Publié le 18 novembre 2021 par : M. Bazin, M. Door.
Rédiger ainsi l’alinéa 5 :
« 1° Réaliser une mesure de l’acuité visuelle avec réfraction ; en cas d’urgence suite à une perte ou de bris des verres correcteurs d’amétropie et en l’absence de solution médicale adaptée, l’orthoptiste peut exceptionnellement prescrire sans ordonnance médicale un nouvel équipement. »
L’article 40 initial en donnant le droit à des orthoptistes de niveau licence de faire des diagnostics et de prescrire des équipements optiques soulève des questions importantes sur la qualité des soins délivrés et la sécurité sanitaire des patients, puisque ces modalités ne font pas partie des référentiels d’activités, de compétences et de formation des orthoptistes. L’article 40 propose une évolution majeure du système de santé, voire une rupture totale avec la philosophie de délégation de tâches qui a conduit à l’amélioration en cours des délais de RDV en ophtalmologie. Il s’agirait d’un véritable transfert de soins médicaux avec prise en charge en autonomie des patients par les orthoptistes, auxiliaires de santé de niveau licence (après seulement 3 années d’étude), qui auraient ainsi droit de prescription (lunettes, lentilles de contact) sans passage et contrôle par l’ophtalmologiste après avoir réalisé un bilan visuel au contour non défini aujourd’hui.
Or la formation actuelle des orthoptistes, spécialistes de la rééducation orthoptique ou travaillant comme aide-ophtalmologiste est déjà difficile à réaliser en trois ans. Les orthoptistes n’ont pas une formation suffisante pour assurer un examen médical complet ou une adaptation de lentilles de contact en responsabilité. Ce degré d’autonomie relèverait au minimum d’une pratique avancée encadrée et avec une formation adéquate. 93 % des ophtalmologistes pensent (enquête 29 septembre-4 octobre 2021 auprès de 2000 ophtalmologistes) que ce dispositif conduirait à des retards de diagnostics et à l’augmentation de la gravité de pathologies ophtalmologiques silencieuses initialement (comme le glaucome, la DMLA, le kératocône, la rétinopathie diabétique, …)
De plus, les soins orthoptiques risqueraient de ne plus être assurés, par manque d’orthoptistes se consacrant à cette activité, ce qui est déjà le cas dans de nombreux territoires.
Par ailleurs, le rapport IGAS-IGESR de 2020 sur la filière visuelle ne demandait d’envisager cette mesure qu’en cas d’échec des autres recommandations qu’il préconisait et en l’absence de baisse substantielle des délais de RDV. Les autres recommandations n’ont pas encore été mises en application et l’amélioration des délais de RDV est déjà là. Ainsi, une enquête réalisée par l’institut CSA Research en septembre 2021 montre que les délais de RDV pour une consultation de contrôle non urgente ont baissé de 60 % depuis 2017 (médiane passant de 66 jours dans l’étude de la Drees à 26 jours en 4 ans dans l’étude CSA). Quatre autres études (CSA Research et Guide Santé) ont confirmé cette baisse continue des délais de RDV depuis plusieurs années, avec une méthodologie similaire. Parallèlement, les indicateurs de prise en charge des patients : distribution de lunettes, dépistage du glaucome, opération de la cataracte, prise en charge de la DMLA compliquée, se sont tous améliorés et de façon plus rapide que dans la plupart des autres pays européens, dont l’Allemagne et le Royaume-Uni. Il convient donc de ne pas remettre en cause ce qui fonctionne et au contraire de l’amplifier.
Cela permet de prendre du recul et de recentrer l’accès direct des orthoptistes sur les 3 situations proposées par cet amendement :
- le dépistage des amétropies
- la prescription de verres correcteurs en cas d’urgence avérée, rejoignant ainsi le dispositif dérogatoire déjà ouvert aux opticiens depuis 2016.
- Le dépistage visuel des enfants en incitant à un accès direct aux orthoptistes pour les jeunes enfants pour la réalisation du dépistage de l’amblyopie du nourrisson et des troubles de la réfraction.
Ces mesures amèneront une plus-value pour la Santé Publique et complètent le dispositif actuel.
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