Publié le 11 novembre 2021 par : M. Blanchet.
L’article 1594 A du code général des impôts est complété par un II ainsi rédigé :
« II. – L’excédent des droits d’enregistrement mentionnés au 1° du I peut être provisionné par les départements à partir d’une moyenne triennale, dans la limite de 150 % de l’assiette annuelle de cette taxe.
« Cette mise en réserve s’effectue après délibération du conseil départemental et fait l’objet d’un rapport annuel. »
Certains départements se plaignent aujourd’hui que leur modèle financier serait fragilisé en raison, notamment, du renforcement de leur champ de compétence et du reflux de la fiscalité locale directe. La crise sanitaire a particulièrement obscurci leur horizon financier, en particulier dans l’hypothèse de la renationalisation du RSA et la reprise des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) en compensation, les montants financiers en jeu étant raisonnablement proches. Pourtant, l’effet de ciseau est bien entre RSA et taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE), et non entre RSA et DMTO. La conservation des DMTO dans le panier de recettes des départements apparait donc indispensable.
Afin de financer leurs dépenses sociales, la réforme fiscale pourrait être l’occasion de relever le plafond des DMTO de 0,2%, mais cette proposition se heurte malgré tout au rejet de nouveaux prélèvements d’impôts, tant par l’Etat que par les contribuables.
En absence d’une refonte de la fiscalité locale, cet amendement permet aux départements de se constituer une réserve pouvant faciliter leur autonomie financière. Deuxième ressource de fonctionnement des départements, ces « Droits de mutation à titre onéreux » (DMTO) ont un caractère volatile. Dans le Calvados, par exemple, elles ont pu perdre 26M€ d’euros entre janvier 2008 et janvier 2010, puis reprendre 42M€ entre janvier 2010 et mars 2012. Sans aller jusqu’à un placement, il s’agirait d’ouvrir un « droit à épargner », limité à 150% de l’assiette en préservant les libertés locales dans ce qu’en feront les départements.
Certains départements ont pu constituer des provisions par le passé en prévision de l’augmentation des allocations individuelles de solidarités, mais l’Etat a rappelé qu’elles étaient illégales. La crise sanitaire doit pourtant être l’opportunité de trouver une solution pour répondre à la flexibilité budgétaire dont les départements ont besoin pour financer les besoins sociaux : c’est en période favorable qu’on doit se prémunir des crises à venir. La volatilité de la recette des DMTO est donc un argument en faveur de telles provisions, quand la situation actuelle incite paradoxalement à la dépense à court-terme alors que les effets de la crise sociale se feront sentir dans les années à venir.
Pourtant, les provisions pour risques et charges n’ont pas vocation à servir des objectifs budgétaires sans qu’il n’y ait un événement précis justifiant cette provision, comme l’a rappelé l’Etat suite à la provision de 30 millions d’euros par le département de l’Oise en 2010. L’épidémie de covid-19 et la crise sanitaire totalement imprévue qu’elle a provoquée plaident toutefois aujourd’hui pour la mise en place de réserves qui sortent de cette logique de flux et permettent de faire face avec plus de souplesse à ce type de catastrophe.
Il s’agirait donc d’étendre au département l’utilisation du mécanisme de mise en réserve déjà pratiqué au niveau interdépartemental par le CFL pour gérer la répartition du FP DMTO. Ainsi, l’excédent de recette de DMTO constaté lors du compte administratif pourrait être mis en réserve par le vote d’une dépense de fonctionnement à partir d’une imputation comptable à créer (compte 68 par exemple) et faisant l’objet chez le payeur d’une écriture semblable à celle passée pour les provisions semi-budgétaires ; l’argent restant disponible à la Banque de France. Un cadre conditionnant la mise en réserve de ces excédents (comparaison à une moyenne triennale et limite haute) est ainsi judicieusement proposé par le présent amendement.
La crise due à l’épidémie de covid-19 a permis de tisser de réel liens de confiance entre les acteurs de terrains que sont les maires, les préfets et les départements et liens avec les régions. Ces derniers seraient davantage en mesure de soutenir la relance de l’économie et de se montrer plus résilients s’ils pouvaient constituer une telle réserve qui permettrait de sécuriser le financement de leur projets complexes, notamment pluriannuels.
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