Publié le 25 mars 2021 par : Mme Batho, Mme Bagarry, Mme Gaillot, M. Julien-Laferrière, M. Orphelin, M. Villani, Mme Chapelier.
Le chapitre Ier du titre II du livre V du code de la justice administrative est complété par un article L. 521‑5 ainsi rédigé :
« Art. L. 521‑5. – Le juge des référés, saisi d’une simple requête en ce sens après refus de communication, peut ordonner la communication d’informations environnementales au sens de la directive 2003/4 CE et de documents en contenant.
« Le second alinéa de l’article L. 342‑1 du code des relations entre le public et l’administration ne s’applique pas en pareil cas. »
Le présent amendement résulte d'une proposition de Greenpeace France et de France Nature Environnement.
Le droit consacre un large droit d'accès aux informations environnementales (qui sont définies de façon extensive par les dispositions L124-1 et suivantes du code de l'environnement). L'accès à l'information constitue une liberté fondamentale (CE 29 avril 2002 Ullmann n°228830) et la pierre angulaire de la démocratie environnementale. Il a une valeur constitutionnelle reconnue par la Charte de l'environnement (article 7). Ce droit bénéficie d'un régime juridique spécial depuis la loi du 26 octobre 2005 transposant la directive 2003/4/CE du 23 janvier 2003, c'est à dire plus favorable que le régime général d'accès aux documents administratifs (qui n'ont pas de nature "environnementale") prévu par la loi du 17 juillet 1978.
Aussi, par une décision du 3 avril 2020, le Conseil constitutionnel a expressément consacré un droit d’accès aux documents administratifs, garanti par l’article 15 de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen qui prévoit que "la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration".
Aux termes des articles L.124-1 et suivantes, toute personne a le droit à la communication de toute information quel qu’en soit le support, qu'elle ait été élaborée par ou pour le compte de l’État, des collectivités territoriales, de leurs groupements, les établissements publics et les entreprises chargées d'une mission de service public. La nature de ces informations est largement entendue: relatives à l'état des éléments de l'environnement (air, eau, sol), la sécurité d'une activité pouvant impacter l'environnement, la santé humaine et les informations économiques relatives à ces activités. Le droit d'accès à l'information est indispensable pour permettre l'exercice de la participation efficace du public aux décisions ayant un impact environnemental.
Or, en pratique, l'effectivité de ce droit d'accès n'est pas assurée pour plusieurs raisons :
- Ce droit à l’information se heurte trop souvent à une administration qui tarde à répondre, par manque de moyens ou de connaissance du sujet (les référents qui doivent être désignés au sein des administrations ne l’ont souvent jamais été), qui ne transfère pas la demande au bon interlocuteur ;
- Il n'existe pas de sanctions lorsque les débiteurs de l’information ne répondent pas ou refusent l'accès dans le délai d'un mois (R.124-1 du code de l'environnement) lorsque la demande est faite par courrier par une association au débiteur de l'information ;
- Ensuite, en cas de refus, la CADA peut être saisie. Mais l'avis de la Commission d'accès aux documents administratifs (Cada) n'a pas de valeur juridique obligatoire et il intervient dans des délais beaucoup trop longs pour garantir le droit d'accès à l'information ;
- Dans ces deux étapes : il n'y a pas de respect du contradictoire. En d'autres termes, les autorités ou entreprises qui refusent ces accès ne nous transmettent pas précisément les motifs de leurs refus. Elles peuvent refuser ces accès en arguant des secrets industriel ou défense par exemple. Une procédure en référé permettrait de pouvoir en débattre de façon plus précise car en l'état elles brandissent uniquement ces secrets sans justifier précisément en quoi ils sont violés.
- La seule procédure juridique possible pour essayer de contraindre les débiteurs de l'information est une procédure administrative au fond (qui n'est pas un référé, "en accéléré") devant un tribunal administratif qui met généralement deux ans à produire la décision, sachant que les débiteurs des informations font parfois traîner les délais dans ces procédures.
- En conséquence les chances d'obtenir ces informations sont très faibles en raison des obstacles et délais procéduraux bien connus des autorités ou entreprises qui refusent ces accès, les demandeurs d'accès aux informations pouvant obtenir les informations 5 ans après les faits en pratique, ce qui anéantit l'utilité du droit d'accès à l'information.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.