Taxe sur les services numériques — Texte n° 1737

Amendement N° CF136 (Rejeté)

Publié le 2 avril 2019 par : Mme Frédérique Dumas, Mme Magnier, Mme Lemoine.

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Le chapitre III du titre premier de la première partie du livre premier du code général des impôts est ainsi modifié :

1° La section XXII du chapitre III du titre Ier de la première partie est complétée par un article 235ter ZG ainsi rédigé :

« Art. 235terZG. – I. – 1. – Une taxe s’applique sur les revenus réalisés par une personne morale domiciliée ou établie hors de France, lorsqu’une entreprise ou entité juridique, établie ou non en France, y conduit une activité consistant en la vente ou la fourniture de produits ou de services appartenant à cette personne morale ou que celle-ci a le droit d’utiliser, et que :
« 1° Soit cette personne morale détient, directement ou indirectement, plus de 50 % des actions, parts, droits financiers ou droits de vote de l’entreprise ou de l’entité juridique ;
« 2° Soit l’entreprise ou l’entité juridique est placée sous le contrôle de la personne morale, au sens de l’article L. 233‑3 du code de commerce ;
« 3° Soit l’entreprise ou l’entité juridique et la personne morale sont détenues, directement ou indirectement, à plus de 50 % des actions, parts, droits financiers ou droits de vote par une même personne morale ou physique.
« 2. – Le présent article s’applique si une personne morale ou physique, domiciliée ou non en France, y conduit une activité en lien avec la vente de biens ou la fourniture de services par la personne morale domiciliée ou établie hors de France mentionnée au 1 et qu’il existe des raisons sérieuses de considérer que l’activité de cette personne morale ou physique a pour principal objectif et principal effet d’échapper à l’impôt qui serait dû en France ou d’atténuer son montant en application du même 1.
« Relève, lorsque la condition mentionnée au premier alinéa du présent 2 est remplie, du champ défini au présent 2 :
« 1° Toute personne agissant pour le compte de la personne morale domiciliée ou établie hors de France et qui, à ce titre et de façon habituelle, conclut des contrats ou intervient à titre principal dans le processus menant à la conclusion de contrats :
« a) Conclus au nom de la personne morale précédemment mentionnée ;
« b) ou portant sur le transfert de la propriété de biens, la concession du droit d’utilisation de biens appartenant à cette personne morale ou sur lesquels cette dernière possède une licence d’exploitation ;
« c) ou portant sur la vente ou la fourniture de biens ou de services par la personne morale précédemment mentionnée.
« Le c ne s’applique pas si la personne exerce son activité à titre indépendant et que l’activité réalisée avec la personne morale domiciliée ou établie hors de France relève du cadre ordinaire de cette activité. L’activité n’est pas considérée comme exercée à titre indépendant :
« – si la personne agit exclusivement pour la personne morale domiciliée ou établie hors de France ;
« – si la personne agit exclusivement pour des entreprises ou entités juridiques placées sous le contrôle ou la dépendance de la personne morale domiciliée hors de France au sens du 1 du présent I ;
« 2° Toute personne ayant une présence digitale significative en France. Un site internet, une application, ou tout autre support digital est qualifié de présence digitale significative en France dès lors que l’une des conditions suivantes est remplie :
« a) un nombre significatif de contrats pour la mise à disposition, directe ou indirecte, des services proposés est signé avec des résidents français ;
« b) un nombre important de clients français utilisent les services proposés à titre gratuit ou à titre onéreux ;
« c) les services proposés sont adaptés pour une utilisation en France ;
« d) la bande de trafic utilisée par des clients français est importante ;
« e) une corrélation existe entre les montants payés par la société étrangère propriétaire du support à une autre société et le niveau d’utilisation en France.
« Pour l’application du 2°, lorsque le site numérique n’est pas exclusivement lié à une personne morale domiciliée ou établie hors de France ou à une ou plusieurs personnes placées sous le contrôle de celle-ci, au sens du 1 du présent I, seule l’activité réalisée pour la personne morale domiciliée ou établie hors de France définie au 1 est prise en compte pour l’application du présent article.
« 3. Les revenus réputés soumis à la taxe au titre du 1 du présent I correspondent au bénéfice qui aurait résulté des activités réalisées en France en l’absence de montage artificiel destiné à détourner des bénéfices dans des pays étrangers aux fins de contourner la législation fiscale. Pour la détermination des charges déductibles du résultat fiscal, l’article 238 A est applicable.
« 4. L’impôt acquitté localement par la personne morale domiciliée ou établie hors de France est imputable sur la taxe établie en France, à condition d’être comparable à l’impôt sur les sociétés et, s’il s’agit d’une entité juridique, dans la proportion des actions, parts ou droits financiers détenus par la personne morale domiciliée ou établie hors de France.
« 5. Lorsque la personne morale domiciliée ou établie hors de France mentionnée au 1 du présent I est soumise à un régime fiscal privilégié, au sens du deuxième alinéa de l’article 238 A, ou qu’elle se trouve dans un territoire non coopératif, au sens de l’article 238‑0 A, la condition de dépendance ou de contrôle prévue aux 1, 2 et 3 du présent I n’est pas exigée.
« II. – Le I ne s’applique pas :
« 1° Si la personne morale domiciliée ou établie hors de France démontre que les activités mentionnées aux 1 et 2 du même I ont principalement un objet et un effet autres que celui de se soustraire à tout ou partie de l’imposition en France, en apportant la preuve du caractère réel, normal, non exagéré et non dépourvu de substance économique des opérations réalisées ;
« 2° Si la personne morale est établie ou constituée dans un État membre de l’Union européenne et si les activités mentionnées aux 1 et 2 dudit I ne peuvent être regardées comme constitutives d’un montage artificiel dont le but est de contourner la législation fiscale française.
« III. – Lorsqu’il est fait application du I du présent article, le bénéfice défini au 3 du même I est imposé au taux de 35 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2018 et au taux de 30 % à partir du 1er janvier 2020.
« IV. – Le présent article ne fait pas obstacle à l’application de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales et du b de l’article 1729 du présent code.
« V. – Les dispositions du présent article sont applicables dans les mêmes conditions aux entreprises mentionnées au I de l’article 242bis lorsque le vendeur ou le fournisseur du bien ou de la prestation est domicilié en France.
« VI. – La mise en œuvre de la taxe définie au présent article relève de la procédure de taxation d’office prévue aux articles L. 65 et suivants du livre des procédures fiscales. »

2° Après l’article 235ter ZG, il est inséré un article 235ter ZGbis ainsi rédigé :

« Art. 235ter ZGbis. – I. – 1. La taxe mentionnée à l’article 235ter ZG du présent code s’applique aux revenus qui ont été déduits de l’assiette de l’impôt sur les sociétés par des transactions de toute nature sans qu’elles ne puissent être justifiées par l’existence d’une substance économique et dès lors que ces transactions ont eu principalement pour objet et effet d’obtenir un avantage fiscal.
« 2. Les revenus réputés soumis à la taxe au titre du 1 du présent I correspondent à la différence entre le profit qui aurait été réalisé sans la déduction mentionnée au présent 1 et le profit réellement déclaré au titre de l’impôt sur les sociétés.
« II. – Le I ne s’applique pas :
« 1° Si la personne morale domiciliée ou établie hors de France démontre que les transactions mentionnées aux 1 du I ont principalement un objet et un effet autres que celui de se soustraire à tout ou partie de l’imposition en France, en apportant la preuve du caractère réel, normal, non exagéré et non dépourvu de substance économique des opérations réalisées ;
« 2° Si la personne morale est établie ou constituée dans un État membre de l’Union européenne et si les transactions mentionnées au 1 dudit I ne peuvent être regardées comme constitutives d’un montage artificiel dont le but est de contourner la législation fiscale française.
« III. – Lorsqu’il est fait application du I du présent article, le bénéfice défini au 2 du même I est imposé au taux de 35 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2018 et au taux de 30 % à partir du 1er janvier 2020. »
« IV. – La mise en œuvre de la taxe définie au présent article relève de la procédure de taxation d’office prévue aux articles L. 65 et suivants du livre des procédures fiscales. »

3° L’article L. 66 du livre des procédures fiscales est complété par un 6° ainsi rédigé :

« 6° À la taxe prévue aux articles 235ter ZG et 235ter ZGbis. »

Exposé sommaire :

La problématique de l’impôt concernant les sociétés du numérique ne doit pas s’arrêter au constat de l’inadaptation des règles de l’impôt à cette nouvelle économie. Certaines sociétés du numérique se sont structurées de sorte à ce que la majeure partie de leurs profits se trouvent dans des pays avec un très faible taux d’imposition, voire un taux d’imposition nul. Certains pays offrent une formidable terre d’accueil à la propriété intellectuelle de ces sociétés en imposant très faiblement les produits tirés de sa concession. De quoi rayonner partout dans le monde sans craindre les administrations fiscales. Ainsi délestés de toute contrainte liée à une nécessaire présence physique, les flux ont été organisés de telle sorte que chaque type de revenu soit perçu dans l’État qui l’imposait le moins possible avec des montages d’une simplicité souvent redoutable.

Cet amendement vise donc à la création d’une taxe visant à contrer les schémas de détournement des bénéfices, en créant un impôt nouveau, sui generis. Ce dernier serait hors du champ de l’impôt sur les sociétés. Cette subtilité permettrait de sortir cette taxe nouvelle du champ des conventions fiscales. L’objectif est clair : dissuader n’importe quel contribuable d’user de montages juridiques et fiscaux agressifs qui ne correspondent pas à la logique économique mais ont pour objectif d’obtenir un avantage fiscal en France.

Cette solution présente l’avantage de s’appliquer à toutes les entreprises, « physiques » comme « numériques », sans distinction de secteur d’activité, et sans risque de distorsion économique.

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