Publié le 10 novembre 2020 par : M. Orphelin.
I. - Les redevables de l’impôt sur les sociétés prévu à l’article 205 du code général des impôts qui réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 1 milliard d’euros sont assujettis à une contribution sur leurs bénéfices exceptionnels perçus au cours de l’année 2020.
Cette contribution exceptionnelle est égale à 50 % du bénéfice exceptionnel réalisé, déterminé avant imputation des réductions et crédits d’impôt et des créances fiscales de toute nature.
Les réductions et crédits d’impôt et les créances fiscales de toute nature ne sont pas imputables sur la contribution sur les bénéfices exceptionnels. La contribution sur les bénéfices exceptionnels n’est pas admise dans les charges déductibles pour l’établissement de l’impôt sur les sociétés.
II. Le bénéfice exceptionnel auquel il est fait référence aux deux premiers alinéas du I. correspond au bénéfice net au sens de l’article 39 du code général des impôts, déterminé avant imputation des réductions et crédits d’impôt et des créances fiscales de toute nature, retranché d’un bénéfice normal correspondant à la moyenne des bénéfices imposés au titre de l’impôt sur les sociétés pour les exercices 2017, 2018 et 2019.
Pour les personnes morales n’ayant pas été redevables de l’impôt sur les sociétés pour l’exercice 2017, le bénéfice normal correspond à la moyenne des bénéfices imposés au titre de l’impôt sur les sociétés pour les exercices 2018 et 2019. Pour les sociétés n’ayant pas été redevables pour l’exercice 2018 ou pour l’exercice 2019, le bénéfice normal est calculé à partir d’une valeur de référence correspondant à 8 % du capital social de la société.
III. - Pour les redevables qui sont placés sous le régime prévu aux articles 223 A ou 223 Abis du code général des impôts, la contribution sur les bénéfices exceptionnels est due par la société mère. Cette contribution est assise sur l’impôt sur les sociétés afférent au résultat d’ensemble et à la plus-value nette d’ensemble définis aux articles 223 B, 223 Bbis et 223 D du même code, déterminé avant imputation des réductions et crédits d’impôt et des créances fiscales de toute nature.
Le chiffre d’affaires mentionné au premier alinéa du I s’entend du chiffre d’affaires réalisé par le redevable au cours de l’exercice ou de la période d’imposition pour la société mère d’un groupe mentionné aux articles 223 A ou 223 Abis du code général des impôts, de la somme des chiffres d’affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.
IV. - Les redevables peuvent obtenir un crédit d’impôt égal à leur contribution sur les bénéfices exceptionnels s’ils font la preuve, par tous moyens à leurs disposition, que ces bénéfices exceptionnels sont sans lien, direct ou indirect, avec l’épidémie du covid-19 ou avec les mesures générales ou particulières prises par la puissance publique pour faire face à celles-ci.
V. - Pour les redevables qui sont placés sous le régime prévu aux articles 223 A ou 223 Abis du code général des impôts, la contribution sur les bénéfices exceptionnels est due par la société mère. Cette contribution est assise sur l’impôt sur les sociétés afférent au résultat d’ensemble et à la plus-value nette d’ensemble définis aux articles 223 B, 223 Bbis et 223 D du même code, déterminé avant imputation des réductions et crédits d’impôt et des créances fiscales de toute nature.
Le chiffre d’affaires mentionné aux I et II s’entend du chiffre d’affaires réalisé par le redevable au cours de l’exercice ou de la période d’imposition, ramené à douze mois le cas échéant et, pour la société mère d’un groupe mentionné aux articles 223 A ou 223 Abis du code général des impôts, de la somme des chiffres d’affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe.
VI. - La contribution exceptionnelle et la contribution additionnelle sont établies, contrôlées et recouvrées comme l’impôt sur les sociétés et sous les mêmes garanties et sanctions. Les réclamations sont présentées, instruites et jugées selon les règles applicables à ce même impôt.
VII. - Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1er décembre 2021, un rapport exposant, pour les sociétés et groupes de sociétés, les effets par secteur de la mise en oeuvre de la contribution sur les bénéfices exceptionnels.
Cet amendement vise à créer une contribution de solidarité nationale de 50 % sur les seuls bénéfices exceptionnels réalisés par les plus grandes entreprises (plus de 1 Md€ de chiffre d’affaire) du fait de la crise du Covid-19. Les bénéfices exceptionnels sont calculés en comparaison de la moyenne des bénéfices réalisés dans les trois dernières années ou, à défaut, d’un taux de rendement de référence du capital.
Même si certaines multinationales parviennent à échapper à l’impôt sur les sociétés grâce à des dispositifs financiers complexes, le caractère rétroactif de cet amendement provoque un « effet de surprise » qui limite leur capacité à organiser un évitement fiscal.
Cet amendement s’inspire de la « Taxe Briand » mise en place en 1916 pour faire contribuer les entreprises bénéficiaires de l’effet d’aubaine généré par la guerre sur certains secteurs d’activité. En effet, la crise de la Covid-19 inflige certes de lourdes difficultés économiques à de très nombreuses entreprises, mais certains secteurs d’activité sortent « gagnants » car il jouissent d’un d’effet d’aubaine que l’on peut juger inéquitable. En taxant 50 % des bénéfices exceptionnels, cet amendement propose de corriger l’injustice économique dont sont victimes les secteurs les plus touchés par la crise.
Un tel dispositif avait également été mis en place en 1917 aux États-Unis, où un taux progressifs de 20 à 60 % avait été appliqué sur les bénéfices de toutes les entreprises dépassant les gains d’avant-guerre. En 1918, tous les bénéfices réalisés par les sociétés au-delà d’un taux de rendement de 8 % sur leur capital étaient considérés comme anormaux, et les bénéfices anormaux étaient imposés à des taux progressifs allant jusqu’à 80 %. Des impôts similaires sur les bénéfices excessifs ont été appliqués pendant la Seconde Guerre mondiale et la guerre de Corée.
En 1981, Margaret Thacher taxère les entreprises pétrolières dont les bénéfices avaient augmenté considérablement du fait de la hause du prix du pétrole. En 1997, Gordon Brown a levé 5,2 Md£ en imposant les bénéfices exceptionnels des entreprises de services publics privatisées qui, selon lui, avaient été vendues à bien trop bas prix. En 2010, Alastair Darling a levé 3,4 Md£ en imposant 50 % des bonus des banquiers de plus de 25 000 livres sterling.
En 2020, Emmanuel Saez et Gabriel Zucman conseillèrent au Gouvernement américain de mettre en place une taxe sur les bénéfices exceptionnels liés à la crise de la Covid-19.
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