Respect des principes de la république — Texte n° 3649

Amendement N° CSPRINCREP1216 (Retiré)

Publié le 14 janvier 2021 par : Mme Do.

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L’article L. 131‑5 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Le huitième alinéa est ainsi rédigé :

« Lorsque le ressort des écoles publiques a été déterminé conformément aux dispositions de l’article L. 212‑7, l’inscription des élèves, dans les écoles publiques ou privées, se fait sur présentation d’un certificat d’inscription sur la liste scolaire prévue à l’article L. 131‑6. Ce certificat est délivré par le maire, qui y indique l’école que l’enfant doit fréquenter. En cas de refus d’inscription de la part du maire, l’autorité de l’État compétente en matière d’éducation peut autoriser l’accueil provisoire de l’élève et solliciter l’intervention du préfet qui, conformément à l’article L. 2122‑34 du code général des collectivités territoriales, est habilité à procéder à une inscription définitive. » ;

2° Après le huitième alinéa de l’article L. 131‑5, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La seule absence de justificatif de domiciliation de la famille sur le territoire de la commune n’autorise pas le maire à refuser l’inscription d’un enfant soumis à l’obligation scolaire. »

Exposé sommaire :

Cet amendement vise à lutter contre la déscolarisation des enfants et plus particulièrement des enfants Roms ou gitans, en bref, les enfants vivant dans des familles non sédentarisées.

Si nous voulons que l’obligation de scolarisation des enfants soit bien reçue par les parents, il nous semble essentiel d’assurer, réciproquement, qu’aucune entrave ne vienne limiter cette scolarisation de la part des pouvoirs publics locaux.

En effet, l’alinéa 1 de l’article L. 131‑6 du code de l‘éducation prévoit que : « chaque année, à la rentrée scolaire, le maire dresse la liste de tous les enfants résidants dans sa commune et qui sont soumis à l’obligation scolaire ». Ainsi, cet article a pu être interprété par certains maires comme une obligation, pour les parents souhaitant scolariser leurs enfants dans la commune, de la délivrance d’un justificatif de domicile. De plus, il découlerait alors de cette condition que dans le cas où la famille de l’enfant serait domiciliée administrativement dans une autre commune, et ce alors même que dans les faits cette famille vit bien effectivement sur le territoire de la commune, alors l’enfant ne pourrait pas être scolarisé dans la commune ou du moins le maire peut y apposer un refus.

Et ce, alors même que l’article L. 131‑5 du code de l’éducation peut sembler exhaustif sur la question. En effet, il est bien précisé que non seulement les familles domiciliées à proximité de deux ou plusieurs écoles publiques ont la faculté de faire inscrire leurs enfants à l’une ou l’autre de ces écoles, qu’elle soit ou non sur le territoire de leur commune, à moins qu’elle ne compte déjà le nombre maximum d’élèves autorisé par voie réglementaire. Il est également rappelé au sein de cet article que la domiciliation des parents à l’étranger, comme, le statut ou le mode d’habitat des familles installées sur le territoire de la commune, ne peuvent être des causes de refus d’inscription d’un enfant soumis à l’obligation scolaire.

Pourtant certains maires se sont cantonnés à une interprétation erronée de cet article, mais tous ont été déboutés par la justice administrative et judiciaire. En effet, dans un arrêt rendu le 19 juin 2019 (Cour d’appel de Versailles, 9e ch., 19 juin 2019, n° 18/01049), la cour d’appel de Versailles a retenu la faute personnelle de la maire de la commune de Sucy-en-Brie, en raison de son refus de scolariser des enfants issus de la communauté Rom. Dans cette affaire, dont les faits remontent à septembre 2014, une militante de l’association Romeurope s’était présentée à la mairie pour demander l’inscription de ses cinq enfants roms et s’était vu opposer, selon son témoignage : « un refus catégorique du cabinet du maire ».

De ce fait, la maire de Sucy-en-Brie, Marie-Carole Ciuntu a été condamnée au civil à verser, en sus de l’indemnisation des frais de procédure, un montant total de 5 000 euros de dommages et intérêts aux familles des cinq enfants pour préjudice moral. Plus précisément, la cour a argué que Madame Ciuntu, qui est aussi vice-présidente de la région Ile-de-France, chargée notamment des lycées : « n’a pas tenu compte de la jurisprudence et des circulaires recommandant de faciliter l’inscription des enfants d’origine rom même lorsque certains des documents justificatifs requis (font) défauts ». En cela, elle s’est montrée coupable de : « discrimination fondée sur l’appartenance d’enfants à la communauté rom », ce qui constitue une « faute civile », estime la cour.

En effet, des circulaires datant de 2012 sont venues rappeler que le droit à l’éducation doit être garanti de manière effective, même en cas d’absence de domiciliation.

Ainsi, la circulaire du 2 octobre 2012 relative à la scolarisation et à la scolarité des enfants issus de familles itinérantes et de voyageurs définit les orientations de scolarisation de ces enfants en précisant qu’ils ont droit : « à la scolarisation et à une scolarité dans les mêmes conditions que les autres ». De plus, elle précise également qu’en raison de la particulière vulnérabilité de ces populations, aucun justificatif de domicile ne doit être exigé pour scolariser les enfants. Enfin, une circulaire interministérielle du 26 août 2012 rappelle également aux maires leurs devoirs face à l’obligation de scolarisation et précise que, « en relation avec les maires et les associations, les services de l’Éducation nationale, plus particulièrement ceux chargés de la scolarisation des nouveaux arrivants et des enfants du voyage, conduiront les actions permettant de prendre en charge sans délai et avec un souci de continuité les enfants présents dans les campements ».

L’intérêt de cet amendement est donc de conforter et d’entériner, au niveau législatif, une disposition déjà actée par la jurisprudence. En effet, au vu de l’importante de cette lutte contre la déscolarisation, il semble essentiel de remonter au niveau législatif ces dispositions plus précises issues de circulaires qui, pour la plupart, ne sont que des actes unilatéraux, internes à l’administration et ne modifiant pas l’ordonnancement juridique.

Ainsi, malgré l’exhaustivité de l’article L. 131‑5 du code de l’éducation, au vu de son interprétation parfois erronée par les maires, il semble essentiel de préciser que la seule absence d’un justificatif de domicile ne peut pas être à l’origine d’une décision de refus de scolarisation. De plus, pour rendre ne plus précis l’alinéa 8 de cet article il semble opportun de rappeler que si le mode d’habitat des familles résulte d’une occupation illégale d’un terrain communal cette raison ne peut pas être argué pour interdire à un enfant d’être scolarisé. Rappelons l’objectif premier de cette loi est l’intérêt supérieur de l’enfant. Ainsi, il ne doit pas subir une double peine s’il vit déjà dans des conditions particulières en ne pouvant pas être inscrit à l’école.

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