Combattre le harcèlement scolaire — Texte n° 4976

Amendement N° AC18 (Irrecevable)

Publié le 3 février 2022 par : Mme Mauborgne.

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L’article L. 312‑15 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’enseignement d’éducation civique comporte également, à l’école primaire et au collège, une formation dédiée à la sensibilisation, à la prévention et à la gestion des risques liés aux usages numériques » ;

2° Au troisième alinéa, le mot : « également » est remplacé par le mot : « enfin ».

Exposé sommaire :

L’article L312‑15 du code de l’éducation précise le contenu des formations et informations destinées aux élèves dans le cadre de l’enseignement d’éducation civique, à l’exemple de la formation aux valeurs de la République.

Le présent amendement a pour objet d’y insérer une formation dédiée à la sensibilisation, à la prévention et à la gestion des risques liés aux usages numériques.

De plus en plus jeunes, les enfants naviguent sur Internet, fréquentent les réseaux sociaux et utilisent quotidiennement un smartphone.

Selon une étude IPSOS « Junior Connect » réalisée en 2015, l’âge moyen de détention du premier téléphone portable est de 9 ans et celui du premier smartphone de 12 ans. Selon la même étude, les jeunes de 13 à 19 ans se connectent en moyenne 13h30 par semaine et 78 % sont inscrits sur les réseaux sociaux.

Dans l’espace numérique, l’enfant peut, sans en avoir connaissance ni conscience, s’exposer à des risques dont il ne mesure ni l’existence, ni les enjeux ni les conséquences.

Il convient alors de s’assurer que les enfants soient sensibilisés le plus en amont possible aux risques liés aux usages du numérique puis formés de manière ludique aux bonnes pratiques et bons usages du numérique.

Les spécialistes considèrent en effet que, plus la sensibilisation est menée tôt, plus elle est efficace Les enfants comprennent à leur âge si l’on adapte le vocabulaire et la manière de parler.

L’école de la République représente un cadre privilégié pour répondre à cet objectif.

Or, si récemment des modules « d’éducation au numérique » ont été mis en place au sein de l’école, ils sont essentiellement centrés sur le codage, sur une logique informatique métier.

De fait, il n’existe pas aujourd’hui au niveau national, et dès la fin du primaire, de module obligatoire de « formation à la prévention et la gestion des risques liés aux usages du numérique ».

Les actions de sensibilisation menées dans certaines écoles dépendent aujourd’hui quasi essentiellement du démarches isolées de chefs d’établissements, professeurs des écoles ou enseignants eux-mêmes convaincus à titre personnel de l’intérêt fondamental de cette démarche.

En pratique, ces actions de sensibilisation, dont les retours sont très positifs, sont menées par des bénévoles extérieurs qui relèvent de services spécialisés (de la Gendarmerie ou de la Police Nationale, à travers notamment la mise en œuvre du Permis Internet), de réserves citoyennes (en particulier les réserves « cyber ») ou encore d’associations engagées.

Mais ces actions de bonne volonté sont insuffisantes : il faut rendre cette démarche obligatoire afin qu’elle touche l’ensemble des élèves. C’est précisément l’objet poursuivi par le présent amendement.

Ajoutons que les enseignants qui accompagnent leur élèves dans cette démarche y sont également très sensibles mais ne sont pas toujours assez au fait de la question. La mise en place d’un tel module permettrait également de former les enseignants à cette thématique.

Les risques liés à l’usage du numérique par les enfants recouvrent essentiellement trois enjeux :

- premier enjeu, protéger le « moi numérique », en apprenant aux élèves à protéger leurs données privées, à naviguer de manière sécurisée puis, surtout, à avoir les bons réflexes pour se prémunir des actes en pleine expansion, en particulier dans le champ criminel (cyber-harcèlement, « arnaque à la romance », pédopornographie ou pédophilie).

À titre d’illustration, en 2018 et sur la seule Région Paris et petite couronne, 400 à 450 affaires relatives à des infractions en lien avec des mineurs commises via Internet ont fait l’objet d’une plainte (chiffres de la Préfecture de Police de Paris). Ces chiffres, faut-il le rappeler, ne prennent pas en compte les cas n’ayant pas donné lieu à judiciarisation...

- deuxième enjeu, limiter la vulnérabilité potentielle aux « fake news », phénomène également en plein essor s’il en est. L’enjeu est ici de tout mettre en œuvre pour que l’élève d’aujourd’hui soit le citoyen éclairé de demain. Apprendre aux plus jeunes à traiter l’information contenue sur différents supports digitaux, à l’analyser, à en avoir une lecture critique et à ne pas la prendre pour vérité absolue contribuera à l’étanchéité des esprits aux fausses informations, et in fine à en limiter la diffusion.

Plus largement, il est ici indispensable que les enfants sachent par exemple que le fonctionnement des réseaux sociaux et de nombreux sites web repose sur des algorithmes de consommation marketing qui ne leur proposent que ce à quoi ils s’intéressent.

- troisième enjeu, sensibiliser les enfants au fait que la loi s’applique également dans le champ numérique, que la liberté d’expression y a également ses limites. Autrement dit, il est indispensable de dissiper le sentiment d’impunité qu’ils peuvent parfois éprouver et qui peut les conduire à commettre eux-mêmes des actes répréhensibles : haine en ligne, cyber harcèlement, atteintes aux droits d’auteurs, fausses alertes, diffusion d’images choquantes, piratages informatiques...

La sensibilisation aux risques et la formation aux bonnes pratiques ainsi faites dès le plus jeune âge constitueront LA brique majeure du bon usage du numérique par l’adulte, que ce soit dans un cadre personnel ou professionnel.

80 % des attaques réussies le sont en raison d’erreurs humaines. Au-delà de la protection privée, il s’agit donc de faire de l’utilisateur un maillon fort responsable qui participe activement à la sécurité des autres, à celle des infrastructures économiques et in fine à la sécurité globale de notre pays.

La Revue Stratégique de Cyberdéfense de 2018 a réaffirmé, page 123, que « Si la diffusion de la culture de sécurité numérique ne suit pas, alors les conditions d’une utilisation sereine et confiante de l’Internet comme des objets connectés ne pourront être réunies. (...) C’est pourquoi la cybersécurité doit être intégrée de l’école élémentaire au lycée, au parcours de formation des élèves. (...) L’éducation dès le plus jeune âge à la cybersécurité doit constituer une priorité. »

Afin que cette démarche soit optimale, il sera nécessaire qu’elle soit collaborative entre l’Éducation Nationale et les spécialistes de la sécurité numérique. Il reviendra ainsi aux experts praticiens (bénévoles ou institutionnels) et aux représentants du personnel enseignant de co-construire le contenu et les contours de ce module.

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