Publié le 6 juillet 2017 par : Mme Obono.
Supprimer cet article.
Cet amendement vise à supprimer la prorogation de l'état d'urgence.
L'état d'urgence en vigueur depuis le 14 novembre 2015 a constitué jusqu'ici une surenchère sécuritaire qui ne protège pas, mais au contraire affaiblit et fait le jeu des assaillants.
Cette sixième prorogation de l'état d'urgence, si elle était adoptée, le ferait durer jusqu'au 1er novembre 2017.
L'état d'urgence prévu par la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 constitue un régime juridique profondément dérogatoire à l'Etat de droit. Cet état d'urgence doit nécessairement être exceptionnel et temporaire. Sauf à le dénaturer, l'opportunité de proroger l'état d'urgence doit être justifiée, ainsi que limitée précisément dans l'espace et le temps à ce qui est nécessaire pour l'intérêt général.
Or la lettre et l'esprit de la loi de 1955 est actuellement méconnue. Ses articles 1 et 3 précisent que l'état d'urgence n'est notamment déclaré qu'en cas de péril « imminent » ou de calamité, et que s'il est prorogé par le Parlement, ce dernier devant fixer la « durée définitive » de sa prorogation. Ainsi, déjà déclaré et prorogé depuis plus d'un an et huit mois, sur le territoire métropolitain et dans les départements d'outre-mer, l'état d'urgence actuellement en vigueur est manifestement excessif tant dans sa durée que son application géographique.
Cet état d'exception doit rester exceptionnel. Comme l'a encore rappelé le Conseil d'Etat dans son avis n° 392427 du 8 décembre 2016 : « les renouvellements de l'état d'urgence ne sauraient se succéder indéfiniment et (…) l'état d'urgence doit demeurer temporaire ».
L'état d'urgence n'a aucunement fait la preuve de son efficacité alors qu'il atteint toujours aussi gravement aux droits et libertés fondamentales. Les chiffres et conclusions du rapport d'information sur le contrôle parlementaire de l'état d'urgence du 8 décembre 2016 sont à ce titre éloquents : 0,96% des perquisitions menées entre le 14 novembre 2015 et le 25 mai 2016 ont donné lieu des procédures pour des faits en lien avec le terrorisme, et ce chiffre a été d'aussi seulement à 4,61% entre juillet et décembre 2016.
Enfin, l'état d'urgence a jusqu'ici été aussi utilisé de manière dévoyée. La Commission nationale consultative des droits de l'homme, vigie publique quant aux atteintes aux libertés publiques, dénonçait ainsi sans fard «des détournements de l'état d'urgence, sans lien avec la lutte contre le terrorisme, pour entraver des manifestations d'écologistes, de syndicalistes, et pour lutter contre l'immigration clandestine ; des mesures qui pour l'essentiel sont de nature à stigmatiser une population et une appartenance religieuse ». (Déclaration du 18 février 2016).
Un tel constat était par ailleurs repris par le rapport d'information sur le contrôle parlementaire de l'état d'urgence du 8 décembre 2016 qui mentionnait ainsi spécifiquement l'interdiction de manifestations lors de la COP 21 fin 2015, le démantèlement du camp de la lande de Calais en octobre 2016, qui n'ont aucun lien établi dans la lutte contre la radicalisation ou contre le terrorisme.
Pour toutes ces raisons, cet amendement supprime l'article 1 du présent projet de loi prorogeant l'état d'urgence.
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