Publié le 25 juin 2018 par : M. Colombani.
L'article 3 de la Constitution est ainsi rédigé :
« Le Souverain de la République est le Peuple. Il légifère par la voie du référendum et à travers ses représentants au Parlement européen et au Parlement national. Il rend la justice à travers les magistrats siégeant régulièrement en son nom.
« La Souveraineté s'exerce selon trois pouvoirs : le pouvoir législatif, le pouvoir exécutif et le pouvoir juridictionnel. Ces pouvoirs doivent collaborer entre eux de façon loyale tout en demeurant clairement distinguables aux yeux de la société civile .
« Le pouvoir exécutif est au service du pouvoir législatif. L'État et les collectivités territoriales régionales peuvent exercer le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, respectivement à l'échelle nationale et locale, dans les conditions et selon la répartition définies par la Constitution, et toujours au moyen d'institutions élues ou démocratiquement responsables de leurs actes. Le pouvoir juridictionnel est exercé de manière autonome par les magistrats assermentés qui rendent la justice au nom du Peuple.
« Aucune autre partie de la population ni aucun autre individu ne peut accomplir les actes du Souverain.
« Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret.
« Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les citoyens de l'Union régulièrement établis sur les territoires de la République ainsi que les citoyens français domiciliés en dehors de ces territoires, quel que soit leur sexe, pourvu qu'ils soient tous majeurs qu'ils jouissent de leurs droits civils et politiques. »
Cet amendement réécrit l'article 3 de la Constitution afin d'insister sur la séparation des pouvoirs :
1°) Le Peuple est clairement désigné comme le Souverain lui-même, alors que la souveraineté renvoie à uneffet de cette puissance et non au Souverain lui-même. La Souveraineté et le Peuple sont donc considérés ici comme une seule et même chose, et non comme deux choses distinctes où la première appartiendrait au second. Par ailleurs la dimension « nationale » de la souveraineté n'est plus clairement mentionnée : la conception monolithique de la « Nation » héritée du XXème siècle relève d'un modèle d'État-nation dépassé. Parler d'une souveraineté du peuple est plus conforme aux idéaux de la démocratie pluraliste.
2°) Il est précisé que le Souverainlégifère par le biais de la représentation nationale (le Parlement) et le référendum. En effet, seule la fonction législative est sous-entendue ici. Dire que le peuple exerce la souveraineté par ses représentants interroge alors le rôle du Président de la République, du Gouvernement et des magistrats : ces éléments des pouvoirs exécutifs et juridictionnels ne sont en effet pas des représentants au sens où l'on entend la représentation nationale, pourtant ils exercent des actes de souveraineté.
La représentation européenne est par ailleurs mentionnée afin de prendre acte dans la Loi fondamentale de la légitimité démocratique du Parlement européen et la non-contradiction entre cette institution et la souveraineté nationale.
La fonction législative est donc clairement distinguée de la fonction juridictionnelle dans la répartition des pouvoirs du souverain, la fonction exécutive n'est pas directement mentionnée au premier alinéa car elle découle en réalité de la fonction législative et est à son service : le pouvoir exécutif n'est, dans un ordre normal des choses, qu'unexécutantdu législateur.
3°) Ce pouvoir exécutif est exercé au sein de l'État par le Président de la République (élu) et le Gouvernement (responsable devant la représentation nationale), au sein des collectivités territoriales par les exécutifs locaux (élus). Le pouvoir législatif lui aussi n'est plus le monopole du Parlement : de fait il n'a plus aujourd'hui le monopole de l'élaboration des actes de forme législative puisque la Nouvelle Calédonie et certaines collectivités d'outre-mer peuvent adopter des sortes de lois régionales.
Dans une perspective dévolutive déjà à l'œuvre en Espagne, au Royaume-uni (qui sont pourtant eux aussi de vieux États comme la France) et en Italie, il est proposé d'inscrire le principe de la répartition du pouvoir législatif entre Parlement et assemblées délibérantes régionales, d'autant que le droit à la différenciation va octroyer une possibilité pour les régions et que la Corse et les collectivités de l'article 73 pourront être habilitées à prendre des actes dans le domaine de la loi.
4°) Parler de pouvoir juridictionnel est nécessaire dans la mesure où l'autorité judiciaire ne désigne que les juridictions relavant de la Cour de cassation : la place des juridictions administratives dans la séparation des pouvoirs n'est pas clairement définie, notamment parce que dans la tradition de la philosophie politique du XXème siècle les juges se limitent aux juges judiciaires, ce qui est évidemment le cas dans les pays n'ayant pas une dualité d'ordre de juridiction.
En France, la justice administrative s'est peu à peu juridictionnalisée avec l'élaboration progressive du droit administratif et l'apparition des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : auparavant le principe était que l'administration se jugeait elle-même dans les conseils de préfecture, sous le contrôle du Conseil d'État qui a une nature hybride, mi-juge, mi-conseiller du Gouvernement.
L'évolution a fait que la justice administrative, sous l'influence du droit européen notamment, s'est peu à peu éloigné de la sphère de l'exécutif pour entrer dans la sphère des juridictions indépendantes du pouvoir exécutif. D'où l'opportunité de parler d'un pouvoir juridictionnel regroupant aussi bien le juge judiciaire que le juge administratif.
5°) L'amendement propose d'aligner les droits politiques des citoyens français avec ceux des autres citoyens de l'Union européenne : ceux qui vivent en France disposent en effet des mêmes droits économiques et sociaux que leurs concitoyens français, il est normal qu'il participe pleinement à la vie politique sur des sujets de la politique nationale qui sont de plus en plus européens (migrants, climat, relations internationales, droit des travailleurs ...) et de moins en moins franco-français.
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