Projet de loi de finances pour 2019 — Texte n° 1255

Amendement N° CD27C (Rejeté)

Publié le 16 octobre 2018 par : Mme Panot.

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I. – Les recettes suivantes sont attribuées à l'établissement public mentionné à l'article L. 131‑3 du code de l'environnement, renommé « Fonds pour le financement de la transition écologique » :

1° Une majoration exceptionnelle à hauteur de 10 % de la taxe due par les sociétés concessionnaires d'autoroutes en application de l'article 302bis ZB du code général des impôts ;

2° Les redevables de la taxe due par les sociétés concessionnaires d'autoroutes en application de l'article 302bis ZB du code général des impôts sont assujettis à une contribution exceptionnelle égale à une fraction de l'impôt sur les sociétés prévu par l'article 205 du code général des impôts, impôt calculé sur leurs résultats imposables, aux taux mentionnés à l'article 219 du code général des impôts, des exercices clos à compter du 31 décembre 2018 et jusqu'au 30 décembre 2019. Cette contribution exceptionnelle est égale à 15 % de l'impôt sur les sociétés dû, déterminé avant imputation des réductions et crédits d'impôt et des créances fiscales de toute nature ;

3° Une majoration exceptionnelle à hauteur de 10 % de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques prévue à l'article 265 du code des douanes ;

4° Une majoration exceptionnelle à hauteur de 10 % de la taxe mentionnée à l'article 266sexies du code des douanes.

II. – À l'intitulé de la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code de l'environnement et aux articles L. 131-3 à L. 131-7, chaque occurrence des mots : « L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie » est remplacée par les mots : « Le Fonds pour le financement de la transition écologique » et chaque occurrence des mots : « Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie » est remplacée par les mots : « Fonds pour le financement de la transition écologique ».

III. – Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article.

Exposé sommaire :

Le dernier rapport du GIEC indique qu'au-delà d'une hausse de 1,5 °C, la planète toute entière changera de visage. La différence de conséquences entre une hausse de 1,5°C et 3°C sera majeure. Selon les experts du GIEC, la mesure la plus urgente est de réduire les émissions de CO2 de 45 % en 2030 par rapport à 2010 et d'atteindre la « neutralité carbone » en 2050. Les énergies renouvelables devront constituer 20 à 70 % de la production électrique en 2050. Et l'industrie devra réduire ses émissions de CO2 de 75‑90 % d'ici 2050 par rapport à 2010.

A l'heure de l'urgence climatique, le GIEC nous exhorte à prendre des mesures radicales en faveur de la transition écologique. Nous considérons que les opérateurs publics du ministère de l'Écologie participent directement d'une nécessaire transition écologique et constituent une structure solide pour répondre aux enjeux de l'urgence écologique et notamment climatique. Pourtant, le projet de loi de finances continue de les maltraiter autant que leur ministère de tutelle.

Le nouveau budget annoncé est de 10,59 milliards d'euros contre 10,39 lors de l'exercice précédent. Corrigé de l'inflation, il s'agit d'une maigre hausse de 0,22 %. Il acte également de la suppression programmée de 1078 postes (État 811 ETP et opérateurs 267 ETP), soit 2 % de la masse totale. Déjà 1324 ETP ont été supprimés en 2018. Les opérateurs du ministère sont en souffrance. De 2013 à 2019 inclus, le cumul des suppressions d'emplois sur le périmètre ministériel aboutit à 9 000. Sur le périmètre des opérateurs, le cumul s'élève à 4 250 emplois. Soit 13 250 emplois supprimés au total. Le gouvernement pense réaliser de la sorte une économie de 22 millions en dépenses de personnel en 2019, sur le dos de nos objectifs en matière de lutte contre les changements climatiques et de transition écologique.

La réduction drastique des subventions pour charges de service public au CEREMA est hautement problématique. Les crédits affectés au CEREMA sont amputés de 5 millions d'euros par an, soit plus de 2 % de son budget. Une telle coupe a entraîné 103 suppressions de postes en 2018, 101 en 2019. Les grands projets d'aménagement à venir et les intentions de rénovation, notamment des ouvrages d'art doivent être accompagnés d'une expertise publique. A l'heure actuelle, au vu des moyens alloués et des plans annoncés de réduction des effectifs (25 % sur la période 2015 – 2022), les capacités du CEREMA à répondre aux demandes des collectivités territoriales et à l'intérêt général sont mises en danger. Nous ne pouvons nous résoudre à abandonner ainsi un opérateur public héritier de la mémoire et de l'expertise de la puissance publique française en matière d'aménagement et d'environnement durables. Nous ne pouvons pas non plus envisager le transfert de compétences et de responsabilité majeures au secteur privé, au trop grand risque de collusions d'intérêts économiques privés qui primeraient sur l'objectivité des études à mener. L'Agence française pour la biodiversité, pour sa part, doit être à l'avant-garde des politiques de biodiversité et de transition écologique. Pourtant, ses moyens se réduisent à mesure que ses prérogatives s'étendent. Pire, on demande aux agences de l'eau de financer elles-mêmes les opérateurs de la biodiversité en plafonnement leurs recettes, au détriment de leurs propres actions.

Les besoins d'investissements annuels pour atteindre les objectifs climat se situent entre 45 et 75 milliards d'euros par an de 2016 à 2030 (I4CE). Actuellement, nous ne dépensons que 31 milliards d'euros répartis à parts égales entre ménages, entreprises et acteurs publics : le compte n'y est pas. Le besoin de financement public est de l'ordre de 10 à 20 milliards par an supplémentaires. Dans le même temps, un rapport de la cour des comptes (2016) établit que les dépenses favorables à l'environnement sont de l'ordre de 5 milliards d'euros, tandis que les dépenses qui lui sont défavorables atteignent les 13 milliards d'euros, dont 3 milliards de niche fiscale sur le kérozène aérien, sans compter les exonérations d'autres secteurs. A maintenir ces niches fiscales, nous encourageons les principaux pollueurs autant que nous nous privons de moyens financiers à la hauteur de l'urgence climatique. Cette inaction et ce manque de volonté politique ont pour conséquence la hausse des émissions de gaz à effet de serre en France de 3 % en 2017, alors que le respect de l'accord de Paris imposerait qu'elles décroissent de 5 % par an.

Cet amendement propose donc la mise en place d'un fonds pour le financement de la transition écologique chargé de financer, dans la limite de ses ressources, des actions en faveur de la transition écologique et des actions de lutte contre les changements climatiques et la préservation de la biodiversité, en accord avec les objectifs de l'Accord de Paris. Il a pour objet d'accorder aux établissements publics et agences relevant de la compétence des ministères de l'écologie et de la cohésion des territoires des subventions destinées au financement des études, travaux et politiques publiques menées par ces opérateurs au bénéfice de l'État et des collectivités territoriales. A titre d'exemple on pourra mentionner la nécessité d'un plan de rénovation thermique ambitieux (tant pour le parc social que privé) ou encore la mise en place d'une politique de tri et de réduction des déchets à la source.

Nous proposons que ce fonds soit administré par un conseil d'administration de trente membres comportant pour moitié des députés désignés s'efforçant de reproduire la configuration politique de l'Assemblée, pour un quart d'un représentant de chaque opérateurs et agences bénéficiaires du fonds et pour un quart d'associations de protection de l'environnement représentatives au titre de l'article L. 141‑3 du code de l'environnement.

Un rapport annuel retraçant l'activité du fonds est établi par le conseil d'administration du fonds. Ce rapport dresse notamment un bilan des dotations allouées aux opérateurs et agences. Il établit annuellement une trajectoire budgétaire du fonds afin de réévaluer les fractions du produit de ces taxes affectées au fonds aux trajectoires de celles-ci.

La hausse de la trajectoire de la taxe carbone décidée par le gouvernement abondera le budget de l'état à hauteur de 17 milliards d'euros en 2020. Et le maintien des nombreuses niches fiscales existantes constituera un manque à gagner mécaniquement croissant, proportionnel au poids de plus en plus conséquent de cette fiscalité. Il est donc tout à fait réaliste d'abonder ce fonds par la majoration exceptionnelle de différentes taxes relevant de la fiscalité environnementale, en application stricte du principe pollueur-payeur consacré par la Charte de l'environnement. Mais également par le biais d'une contribution exceptionnelle sur les sociétés concessionnaires d'autoroutes égale à une fraction de l'impôt sur les sociétés prévu par l'article 205 du code général des impôts, dû pour l'année 2019. Un tel fonds constituera un signal déterminant de l'engagement de la France dans la lutte contre les changements climatiques et la nécessaire transition écologique.

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