Publié le 23 novembre 2019 par : M. Descrozaille.
Supprimer cet article.
Cet amendement tend à supprimer l’article 5 B du présent projet de loi, qui a été introduit au Sénat contre l’avis du Gouvernement et celui de la rapporteure. Cet article oblige les commerçants proposant des denrées alimentaires dans les halles et marchés ou lors de ventes au déballage à faire don de leurs invendus à une ou plusieurs associations caritatives. Le non-respect de cette obligation serait puni de l’amende prévue pour les contraventions de la troisième classe (68 euros, majorée à 180 euros en cas de retard de paiement).
Plusieurs raisons s’opposent au maintien de l’article 5 B dans le projet de loi.
D’abord contrairement à l’idée (répandue) selon laquelle les marchés seraient responsables de 5 % du gaspillage alimentaire en France, comme l’a avancé notre collègue sénatrice Mme GUIDEZ, auteure de l’amendement à l’origine de cet article, le pourcentage des pertes alimentaires, en particulier dans la filière des fruits et légumes, n’est en réalité « que » de 2,8 % au stade de la vente au détail, dont 1,32 % pour les Primeurs. C’est ce qui ressort d’une étude réalisée en collaboration avec l’INRA pour Interfel, l’interprofession des fruits et légumes, et France Agrimer.
En d’autres termes, il y aurait peu d’invendus à proposer aux associations caritatives. Il y en aurait d’autant moins que les denrées alimentaires données ne doivent pas être impropres à la consommation humaine. Or, peu de denrées sont emballées dans les halles et marchés et peuvent donc facilement entrer en contact les unes avec les autres lors du transport ou sur le lieu de stockage, la viande ou le poisson avec les fruits et légumes par exemple. Il faut souligner que les associations sont soumises aux mêmes règles d’hygiène que les commerçants car il est essentiel que les denrées soient conservées dans des conditions équivalentes.
Par conséquent, les opérations de récupération des invendus dans les halles et marchés seraient peut intéressantes du point de vue quantitatif pour les associations.
De plus, il ne faut pas perdre de vue que dans les halles et marchés, et c’est encore plus vrai pour les ventes au déballage, les petits commerçants ne disposent pas des mêmes moyens logistiques que la grande distribution, en termes par exemple de reconditionnement des invendus ou de leur collecte.
En fait, comme l’a souligné le rapport d’évaluation de la loi GAROT, remis en juin 2019, le dispositif législatif actuel qui contraint tous les commerces de détail alimentaires de plus de 400 m² à signer une convention avec des associations est suffisant. Il estime qu’il serait contre-productif d’obliger tous les commerçants à établir de telles conventions d’aide alimentaire, d’autant que, dans certaines zones, les associations d’aide ne sont tout simplement pas en mesure de collecter les denrées alimentaires dans de bonnes conditions.
Enfin, il n’est pas raisonnable de vouloir ajouter des contraintes administratives supplémentaires aux commerçants travaillant dans les halles et marchés, en les obligeant à signer des conventions de dons alimentaires, alors qu’ils croulent déjà sous la paperasse. Le modèle de convention prévue pour la grande distribution ne compte pas moins de 31 pages !
C’est pourquoi il convient de laisser s’épanouir les solutions qui se mettent en place dans certains marchés où, sur la base du volontariat, s’organise la collecte des invendus alimentaires. De nombreux petits commerçants ont une conscience environnementale et la volonté de lutter contre le gaspillage alimentaire. Aidés par les services municipaux, qui prévoient des zones de collecte, et quelques associations locales, ils parviennent à venir en aide aux plus démunis dans de bonnes conditions de collecte de leurs invendus.
Privilégions les solutions souples au lieu d’imposer un cadre législatif rigide et finalement peu opérationnel.
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