Immigration maîtrisée droit d'asile effectif et intégration réussie — Texte n° 714

Amendement N° CL342 (Non soutenu)

Publié le 2 avril 2018 par : M. Trompille.

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Compléter l'alinéa 5 par les trois phrases suivantes :

« Le demandeur, et le cas échéant, son conseil, est informé que cette enquête donne lieu à la consultation des traitements automatisés des données personnelles mentionnés à l'article 230‑6 du code de procédure pénale. Le résultat de l'enquête administrative est communiqué au demandeur et le cas échéant à son conseil afin de recueillir ses observations. Le résultat de l'enquête administrative ainsi que les observations du demandeur et/ou de son conseil sont versés au dossier de ce dernier. »

Exposé sommaire :

La présente loi entend modifier l'article 114-1 du code de la sécurité intérieure en insérant un V autorisant, désormais, la consultation de traitements automatisés de données à caractère personnel relevant de l'article 26 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978.

Cette nouvelle disposition s'inscrit, très clairement, dans le contexte sécuritaire actuel.

Cependant, on ne saurait s'affranchir de toutes garanties procédurales destinées, là encore, à assurer l'effectivité des droits de la défense.

Cet équilibre entre sécurité publique et défense des droits est d'autant plus impérieux en matière de droit des étrangers et d'asile en particulier.

Il n'est pas inintéressant de rappeler qu'il s'agit là d'une problématique ancienne.

Ainsi dès 1992, relativement au projet de décret portant sur la création d'un système informatisé de gestions des dossiers des ressortissants étrangers en France, la Commission Nationale consultative des droits de l'homme demandait notamment à ce qu'aucune décision administrative, surtout lorsqu'elle porte sur une reconduite à la frontière puisse être prononcée sur la base de la seule consultation du fichier informatisé et sans que l'administration ait procédé à des vérifications supplémentaires excluant les risques d'erreur technique. (Voir en ce sens procès-verbal de la réunion plénière du 11 juin 1992).

Le Conseil constitutionnel a, quant à lui, rappelé les termes de l'article 2 de la loi informatique et libertés de 1978 «aucune décision administrative ou privée impliquant une appréciation sur un comportement humain ne peut avoir pour seul fondement un traitement automatisé d'information donnant une définition du profil ou de la personnalité de l'intéressé »en soulignant que les « données recueillies dans les fichiers ne constitueront donc, dans chaque cas, qu'un élément de la décision prise, sous le contrôle du juge, par l'autorité administrative » ( Conseil Constitutionnel, décision du 13 mars 2003 n°2003-476 DC, JO 19 mars).

A la lumière de cette décision, on peut donc déduire :

Or, pour apprécier le comportement de l'individu dans sa globalité, l'administration doit être tenue de recueillir ses observations. Autrement, il s'agit d'imposer aux autorités chargées de l'instruction des demandes d'asile de veiller au respect du contradictoire.

Cet amendement s'inscrit donc dans la lignée des dernières solutions retenues par le Conseil d'Etat en matière d'enquête administrative. Ainsi, par exemple, dans le cas des enquêtes menée par l'inspection du travail saisi par un employeur d'une demande d'autorisation de licenciement d'un salarié protégé, le Conseil d'Etat exige désormais de l'inspecteur du travail qu'il mette le salarié à même de prendre connaissance de l'ensemble des pièces produites par l'employeur à l'appui de sa demande, notamment des témoignages et attestations (voir en ce sens CE 16 juillet 2014, n°355201).

Plus récemment, le Conseil d'Etat a sanctionné l'administration de ne pas avoir communiqué à l'agent sanctionné les témoignages recueillis au cours de l'enquête administrative (CE 23 novembre 2016, n°397733).

Sauf à venir consacrer une rupture d'égalité entre les justiciables, le respect du contradictoire doit être ici consacré.

En outre, les normes communautaires veillent à cet équilibre délicat entre protection de l'ordre public et respect des droits de la défense.

Ainsi, l'article 23 de la directive stipule :

«1. Les États membres veillent à ce que le conseil juridique ou un autre conseiller reconnu en tant que tel ou autorisé à cette fin en vertu du droit national, qui assiste ou représente un demandeur en vertu du droit national, ait accès aux informations versées au dossier du demandeur sur la base duquel une décision est prise ou le sera.

Les États membres peuvent faire une exception lorsque la divulgation d'informations ou de leurs sources compromettrait la sécurité nationale, [.…] En pareil cas, les États membres :

a. donnent accès à ces informations ou sources aux autorités visées au chapitre V; et

b.mettent en place dans leur droit national des procédures garantissant que les droits de la défense du demandeur sont respectés.

Eu égard au point b), les États membres peuvent notamment accorder l'accès à ces informations ou sources au conseil juridique ou un autre conseiller ayant subi un contrôle de sécurité, pour autant que ces informations soient pertinentes aux fins de l'examen de la demande ou de la décision de retirer la protection internationale. ».

Or, tel n'est pas le cas en l'état actuel du projet de loi. Enfin, il convient de rappeler la réserve du Conseil d'Etat, dans son avis relatif au présent projet de loi :

« L'attention du Gouvernement est attirée sur l'élargissement constant des destinataires des informations de ces fichiers et des motifs de leur consultation qui remet en cause les finalités plus étroites conçues lors de leur création. Dans le cadre des nouvelles obligations que va faire peser le projet de loi - en cours de discussion parlementaire - qui tire les conséquences du règlement général sur la protection des données (UE) n° 2016/679 et transpose la directive (UE) n° 2016/680 du Parlement européen et du Conseil en date du 27 avril 2016, une étude d'impact de l'ensemble de ces fichiers sera sans doute nécessaire afin de déterminer avec la CNIL les mesures qui s'imposeront dans le nouveau régime pour que la collecte et l'usage des informations soient entourées des garanties adéquates, qui devront être précisées par les textes réglementaires régissant les fichiers concernés. »

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