Publié le 1er juillet 2021 par : le Gouvernement.
Supprimer cet article.
Le dispositif proposé par le Sénat pour assujettir aux obligations de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LCB-FT) les sites de cagnottes en ligne, assimile ces sites à des intermédiaires en financement participatifs (IFP) qui sont soumis à des obligations hors LCB-FT particulières, par exemple en matière d’enregistrement, d’honorabilité et de compétence professionnelles des dirigeants et de protection des investisseurs.
Ce dispositif qui, sur le fond, nous semble aller dans le bon sens, est cependant incomplet pour atteindre son objectif (i) et prématuré par rapport à des travaux en cours induits par l’entrée en application prochaine du règlement européen relatif au financement participatif (ii).
i). Pour que les choses puissent fonctionner, cette modification devrait être accompagnée d’une modification des articles L. 548-1 et suivants du code monétaire et financier relatifs aux IFP pour en étendre le champ à ces sites de cagnotte (ce qui serait nécessaire au vu du projet de loi, qui inclut les sites de cagnotte dans le champ de l’intermédiation en financement participatif). À titre d’illustration, si les articles L. 548-1 et suivant sur les IFP ne sont pas étendus à ces sites de cagnotte, les dirigeants de ces sites ne seront pas soumis aux exigences d’honorabilité et de compétence (art. L. 548-4), ce qui est aussi une exigence de LCB-FT. Par ailleurs, ces sites ne seront pas soumis à l’obligation d’enregistrement auprès de l’ORIAS, ce qui ne permettra pas à l’ACPR de les identifier pour superviser la mise en œuvre de leurs obligations LCB-FT. En conclusion, il n’est pas possible de soumettre les cagnottes en lignes à l’ensemble du régime des IFP par la seule modification de l’article L.561-2 du code monétaire et financier.
ii). Par ailleurs, ce dispositif intervient juridiquement dans un champ d’activité, celui des IFP, qui a fait l’objet, il y a quelques mois, d’une harmonisation maximale au niveau européen par le biais du règlement Crowdfunding pour celles de leurs activités qui sont incluses dans le champ dudit règlement, à savoir les activités commerciales. L’entrée en vigueur de ce dernier dans les prochaines semaines rendra nécessaire une révision profonde du Code monétaire et financier et notamment des activités exercées par les IFP actuels au sens du droit français. La rédaction proposée par le Sénat, postérieurement à l’adoption du règlement, pourrait à cet égard s’avérer contraire au droit de l’Union dans la mesure où elle réaffirme des obligations relatives à la LCB-FT non-prévues par le règlement européen pour la partie de l’activité des IFP (activités commerciales) qu’il englobe.
L’entrée en application du règlement européen sur le financement participatif nécessite la réécriture du code monétaire et financier. Celle-ci est en cours, dans le cadre d’une habilitation du gouvernement à légiférer par ordonnance actuellement examinée par le parlement dans le cadre de l’examen du PJL Ddadue Transport, environnement, économie et finances. Dans ce cadre, la commission des finances de l’assemblée nationale, sous l’égide de la rapporteure Mme Bono-Vandorme, a accepté l’article d’habilitation (article 41 du pjl Ddadue Transport, environnement, économie et finances) qui précise les modifications que le gouvernement est autorisé, par le Parlement, à apporter aux activités soumises au statut d’IFP dans le but d’y assujettir les cagnottes en lignes. Ce texte sera examiné en séance le 6 juillet. L’article 46 bis A du projet de loi séparatisme, s’il procède d’une démarche positive sur le fond, est de fait prématuré par rapport à des travaux complets de réécriture du code monétaire et financier relatif aux IFP qui aboutiront à l’automne prochain. Son adoption immédiate en l’état conduirait sans doute à sa modification à l’automne, ce qui ne participerait pas, dans l’intervalle, d’une bonne intelligibilité de la loi pour les professionnels comme pour l’administration et le régulateur et ne garantirait pas l’efficacité du dispositif.
En corollaire de cette suppression, il y a lieu de supprimer l’article 54 ter qui a pour objet d’étendre aux collectivités d’outre-mer les dispositions introduites dans le code monétaire et financier par l’article 46 bis A.
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