritage du long combat pour la liberté de la presse.

Indissociable de celui pour la démocratie, le combat pour la liberté de la presse a depuis toujours signifié l’émancipation contre l’oppression et le progrès contre le conservatisme. Ce long chemin vers la liberté nous a livré ses acquis inestimables, qu’il nous faut chaque jour préserver comme des piliers sur lesquels se fonde notre démocratie et prospère notre vivre-ensemble.

Je pense bien sûr à l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, mais également à la loi emblématique du 29 juillet 1881, et bien entendu à la libération des ondes et à la création de la Haute Autorité de la communication audiovisuelle, sous François Mitterrand.

Depuis 2012, le Gouvernement et notre majorité s’inscrivent pleinement dans cet héritage pour garantir encore et toujours la liberté de la presse, ainsi que l’indépendance et le pluralisme des médias. C’est l’enjeu de la loi que nous avons fait adopter en novembre 2013 et qui a redonné au CSA la compétence de nomination des dirigeants des sociétés de l’audiovisuel public – prérogative, il ne faut pas l’oublier, que s’était arrogée l’ancien Président Nicolas Sarkozy.

Aujourd’hui, en débattant de la proposition de loi du groupe SRC, et tout particulièrement du président Patrick Bloche, dont je salue l’engagement et la force de conviction, nous souhaitons aller plus loin pour faire vivre le triptyque « liberté, indépendance et pluralisme » dans un paysage médiatique confronté à de nouveaux enjeux, comme la révolution numérique, le rythme effréné de l’information en continu ou la concentration des médias.

Sans vouloir être exhaustive, je souhaiterais souligner trois avancées majeures.

La première est le renforcement de la protection des journalistes, avec la généralisation à tous les journalistes du droit d’opposition reconnu depuis 1986 à ceux de l’audiovisuel public, ainsi que des dispositions visant à protéger le secret des sources.

La deuxième est l’instauration de comités d’éthique composés de personnalités indépendantes, au sein des radios et des télévisions qui diffusent des émissions d’information politique ou générale.

La troisième est la clarification des missions d’un CSA renforcé, à qui les moyens d’action sont pleinement donnés.

Ces avancées sont autant de garanties pour une information libre, indépendante et pluraliste, condition indispensable pour tisser un lien de confiance entre nos concitoyens et leurs médias – lien trop souvent distendu par le soupçon que peut faire peser la détention de certains médias par de grands groupes industriels et financiers.

Or cette confiance est plus que jamais essentielle pour renforcer la démocratie, au moment où celle-ci doit faire face à la barbarie terroriste – qui s’attaque d’ailleurs à des journalistes et à leur liberté –, comme elle doit faire face à l’asservissement des pensées au profit d’intérêts particuliers faisant le lit du populisme et de l’extrémisme.

Pour conclure, mes chers collègues, je vous propose de faire résonner dans cet hémicycle les mots de Victor Hugo, qui rappelait, du haut de cette tribune, le 11 septembre 1848, à quel point la liberté de la presse est indispensable.

Certes, dans son discours, il ne s’adressait qu’à des hommes, mais je crois qu’en cette journée du 8 mars qui célèbre le droit des femmes, nous pouvons être fiers que ses paroles, toujours d’actualité, puissent également s’adresser à des femmes députées.

Voilà ce que disait le grand Victor Hugo : « La liberté de la presse, c’est la raison de tous cherchant à guider le pouvoir dans les voies de la justice et de la vérité. Favorisez, messieurs, favorisez cette grande liberté, ne lui faites pas obstacle ; songez que le jour où […] on verrait ce principe sacré, ce principe lumineux, la liberté de la presse, s’amoindrir au milieu de nous, ce serait en France, ce serait en Europe, ce serait dans la civilisation tout entière l’effet d’un flambeau qui s’éteint ! »

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