Publié le 3 octobre 2020 par : M. Di Filippo.
Cet amendement a été déclaré irrecevable après diffusion en application de l'article 98 du règlement de l'Assemblée nationale.
La crise provoquée par la pandémie de coronavirus a frappé de plein fouet nos entreprises.
Mais la situation très grave dans laquelle un nombre important d’entre elles se trouvent aujourd’hui ne résulte pas que de la conjoncture : nos entreprises souffrent depuis longtemps d’une fiscalité trop lourde, notamment en ce qui concerne les impôts et les taxes de production, qui pèsent fortement sur leur compétitivité et leur productivité.
La fiscalité de production française est deux fois plus élevée que la moyenne des pays européens et sept fois plus qu’en Allemagne. Ces impôts représentent un total de 109 milliards d’euros en France, dont 75 milliards payés par les entreprises, et pèsent 3,2% de notre PIB. Ils ont augmenté de 15 milliards d’euros entre 2011 et 2019 alors même que nos voisins européens les ont réduits sur cette période.
Cette anomalie de notre fiscalité était déjà identifiée avant la crise : le 10 octobre 2019, une étude du cabinet KPMG rendue publique démontrait que les résultats des entreprises françaises dans divers secteurs seraient deux à trois fois supérieur si les impôts de production étaient en France au niveau de l’Allemagne, de l’Italie ou des Pays-Bas.
Dans le cadre du Pacte productif, le gouvernement envisageait alors des pistes pour baisser les impôts de production: supprimer la dernière tranche de C3S (contribution sociale de solidarité des sociétés, et donner plus de la latitude aux régions concernant la CVAE.
Le 15 octobre, la secrétaire d’État à l’Économie, Agnès Pannier-Runacher, déclarait : « La première chose à laquelle on travaille, c’est d’essayer de diminuer l’impôt de production qui est le plus distorsif, c’est la C3S [contribution sociale de solidarité des sociétés ». « C’est un impôt qui est sur le chiffre d’affaires, vous le payez plusieurs fois » et il est « extrêmement dangereux pour l’économie ».
Le rapport du Conseil d’Analyse Économique datée de juin 2019 indiquait également que la suppression de la C3S « dont la nocivité n’a pas d’égal dans notre système fiscal » constituait la priorité. Selon le communiqué de presse relatif à la présentation de ce rapport, « la C3S produit des effets de ‘cascade’ qui se transmettent et s’amplifient sur toute la chaîne de production parce qu’à chaque étape de production la taxe elle-même est taxée (…) La C3S réduit la productivité, agit comme un impôt sur les exportations et une subvention aux importations de biens intermédiaires et aggraverait le déficit de notre balance commerciale de manière non négligeable ».
Pourtant, si, dans le cadre de son plan de relance, le gouvernement a annoncé la réduction de certains impôts de production, il a avant tout choisi de réduire la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) de moitié. Or la CVAE est une taxe sur la valeur ajoutée, un instrument qui ne produit donc pas de distorsion entre le coût du capital et celui du travail. Avec cette décision, le gouvernement veut afficher une sorte d’industrialisme, puisque la baisse de la CVAE va surtout bénéficier aux industries manufacturières.
Ce choix de baisse des impôts de production, en plus d'être moins efficace, pénalise les collectivités locales. En effet, la CVAE rapporte chaque année près de 19 milliards d'euros aux collectivités locales, et leur permet de préserver leur autonomie fiscale. Si la suppression de la part de la CVAE qui revient aux régions, dont le montant s’élève à 7,25 milliards d'euros, sera compensée par le versement d'une fraction de la TVA, les communes et les intercommunalités ignorent encore comment elles vont être indemnisées de la perte de recettes induite par la baisse des impôts fonciers des établissements industriels.
Supprimer la C3S, qui s’avère contreproductive, antiéconomique, nocive pour nos entreprises et pour les emplois sur nos territoires, aurait été un choix bien plus pertinent.
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