Publié le 2 avril 2021 par : M. Ravier.
L’article L. 1110‑5-2 du code de la santé publique est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Un médecin n’est jamais tenu de pratiquer une sédation profonde et continue jusqu’au décès qu’il considère comme une demande indirecte d’euthanasie ou de suicide assisté.
« Aucun infirmier ou infirmière, aucun auxiliaire médical, quel qu’il soit, n’est tenu de concourir à une sédation profonde et continue jusqu’au décès telle que décrite à l’alinéa précédent. »
Cet article introduit une grande ambiguïté dans l’utilisation de la sédation. Le but classique de la sédation préconisée par les recommandations de bonnes pratiques est jusqu’à aujourd’hui la diminution la perception de la douleur, souvent lors de détresse terminale, lorsque tout autre recours a montré ses limites. Le risque d’abréger la vie est accepté mais non recherché.
Cet article ajoute un élément qui rend plus confus le but poursuivi par la sédation. En effet, les objectifs de cette nouvelle forme de sédation sont « d’éviter toute souffrance » et « de ne pas prolonger inutilement sa vie ». « Eviter toute souffrance », c’est effectivement le but des soins palliatifs, objectif de la sédation utilisée jusqu’à aujourd’hui lors de détresses terminales. Mais « ne pas prolonger inutilement la vie » induit l’idée que l’utilité d’une vie intervient dans la décision médicale : cette expression rend confuse l’intentionnalité de la sédation, engendrant clairement un risque euthanasique.
De plus, l’obligation d’engager la sédation quand le patient demande l’arrêt d’un traitement qui le maintient en vie ouvre clairement la porte à des dérives. Compte tenu du flou de l’expression « maintien artificiel de la vie », des patients qui ne sont pas en fin de vie pourront provoquer leur mort dans un délai rapide, ce qui introduit une forme de suicide assisté dans notre législation.
Enfin, en donnant pour seule avancée face à la souffrance en fin de vie la banalisation de la sédation et l’altération de la vigilance du patient pour traiter sa douleur et son angoisse, cet article omet l’importance de la parole et de la relation pour le soulagement des patients.
Aussi, la liberté de conscience constituant un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, il est essentiel de prévoir, en l’espèce, une clause de conscience pour les professionnels de santé qui pourront ainsi refuser de pratiquer ou de concourir à une sédation profonde et continue jusqu’au décès qui, bien qu'autorisée par la loi, est contraire à leurs convictions personnelles et éthiques, la considérant comme une forme d’euthanasie ou de suicide assisté déguisée.
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