Démocratie plus représentative responsable et efficace — Texte n° 911

Amendement N° 2455 (Retiré avant séance)

Publié le 8 juillet 2018 par : M. Taquet.

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L'article 1er de la Constitution est ainsi modifié :

1° La première phrase du premier alinéa est complété par les mots : « et inclusive. » ;

2° Le deuxième alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle favorise la pleine participation sociale des personnes à besoins spécifiques ».

Exposé sommaire :

1. Une Constitution ne doit pas céder aux sirènes de l'époque. Elle doit cependant connaître la souplesse nécessaire pour épouser, avec le recul et le discernement propres à une loi fondamentale, les évolutions d'une société et les aspirations de ses membres.

Une Constitution organise en effet le fonctionnement de nos institutions et garantie les libertés qui nous protègent. Ainsi, elle n'est pas seulement un texte technique, mais bien le reflet de l'organisation sociale que nous avons choisie. Elle porte les valeurs qui nous lie depuis avant même sa rédaction, sur lesquelles nous avons progressivement forgé notre vivre-ensemble, mais aussi les germes de celles qui cimenteront la communauté nationale demain.

2. La pleine participation sociale de l'ensemble des membres de notre communauté est un principe fondateur, que vise l'article Premier de notre Constitution. L'égalité devant la loi en est une condition.

Dans les faits cependant, dans les pratiques comme dans certains de nos textes, cette pleine participation est refusée à des millions de nos concitoyens en situation de handicap. Trop de normes sont encore adoptées qui font obstacles à cette participation pleine et entière, ou ne tiennent pas compte des besoins spécifiques de nos concitoyens touchés par un déficit physique, sensoriel, cognitif ou psychique. Avec pour conséquence, dans les faits comme dans le droit parfois, de rompre la promesse d'égalité que formule notre République à l'ensemble des Françaises et des Français.

Les causes en sont multiples, elles plongent dans notre histoire, font désormais partie intégrante de notre culture, elles expliquent des choix institutionnels que nous avons réalisés il y a plusieurs dizaines d'années et qui tiennent à l'écart de la communauté nationale une part importante de ses membres.

3. Inscrire au cœur même de notre Constitution notre ambition de bâtir une société inclusive, au-delà de traduire notre volonté de faire société, nous permettra de lutter plus efficacement contre les discriminations dont sont victimes nos concitoyens en situation de handicap, de rendre possible l'adoption de dispositions spécifiques qui répondent à leurs besoins spécifiques, de ne plus jamais revenir en arrière.

4. Nombreux sont les pays dont la Constitution érige, au rang d'autres principes cardinaux, la prise en considération du handicap. Sans surprise, ce sont les pays dont l'inclusion des personnes en situation de handicap dans la communauté nationale est, dans les faits comme dans le droit, la plus avancée.

Ainsi, sur la base d'un principe général de non-discrimination, l'article 2 de la Constitution suédoise dispose que « L'autorité publique doit favoriser la possibilité pour tous de parvenir à la participation et à l'égalité au sein de la société. L'autorité publique lutte contre la discrimination des personnes fondée sur le genre, la couleur […], le handicap […] ou tout autre motif affectant chacun ». La Loi Fondamentale allemande (article 3‑3) et la Constitution finlandaise (article 6) reprennent quasiment à l'identique cette formulation.

La Constitution irlandaise adopte une approche fondée davantage sur la protection des personnes « les plus vulnérables ». Son article 45, alinéa 4‑1° stipule ainsi que « L'État s'engage à […] contribuer à l'entretien des handicapés, des veuves des orphelins et des personnes âgées ». Une idée également reprise par l'article 49 de la Constitution espagnole qui promeut une « politique de prévention, de traitement, de réhabilitation et d'intégration en faveur des handicapés physiques, sensoriels et mentaux ».

Les exemples de protection les plus accomplis enfin, résident dans les Constitutions du Portugal et de l'Italie.

Ainsi, l'article 71 de la Constitution portugaise détaille ainsi un régime protecteur complet :

« 1. Les citoyens porteurs d'un handicap physiques ou mental jouissent pleinement des droits figurant dans la Constitution et sont astreints aux devoirs qui y sont consignés, en exceptant l'exercice des droits et accomplissement des devoirs que leur état leur interdit.

2. L'État s'engage à réaliser une campagne nationale de prévention et de traitement, de réinsertion et d'intégration des citoyens porteurs d'un handicap, et d'aide à leurs familles, à diffuser une pédagogie qui fasse prendre conscience à la société qu'il est de son devoir de les respecter et de faire preuve de solidarité entre eux, et se charge de les faire effectivement bénéficier de leurs droits, sans préjudice des droits et des devoirs des parents ou des tuteurs.

3. L'État appuie les associations de citoyens porteurs d'un handicap ».

L'article 38 de la Constitution italienne stipule quant à lui que « Tout citoyen inapte au travail et dépourvu des moyens d'existence nécessaires a droit aux secours et à l'assistance sociale. Les travailleurs ont droit à ce que des moyens d'existence appropriés à leurs nécessités vitale soient prévus et assurés en cas d'accident, de maladie, d'invalidité et de vieillesse, de chômage involontaire. Les citoyens inaptes et les handicapés ont droit à l'éducation et à la formation professionnelle ».

On le voit, en se fondant sur des principes juridiques différents, avec une approche parfois très « opérationnelle », et traduisant des visions plus ou moins compassionnelles, plus ou moins émancipatrices, nombres de Constitutions font du handicap un sujet de droit fondamental.

Il est temps qu'il en soit de même pour la France, pour que la promesse républicaine ne soit plus vaine pour des millions de nos concitoyens.

Tel est l'objet de cet amendement portant sur l'article Premier de notre Constitution, qui est accompagné par un amendement complémentaire portant sur l'article 34 de la Constitution, qui vise à l'éclairer et à le préciser.

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