Publié le 6 mai 2019 par : M. Giraud.
Retiré avant publication.
La directive 2014/23/UE sur l’attribution de contrats de concession a levé tout encadrement des marchés passés par les titulaires de contrats de concessions dans le cadre de l’exécution de ces contrats. En France, la question de la concurrence sur le marché aval des travaux s’est posée en raison de l’appartenance de certaines sociétés d’autoroutes à des groupes de travaux publics. Le Parlement a donc souhaité encadrer spécifiquement ces marchés mais le texte de loi n’a pas limité le domaine d’application de cet encadrement. Conformément à la directive 2014/23/UE, le périmètre d’application de l’encadrement des marchés devrait spécifiquement être adapté à l’enjeu particulier l’ayant motivé, les autres contrats passés par les sociétés d’autoroutes ne présentant aucune particularité par rapport à ceux passés par d’autres délégataires, la situation actuelle est donc constitutive d’une rupture d’égalité devant la loi.
Dans le cas concret des sociétés d’autoroutes, lors de l’analyse de leurs achats et des secteurs où interviennent les entreprises qui leur sont liées, le constat évident est que le seul type d’achats qui puisse éventuellement poser problème est celui des achats de travaux à des entreprises liées. D’une part, les sociétés d’autoroutes ne sont pas des acheteurs importants de fournitures et services, et certainement pas au point de peser sur les marchés (au sens économique du terme) sur lesquelles elles achètent des fournitures et services. Les entreprises qui leur sont liées ne sont d’ailleurs pas présentes sur ces marchés, et n’y disposent à coup sûr pas de position importante. Il convient donc d’exclure de tout encadrement spécifique les achats de fournitures et services des sociétés d’autoroutes. Il est d’ailleurs intéressant de noter l’analyse de la Commission Européenne qui a examiné récemment un cas similaire à la situation française et qui va plus loin en considérant que même l’attribution des marchés de travaux n’a pas à être encadrée : la prise contrôle du groupe espagnol Abertis, acteur mondial des concessions d’autoroutes, par le groupe italien Atlantia et le leader espagnol du secteur BTP, le groupe ACS. À cette occasion, la Commission Européenne a eu l’occasion de se poser la question de l’éventuel impact de cette prise de contrôle sur les marchés de travaux passés par les concessions du groupe Abertis. Dans sa décision M.8894 du 6 juillet 2018, la Commission a estimé que «compte tenu de tous les éléments de preuve dont elle dispose, la Commission conclut qu’il est peu probable que les parties adoptent une stratégie de verrouillage de la clientèle après la transaction afin d’exclure les tiers fournisseurs de services de construction ».
L’ARAFER elle-même s’est d’ailleurs interrogée sur l’opportunité d’encadrer les achats des sociétés d’autoroutes en matière de fournitures et services, justement dans le cadre de ses réflexions sur la notion de « marchés passés pour les besoins de la concession ». Elle écrit en effet, à propos de cette notion dans son « Rapport annuel sur les marchés et contrats passés par les sociétés concessionnaires d’autoroutes - Exercice 2016 » : «Pour autant, les enjeux concurrentiels portent essentiellement sur les prestations de travaux, secteurs sur lesquels des entreprises liées sont susceptibles de candidater, et de manière beaucoup plus marginale sur les prestations de fournitures. » Recentrer l’activité de l’ARAFER sur les marchés de travaux permettrait d’affecter les moyens alloués à l’Autorité aux seuls contrats pour lesquels le législateur a souhaité mettre en œuvre un contrôle particulier.
La mission d’information commune de l’Assemblée Nationale sur l’évaluation de la loi n° 2015‑990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite « loi Macron » a également recommandé, dans sa proposition n°8, de « restreindre le champ des marchés pour lesquels la procédure de passation des marchés s’applique, afin d’exclure ceux ne présentant pas de risques de conflits d’intérêts. » Cet amendement permet l’atteinte de cet objectif.
Enfin, la suppression de l’encadrement des achats de fournitures et de services par les sociétés concessionnaires d’autoroutes, notamment s’agissant des marchés d’études et de maîtrise d’œuvre, permettrait de gagner un temps précieux sur le planning de réalisation des opérations d’investissements, déjà fortement contraint par un grand nombre de procédures administratives préalable, et, ainsi, d’accélérer la mise en service d’aménagements ou d’ouvrages nécessaires aux usagers de l’autoroute.
Un amendement en ce sens a été présenté au Sénat lors de l’examen de la loi d’orientation des mobilités en séance plénière le 28 mars dernier. La Ministre auprès du Ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire, chargée des Transports a alors indiqué « l’amendement va trop loin », considérant notamment que les marchés de maîtrise d’œuvre « doivent rester contrôlés par l’Arafer » ; l’amendement en question a alors été retiré.
Le présent amendement reprend donc l’amendement proposé au Sénat, en l’adaptant à la position exprimée par le Gouvernement.
Pour atteindre l’objectif d’une meilleure régulation, la proposition comporte des modifications des articles L. 122‑12, L. 122‑13, L. 122‑16, L. 122‑17, et L. 122‑20 de la section 4 du code la voirie routière.
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