Projet de loi de finances pour 2019 — Texte n° 1255

Amendement N° CD114A (Retiré)

Publié le 2 octobre 2018 par : M. Colombani.

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I. - Après le 1bis de l'article 206 du code général des impôts, il est inséré un 1ter ainsi rédigé :

« 1ter. Ne sont pas passibles de l'impôt sur les sociétés prévu au 1 les installations de production d'hydroélectricité exploitées par des collectivités territoriales en Corse. »

II. – La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

Exposé sommaire :

Les zones non interconnectées (ZNI) possèdent des handicaps physiques (taille, démographie, insularité) qui rendent la production d'électricité beaucoup plus onéreuse que sur le continent européen, notamment parce que la petite taille des systèmes électriques des ZNI ne permettent pas d'opérer des économies d'échelle qui rendraient le marché local rentable (populations faibles, difficultés physiques d'exportation).

Ainsi dans les ZNI le coût moyen de production de l'électricité est de 290 € par MWh : il atteint 200 € par MWh en Corse en 2017.

En Corse, ces surcoûts ont atteint 250 M € en 2013, dont 200 M € imputables au parc historique, aussi thermique qu'hydraulique, d'EDF SEI, filiale qui gère le service public de l'électricité en Corse et dans les outre-mer. En 2010, ces surcoûts avaient fortement décru en raison de conjonctures économiques et climatiques : une baisse du prix du pétrole et une hydraulicité forte : les deux principales variables d'ajustements des surcoûts de production d'électricité dans l'île sont en effet le fuel et de l'hydraulicité1, utilisés dans le parc historique d'EDF SEI. En outre, il ressort de la Programmation pluriannuelle de l'énergie pour la Corse 2016‑2018 / 2019‑20232 que « la petite hydraulique fournit de l'électricité au coût le plus avantageux, suivi des interconnexions, du biogaz et de l'éolien ».

Afin d'équilibrer ces surcoûts, un cadre territorial de compensation a été établi afin de répartir de façon plus équitable sur l'ensemble du territoire national les charges financières liées à la Contribution au service public de l'électricité pesant sur le consommateur final. Ce cadre territorial de compensation permet d'investir dans des projets limitant les surcoûts de production (notamment la petite hydraulique par exemple) les sommes qui auraient dû être attribuées par la Commission de régulation de l'énergie au titre de la compensation du surcoût dans les ZNI : plus un projet limite les surcoûts, moins la CRE devra les compenser, de tels projets sont donc indirectement subventionnés car ils permettent d'opérer un amortissement durant leur période d'exploitation.

Le prélèvement d'impôts tels que l'impôt sur les sociétés (IS) vient limiter l'efficacité de ce cadre territorial de compensation.

Le cadre fiscal de la Corse semble donc modérément avantageux afin d'inciter les collectivités à investir dans des moyens de productions d'électricité, notamment l'hydroélectricité, visant à limiter les surcoûts dans cette ZNI de Méditerranée, où les projets d'initiative privée sont moins rentables.

Tel n'est cependant pas le cas dans d'autres ZNI où le cadre fiscal est plus avantageux qu'en Corse. Ainsi l'article 44 quaterdecies du code général des impôts instaure un abattement de l'impôt sur les sociétés pour les entreprises implantées en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique ou à La Réunion.

Cette mesure s'inscrit dans le cadre du régime fiscal des zones franches d'activités (ZFA) d'outre-mer. Ce régime des ZFA a dû être notifié à la Commission européenne qui l'a déclarée aide d'État compatible avec la réglementation sur le Marché intérieur, sous réserve de respecter le Règlement Général d'Exemption par Catégorie. Or les îles d'outre-mer constituent toutes des zones non interconnectées au réseau métropolitain continental (en encore « systèmes électriques insulaires »). A ce titre, ces îles ont des programmations pluriannuelles de l'énergie spécifiques et autonomes. La Corse a été d'ailleurs le premier territoire de la République à se doter d'une Programmation pluriannuelle de l'énergie pour la période 2016‑2023.

Or il ressort des éléments précédents que la Corse est la seule zone non interconnectée à ne pas bénéficier d'un cadre fiscal aussi favorable en matière de prélèvement obligatoire sur la production d'énergies renouvelables. Les collectivités des départements d'outre-mer promouvant des productions d'énergies propres bénéficient par exemple d'un abattement de l'impôt sur les sociétés au titre de la ZFA précitée.

La Corse est donc contrainte de promouvoir une transition écologique dans les mêmes conditions fiscales que des collectivités continentales alors pourtant qu'elle souffre des contraintes de l'insularité et qu'elle est, pour cause, dotée d'une programmation pluriannuelle de l'énergie autonome. Il peut toutefois sembler contradictoire qu'une programmation pluriannuelle de l'énergie spécifique soit déployée en Corse sans être accompagnée d'instruments fiscaux adaptées afin de la faire réussir.

Tel est l'objet du présent amendement.

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