Publié le 14 décembre 2020 par : M. Bourgeaux, M. Bony, M. Nury, M. Reiss, M. Kamardine, Mme Porte, M. Bazin, Mme Corneloup, M. Forissier, M. Pradié, Mme Genevard.
À la dernière colonne de la seconde ligne du tableau de l’alinéa 2, substituer au nombre :
« 2,10 »
le nombre :
« 10,9 ».
Cet amendement vise à modifier la fiscalité du biofioul contenant jusqu’à 30 % d’ester méthylique d’acide gras (dit « F30 »), remplaçant le fioul domestique 100 % fossile et dont les émissions de CO2eq sont en deçà de la limite de 250 gr CO2eq par kWh Pci.
Le Sénat a adopté un amendement à ce sujet, fixant cette fiscalité au minimum prévu par le cadre européen sur la fiscalité des énergies. Cette disposition est nécessaire car elle adresse au consommateur un signal pour engager la substitution du fioul 100 % fossile en l’incitant à basculer sur le premier grade d’incorporation à 30 % d’ester méthylique d’acide gras (EMAG). En effet, la faiblesse des cours pétroliers laisse aujourd’hui apparaitre un surcoût pour le consommateur de près de 25 % entre fioul domestique 100 % fossile et biofioul F30.
Malgré le faible impact budgétaire de la disposition adoptée par le Sénat, la mise sur le marché du biofioul F30 ne doit pas être freinée par des considérations de nature budgétaire. Tel est le sens du présent amendement, moins ambitieux en tant qu’il ajuste la fiscalité propre au biofioul F30 en proportion de la partie renouvelable. La disposition proposée limite ainsi l’exonération de TICPE à la seule part renouvelable du combustible utilisé en chauffage, soit 30%, cette part pouvant évoluer à la hausse à l’avenir.
Ce faisant, cet amendement vise aussi à permettre l’inscription de ce nouveau produit au sein du Code des Douanes. En effet, le biofioul F30 doit être mis sur le marché dans un an, après achèvement de son parcours de certification permettant un arrêté administratif de spécifications prévu au second semestre 2021 et précisant les conditions d’utilisation du F30.
Le développement de l’usage du biofioul est en effet urgent du point de vue environnemental et souhaitable pour offrir des débouchés à la production agricole.
En effet, comme le souligne le Plan Protéines dévoilé le 1er décembre 2020 par le ministre de l'Agriculture, Julien Denormandie, la France est aujourd’hui dépendante des importations de protéines végétales. La création d’un débouché à la production d’EMAG de colza favorisera donc l’indépendance protéinique du pays. La filière industrielle d’estérification française est en capacité actuelle d’assurer l’approvisionnement nécessaire pour la mise sur le marché du F30. Cette filière est en recherche de débouchés pour les huiles résultant de la trituration. Ainsi, en incitant à l’incorporation d’EMAG de colza dans le fioul domestique, dont la qualité intrinsèque garantit une résistance au froid suffisante, cet amendement permet de répondre aux nouveaux enjeux de la filière colza et permet de projeter une incorporation à l’horizon de 2030 de 50 % pour l’ensemble du marché du chauffage utilisant le fioul.
La perspective d’un doublement des surfaces agricoles dédiée d’ici à 2030 aux oléagineux aura nécessairement pour corollaire la création d’un débouché pour l’huile coproduite. Le débouché chauffage est indispensable en ce qu’il permet, à l’horizon 2030, de fournir 50 % des volumes nécessaires à la substitution de l’ensemble du marché du fioul chauffage à un F50. Le marché du fioul domestique est globalement en décroissance de 5 % par an depuis près de 10 ans et cette baisse s’accroit nettement sur les segments d’habitations où les substituts au fioul sont possibles.
De plus, ce dispositif de soutien permettra l’émergence d’une alternative nécessaire, plus particulièrement en zones rurales, tout en restant en cohérence avec la décision du Gouvernement d'interdire l'installation de chaudières à fioul 100% fossile à partir du 1er janvier 2022. Le biofioul F30 sera donc obligatoire pour les équipements thermiques neufs, installés en 2022, il restera optionnel pour les installations déjà en place. L’usage du F30 sera toutefois possible pour ces installations existantes à l’occasion du changement de brûleur de la chaudière. En outre, soutenir activement la mise en place d’un processus rapide de remplacement du fioul domestique fossile par un bioliquide renouvelable permettra en effet de répondre à ces nouveaux critères d’émissions de gaz à effet de serre à court terme et permettra d’ici à 2030 d’accroitre la diminution des émissions de CO2. Le développement de bioliquide renouvelable est également encouragé par la Directive UE 2018/2001 et l’essor d’un bioliquide en France par substitution du fioul fossile contribuera à rattraper le retard français en matière d’énergie renouvelable.
Enfin, le fioul domestique est aujourd’hui la troisième énergie de chauffage en France, utilisée par plus de 3,5 millions de ménages, vivant essentiellement en maisons individuelles, dans des territoires ruraux bien souvent non desservis par des réseaux de chaleur ou de gaz. Il serait ainsi contreproductif de supprimer les installations thermiques pouvant utiliser un combustible liquide stockable alors que plus des 2/3 de ses utilisateurs souhaitent conserver ce mode de chauffage et que 78 % se déclarent prêts à basculer sur du biofioul. En revanche, les consommateurs interrogés rechignent à dépasser un surcoût de 10 % pour basculer sur le biofioul. Il convient par conséquent de promouvoir le biofioul pour tous les cas, nombreux en zones rurales et périurbaines où la substitution par des alternatives n’est ni possible techniquement ni rationnelle économiquement, particulièrement pour les ménages modestes qui utilisent le fioul domestique du fait de sa compétitivité en comparaison du gaz propane ou de l’électricité. Soutenir le biofioul en proportion de sa part renouvelable est donc aussi une mesure propre à concrétiser l’engagement d’une transition écologique socialement juste.
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