Publié le 9 octobre 2018 par : M. Woerth.
I. – Rédiger ainsi cet article :
« L'article 46 de la loi n° 2011‑1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 est abrogé. »
II. – La perte de recettes pour l'État résultant du I est compensée à dure concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement a pour objet d'interpeller le Gouvernement sur la dérive de la pratique des taxes affectées qui font l'objet d'un « plafonnement ».
Dans un récent rapport (juillet 2018), le Conseil des prélèvements obligatoires a étudié 150 taxes affectées pour près de 30 milliards d'euros.
Les « taxes affectées » sont une spécificité du système fiscal français. Elles ont pour objet d'individualiser des ressources au profit de politiques publiques particulières, en les affectant à des opérateurs (personne morale autre que l'État chargée de missions de service public).
Si elles peuvent être utiles, elles révèlent aussi parfois une volonté de se soustraire aux contraintes de la procédure budgétaire et de garantir des financements pluriannuels.
Elles apparaissent donc problématiques tant au regard du principe d'universalité budgétaire que d'annualité budgétaire, qui découle du consentement à l'impôt.
Le Conseil remarque une forme de rationalisation depuis 2013 mais déplore les dérives persistantes de cet usage qui contribue à l'émiettement, au manque de clarté et à l'instabilité du système fiscal français. Le coût de collecte de ces taxes est parfois très élevé au regard du rendement.
Ces taxes sont pour certaines dynamiques, et les recettes de certains opérateurs ont ainsi augmenté sans proportion avec le poids de leurs missions. Un plafonnement, décliné selon les taxes en fonction du besoin de financement de l'opérateur, a alors été introduit par la loi de finances pour 2012. Au-delà d'une certaine limite, les sommes collectées sont reversées au budget général de l'État. Ce plafonnement concerne un périmètre de 9,5 milliards d'euros de taxes en 2017.
Ce plafonnement a pu permettre de modérer la hausse des dépenses et des recettes des opérateurs, mais constitue cependant une imposition déguisée, puisqu'un prélèvement peut ainsi être consacré à une politique précise tout en étant excessif au regard des dépenses qu'il a pour objet de financer.
Pour 2018, le tome I des « voies et moyens » prévoyait ainsi plus de 1 milliard d'euros de reversement au budget général.
Deux exemples marquants :
– France Télévision doit percevoir au total en 2018 près de 300 millions de produit de la taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques (taxe dite « Copé ») ; or celle‑ci est plafonnée à 86 millions. France Télévision devrait ainsi reverser plus de 211 millions au budget de l'État.
L'article 29 supprime l'affectation à France Télévision, mais sans supprimer cette taxe. Son produit sera ainsi entièrement reversé à l'État. Cette taxe, instaurée en 2009 pour financer la suppression de la publicité, plafonnée et reversée dans une proportion de plus en plus importante au budget de l'État sera donc maintenue mais ne financera plus du tout France Télévision.
– Le Centre national pour le développement du sport doit reverser 139 millions d'euros de prélèvements sur les jeux exploités par la FDJ hors paris sportifs, pour un plafond prévu à 73 millions.
Certes, la loi de programmation des finances publiques 2014‑2019 inscrit ces taxes dans la norme d'évolution des dépenses et fixe un objectif de baisse de leur plafond. Elle prévoit également des objectifs de plafonnement, et de « rebudgétisation » des taxes non plafonnées.
Mais le Conseil des prélèvements obligatoires note que ces intentions n'ont été que peu suivies d'effet ; seules 5 taxes ont été plafonnées en 2016 et aucune n'a été rebudgétisée en 2017. Il regrette que « les objectifs de baisse des plafonds ont été totalement oubliés en 2016 et 2017 ». Ces objectifs ne sont pas tous repris dans la loi de programmation 2018‑2022.
Cet amendement a pour objet d'appeler le Gouvernement à faire toute la lumière sur cette pratique et à proposer un dispositif plus satisfaisant que le plafonnement généralisé et le reversement dans le budget général de l'excédent perçu assortis d'objectifs peu contraignants et non respectés.
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