Publié le 11 juin 2019 par : M. Ciotti.
Le I de l’article 15‑4 du code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° Après le mot : « procédures », la fin du troisième alinéa est ainsi rédigée : « portant sur un crime ou un délit. » ;
2° Les 1° et 2° sont abrogés.
La loi du 28 février 2017 relative à la sécurité publique a élargi les conditions dans lesquelles les agents intervenant dans le cadre d’une procédure judiciaire peuvent protéger leur identité et faire mention, en lieu et place de leurs nom et prénom, d’un numéro d’immatriculation, de leur qualité et de leur service ou unité d’affectation. Initialement réservée aux agents affectés dans les services de police judiciaire spécialement chargés de la lutte contre le terrorisme (article 706‑24 du code de procédure pénale), cette faculté a été étendue aux procédures portant sur un crime ou un délit puni d’au moins trois ans d’emprisonnement ainsi qu’à celles portant sur un délit puni de moins de trois ans d’emprisonnement «lorsqu’en raison de circonstances particulières dans la commission des faits ou de la personnalité des personnes mises en cause, la révélation de l’identité de l’agent est susceptible de mettre en danger sa vie ou son intégrité physique ou celles de ses proches » (article 15‑4 du même code).
La loi du 23 mars 2019 de programmation et de réforme pour la justice a modifié à la marge ce régime en permettant la protection de l’identité des agents de police et de gendarmerie non seulement dans les actes de procédure qu’ils établissent mais aussi sur ceux dans desquels ils interviennent. Elle a également autorisé officiers et agents de police judiciaire à s’identifier, dans les procès-verbaux de dépôts de plaintes, par leur numéro d’immatriculation administrative.
Le présent amendement vise à aller plus loin afin de renforcer la protection que nous devons garantir aux agents de la gendarmerie et de la police nationales en étendant cette faculté à toutes les procédures portant sur un crime ou un délit, quelle que soit la peine d’emprisonnement encourue et sans considération des circonstances particulières de la procédure en cause. En effet, ces circonstances ne sont pas toujours aisées à établir et il existe une porosité croissante entre les procédures pénales justifiant la protection de l’identité de ces agents, la délinquance la plus dangereuse s'inscrivant dans un continuum de faits répréhensibles susceptible d'évoluer rapidement.
L’élargissement proposée de ce dispositif demeurerait conforme aux exigences constitutionnelles et conventionnelles applicables en matière de respect des droits de la défense et de droit à un procès équitable :
- sa mise en œuvre demeurerait conditionée à la délivrance préalable d'une autorisation nominative fondée sur la nature des missions exercées par l’agent, comme l’exige la CEDH, en étant réservé au cas où la révélation de l’identité de l’agent est «susceptible, compte tenu des conditions d’exercice de sa mission ou de la nature des faits qu’il est habituellement amené à constater, de mettre en danger sa vie ou son intégrité physique ou celle de ses proches » ;
- ce dispositif ne serait pas applicable lorsque l’agent bénéficiant d’une autorisation serait entendu en audition libre ou en garde à vue à raison d’un acte commis dans l’exercice de ses fonctions ou ferait l’objet d’une procédure pénale ;
- les juridictions d’instruction et de jugement auraient toujours accès aux nom et prénom de l’agent et pourraient, sous certaines conditions, donner accès à ces informations à une partie qui le demande.
Votre rapporteur rappelle qu'il n’est pas ici question de permettre l’anonymat des forces de police et de gendarmerie dans leurs actes d’enquête ni d’empêcher que les enquêteurs soient identifiés ou identifiables. Au contraire, leur identification, à travers d’autres éléments que leurs nom et prénom, est conservée et leur identification nominative demeure possible sur décision judiciaire.
Un dispositif aussi large existe d’ailleurs dans d’autres pays, comme l’Espagne.
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