Bioéthique — Texte n° 2187

Amendement N° CSBIOETH2053 (Retiré)

Publié le 11 septembre 2019 par : Mme Romeiro Dias.

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia 

I. – Le premier alinéa de l’article 16‑3 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée : « Sont dépourvus de nécessité médicale et interdits les actes de conformation sexuée visant à modifier les caractéristiques sexuelles primaires et secondaires d’une personne, sauf en cas d’urgence vitale ou de consentement personnellement exprimé par cette dernière, même mineure. »

II. – Après l’article L. 1111‑4 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 1111‑4‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 1111‑4-1. – Sauf urgence vitale, aucun traitement ou acte médical de conformation sexuée visant à altérer les caractéristiques sexuelles primaires ou secondaires d’une personne ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de celle-ci et sans qu’ait été préalablement consultée l’équipe pluridisciplinaire d’un établissement de santé figurant sur la liste mentionnée à l’article L. 1151‑1 du présent code. Ce consentement doit être exprimé personnellement et, lorsqu’il émane d’un mineur ou d’un majeur sous tutelle, doit être vérifié par le juge dans les conditions prévues par décret. »

Exposé sommaire :

Le présent amendement vise à clarifier la notion de nécessité médicale susceptible de justifier une atteinte à l’intégrité du corps humain en application de l’article 16‑3 du code civil, afin de préciser que, sauf urgence vitale, les traitements et actes médicaux de conformation sexuée n’en relèvent pas. L’amendement vise égalemment à ajouter un nouvel article au code de santé publique pour compléter la clarification faite au code civil. Il vise à encadrer la pratique des traitements et actes médicaux de conformation sexuée lorsqu’aucune urgence vitale n’est constatée.

Ces traitements et actes médicaux visent à conformer aux catégories juridiques, sociales et médicales les personnes – et le plus souvent des enfants de moins de trois ans – qui naissent avec des caractères sexuels qui ne correspondent pas aux définitions traditionnelles du sexe masculin ou du sexe féminin.

Ces traitements et actes médicaux peuvent, dans certains cas, être justifiés par une nécessité médicale Cependant, le plus souvent, ces traitements et actes médicaux – qui peuvent être lourds et causer de graves préjudices physiques et psychologiques irréversibles (cicatrices très marquées, diminution voire perte totale des sensations sexuelles, arrêt de la production d’hormones naturelles, dépendance aux médicaments, etc.) – ne répondent à aucune nécessité médicale. Comme l’a souligné le Conseil d’État, dans son rapport sur la révision de la loi de bioéthique, « les actes de conformation sexuelle justifiés par de tels motifs « psychologiques » visent à éviter à l’enfant une souffrance non directement liée à la lésion qu’il présente, c’est-à-dire à la variation du développement génital, mais au regard que la société, dans laquelle prévaut la binarité des sexes, porte sur cette lésion » (juin 2018, pp. 134‑135).

Conformément aux préconisations concordantes du Conseil d’État, de la mission d’information sur la révision de la loi relative à la bioéthique et de nombreux acteurs associatifs, le présent amendement vise en conséquence à clarifier l’interprétation qui doit être faite de la notion de nécessité médicale figurant à l’article 16‑3 du code civil de façon à en exclure les traitements et actes médicaux de conformation sexuée qui ne répondraient pas à des motifs médicaux très sérieux, c’est-à-dire à un motif d’urgence vitale. La possibilité pour les personnes transgenres d’accéder aux soins visant à altérer leurs fonctions sexuelles lorsqu’elles y consentent et en expriment le vœu est maintenue.

En outre, le présent amendement vise à ajouter au code de santé publique un article L1111- 4‑1 qui vient compléter la dispositon créée au code civil.

Dans son avis relatif au respect des droits des personnes intersexes, le Défenseur des droits a recommandé « que les enfants qui présentent une variation du développement sexuel à la naissance soient bien systématiquement orientés vers [un] centre de référence » des maladies rares du développement génital (avis n° 17‑04 du 20 février 2017, p. 16). Cette préconisation est également celle du Conseil d’État qui, dans son rapport sur la révision de la loi de bioéthique, jugeait que « les traitements les plus intrusifs, s’ils sont envisagés, pourraient être réservés, sur le fondement de l’article L. 1151‑1 du code de la santé publique, à certains établissements de santé disposant d’une expertise suffisante et pluridisciplinaire, à l’instar des centres constitutifs de référence des maladies rares (CRMR) du développement génital. Le rapport du Défenseur des droits relatif au respect des droits des personnes intersexes ainsi que les missions d’information de l’Assemblée nationale et du Sénat qui se sont penchées sur la question des persnnes intersexes se sont également prononcées en ce sens.

En conséquence, le présent amendement propose que tout traitement ou acte médical visant à altérer les caractéristiques sexuelles primaires ou secondaires d’une personne ne pourra être pratiqué qu’après consultation préalable de l’équipe pluridisciplinaire d’un centre de référence des maladies rares du développement génital.

Par ailleurs, en complément des dispositions de l’article L. 1111‑4 du même code qui prévoient déjà qu’« aucun acte médical ni aucun traitement ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne », que « ce consentement peut être retiré à tout moment » et que « le consentement du mineur ou du majeur sous tutelle doit être systématiquement recherché s’il est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision », le présent amendement rappelle que, sauf urgence vitale, tout traitement ou acte médical de conformation sexuée ne peut être pratiqué sans le consentement libre et éclairé de la personne concernée qui devra l’exprimer personnellement, y compris si elle est mineure. Dans ce cas, il reviendra à l’équipe pluridisciplinaire du centre de référence des maladies rares du développement génital qui aura été consulté d’apprécier si le mineur est apte à exprimer sa volonté et à participer à la décision.

La protection des personnes mineures impose enfin qu’aucune intervention mutilante et irréversible ne puisse être réalisée sur leur corps sans leur consentement. Pour ce faire, plutôt que confier à la seule équipe pluridisciplinaire la vérification de ce consentement, il apparaît utile de permettre au juge de le faire. Cette procédure est celle qui existe pour certains prélèvements d’organes sur les personnes vivantes qui, par la loi, imposent au président du tribunal de grande instance de vérifier le consentement de la personne. Si les personnes majeures peuvent bénéficier de la protection du juge dans un tel cas, il semble d’autant plus nécessaire de l’offrir aux personnes mineures au regard des conséquences de tels actes.

Cet modification du code de santé publique permet donc la préservation d’un équilibre entre les actes nécessaires pour la survie des personnes, ceux qui sont souhaités par l’individu lui-même et l’interdiction de toute autre atteinte au corps.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.