Publié le 6 mars 2019 par : M. Blanchet.
Après l'alinéa 16, insérer les cinq alinéas suivants :
« VII. – Le chapitre II de la loi n° 2010‑476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne est complété par un article 14‑1 ainsi rédigé :
« Art. 14‑1. – I. – Par dérogation aux dispositions de L. 322‑2 du code de la sécurité intérieure, toute personne titulaire de l'agrément prévu à l'article 21 de la présente loi en tant qu'opérateur de jeux de table et de jeux de casino en ligne peut organiser, dans les conditions prévues par la présente loi, de tels jeux.
« II. – Pour l'application du I, seuls peuvent être proposés en ligne les jeux de table constituant des jeux de contrepartie dans lesquels l'intervention du hasard, intervient postérieurement à l'acte de jeu. Seuls sont autorisés les jeux de casinos en ligne constituant des jeux pour lesquels le hasard intervient concomitamment à l'acte de jeu.
« III. – Les mises sont enregistrées en compte par transfert de données numériques exclusivement par l'intermédiaire d'un service de communication au public en ligne, à l'initiative du joueur connecté directement au site de l'opérateur agréé.
« IV. – Les catégories de jeux mentionnées au II ainsi que les principes régissant leurs règles techniques sont fixés par décret. »
Tout d'abord, il convient, dans un contexte de privatisation, de préciser dans la loi le champ d'activité sous monopole attribué à la Française des Jeux. La formulation initiale est imprécise car elle vise les jeux de loterie, qui constituent au sens de l'article L. 322‑2 du code de la sécurité intérieure l'ensemble des jeux d'argent et de hasard. Cela revient à confier à une personne morale unique l'exclusivité sur l'ensemble des jeux d'argent et de hasard. La rédaction initiale crée ainsi une insécurité juridique, qui pourrait conduire à des recours contre le monopole et contre son titulaire.
Le présent amendement vise à définir les activités actuellement exercées sous monopole par la Française des Jeux. L'Observatoire des jeux et la Cour des comptes dans son rapport d'octobre 2016, définissent ces activités comme des jeux de grattage et de tirage. Outre le remplacement du mot « loterie » par ceux de « grattage et de tirage », le présent amendement vient définir ces deux concepts juridiquement, pour remédier à une carence de la législation. Une liberté est donnée à l'opérateur de proposer des produits en ligne différenciés de l'offre en réseau physique.
Par ailleurs, l'article 51 du projet de loi prévoit de refondre, par ordonnance, la régulation de l'ensemble du secteur des jeux d'argent et de hasard. Sans attendre ces ordonnances, il convient d'apporter dès aujourd'hui des modifications attendues à la réglementation de l'offre légale de jeux en ligne, afin de capitaliser sur les effets de l'ouverture à la concurrence instaurée par la loi du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne.
L'offre des opérateurs privés de jeux en ligne est aujourd'hui restreinte aux paris sportifs et hippiques et concernant les jeux de cercle, aux seuls jeux de poker. L'offre légale de jeux en ligne n'inclut pas l'ensemble des jeux de table et de casino. Comme l'ont relevé tant la Cour des comptes, dans son rapport du 19 octobre 2016, que le Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de l'Assemblée nationale, dans son rapport du 8 février 2017, cette situation nuit à l'attractivité des offres de jeux en ligne et favorise le développement de l'offre illégale au détriment d'une offre régulée et contrôlée.
Plusieurs études, dont en dernier lieu, une note de juillet 2018 de l'Observatoire des jeux du ministère de l'Economie et des finances sur Les pratiques de jeux d'argent sur internet en France en 2017, indiquent qu'entre 800 000 et un million de joueurs pratiquent des jeux en ligne sur des sites qui échappent à tout contrôle et toute régulation. Ce marché non régulé n'offre aucune protection aux joueurs, ni en termes de lutte contre les addictions, ni en termes de sécurité de jeu. Le produit brut des jeux sur les sites en ligne illégaux peut être évalué entre 600 millions et 1 milliard d'euros : en conséquence, entre 300 et 550 millions d'euros de recettes fiscales et sociales des jeux échappent aujourd'hui chaque année à la puissance publique.
Cet amendement vise donc à ramener cette activité vers des sites agréés en ouvrant le périmètre des jeux en ligne, légaux et régulés, aux jeux de table (roulette, black jack, etc) et de casino (machine à sous). La réforme n'aura pas d'incidence sur les droits exclusifs de la Française des jeux, qui détient le monopole des jeux de grattage et de tirage en réseau physique et en ligne.
L'ouverture du périmètre des jeux en ligne permettra cependant de mieux protéger les joueurs, de lutter contre le blanchiment et d'apporter de nouvelles recettes fiscales et sociales pour l'État.
Enfin, envisager de laisser opérer ces jeux de hasard en ligne à la seule FDJ alors que ceux-ci demeureraient interdits aux opérateurs à capitaux privés, au moment même où la FDJ devrait voir son capital évoluer en ce sens, créerait une instabilité juridique préjudiciable à tous qui serait de nature à susciter des contentieux dont les conséquences pourraient aller au-delà de la remise en cause de ce seul secteur des jeux de hasard en ligne. Pour des raisons de sécurité juridique l'élargissement de cette offre à tous les acteurs dans un cadre régulé est donc la seule option, sauf à réduire drastiquement l'offre en ligne actuelle et future de la FDJ.
Cet amendement introduit donc à l'article 51 du projet de loi :
- un VII qui opère les modifications nécessaires à loi du 12 mai 2010 afin d'élargir le périmètre légal des jeux en ligne aux jeux de table et de casino et d'étendre, en conséquence, les compétences de l'Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL) pour contrôler les opérateurs agréés dans les nouveaux domaines réglementés.
Il convient également de créer les dispositions nécessaires dans le code général des impôts et dans le code de la sécurité sociale pour qu'à l'image du reste du secteur, des prélèvements fiscaux et sociaux actuellement applicables aux autres jeux en ligne le soient également aux jeux de table et de casino en ligne.
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