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...ait croire qu'il ne s'est finalement rien passé, comme si la vague #MeToo n'avait pas déferlé, comme si tous ces flots de témoignages bouleversants et révoltants n'avaient produit aucun sursaut gouvernemental, sursaut que l'on aurait pu espérer trouver au moins là, sur un sujet qui aurait pu nous rassembler. En lieu et place d'une grande loi, d'une vraie loi, d'une loi-cadre contre les violences sexistes et sexuelles, nous voilà, pour lutter contre ces violences, face à quatre maigres articles comportant au mieux une extension de quelques droits et sanctions, et induisant au pire un abaissement de la qualification juridique de certaines violences faites aux femmes et, notamment avec l'article 2, une correctionnalisation assumée du viol commis sur des mineurs de quinze ans.
...us êtes désormais conscients que les violences faites aux femmes sont à la fois banales, quotidiennes, terriblement destructrices et si largement impunies, et qu'elles représentent le point ultime de la domination masculine qui s'affirme dans tous les domaines, au sein d'une société où l'égalité entre les sexes n'est qu'un mirage et où la sexualité et le désir sont enfermés dans des normes hétéro-sexistes. Au XXe siècle, les mouvements des femmes ont arraché l'égalité dans la loi. Au XXIe siècle, nous devons obtenir que cette égalité, de légale devienne réelle, c'est-à-dire qu'elle soit pratiquée dans la vie.
Je ne dresserai pas ici de liste à la Prévert, mais je veux témoigner et rappeler combien ces violences détruisent. Les traumatismes ne sont évidemment pas de même nature selon la gravité des faits ou selon les victimes, mais nous savons que les violences sexuelles et sexistes emmènent les femmes sur le chemin de la mort. Il y a une raison fondamentale à cela, et je voudrais que chacun d'entre nous la mesure : par ces actes, par ces violences, les femmes sont niées comme sujets, elles sont traitées comme des objets. Je pense souvent à ces mots de Virginie Despentes dans King Kong Théorie, dont je me dis qu'ils doivent résonner pour tant de victimes : « De la peur de ...
...appel parce que, disait-elle, « c'est infernal, on est limite plus les accusées que les victimes ». Car voilà le traumatisme qui suit si souvent le traumatisme de la violence sexuelle : ne pas être crue, manquer d'éléments tangibles, matériels et entendre la justice exprimer un non-lieu. Au défaut de cette preuve, de la preuve, de la maudite preuve si difficile à fournir dans le cas de violences sexistes et sexuelles, s'ajoute le soupçon sur les victimes. Ce sont les fameux « Elle l'a bien cherché », « Comment était-elle habillée ? » – on connaît la chanson – et, dans un autre registre : « Il n'y a pas mort d'homme », « Ce n'est qu'un troussage de domestique ». Pour les violences conjugales, prouver l'enfer constitue parfois le sommet de la difficulté. Dans Nous sommes les oiseaux de la tempête...
Je vous le dis sincèrement : c'est affligeant. Nous critiquons mais nous avançons également des propositions, même si vous faites souvent mine de ne pas nous entendre. Une loi-cadre, voilà qui permettrait d'agir sur l'éducation, l'accompagnement des victimes, la formation des personnels de police et de justice, les représentations sexistes dans notre société.
Dès le plus jeune âge, il faut combattre les stéréotypes sexistes, car là se joue l'intériorisation des rôles, masculin et féminin. L'éducation, ce que nous transmettons aux enfants, contribue à la perpétuation des rapports sociaux profondément inégalitaires entre les sexes et les sexualités : nous le savons au moins depuis Le Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir. C'est, par exemple, ce dictionnaire pour enfants qui illustre ainsi sa définition du mot « bain » ...
...t là ! Faire la différence entre du sexisme et de l'humour, une dispute et de la violence conjugale, de la drague et du harcèlement, est visiblement une tâche toujours difficile dans notre société si profondément marquée par les stéréotypes de genre. C'est pourquoi nous devons nous atteler à la publicité et aux contenus médiatiques. Il faut faire cesser l'accumulation et la banalisation d'images sexistes dans l'espace public. Un récent rapport du CSA – que vous avez peut-être lu, madame la ministre, madame la secrétaire d'État – , publié à l'initiative de Sylvie Pierre-Brossolette, donne la mesure du problème. C'est accablant. Mais les pouvoirs réels des structures institutionnelles ou associatives qui pourraient veiller à une forme de déontologie active dans ce domaine sont introuvables. Dans c...
...euil du commissariat, mais celui de l'hôpital psychiatrique après une tentative de suicide. Je veux ici rendre hommage, par contraste, aux personnels et aux personnes, quels qu'ils soient, qui ont su trouver les mots et tendre la main. Les paroles des personnes auxquelles se confient les victimes, notamment les premières d'entre elles, sont décisives. C'est pourquoi la lutte contre les violences sexistes et sexuelles doit impliquer et irriguer un maillage large, et non se réduire à un enjeu de réglementation. Dans ce maillage, le tissu associatif est décisif. Or, il subit partout des coupes budgétaires drastiques. Je pense bien sûr aux associations féministes et de lutte contre les violences faites aux femmes, qui ne voient pas le soutien sonnant et trébuchant de l'État se développer à l'heure ...
...oi mal rédigée et porteuse de reculs, d'une loi sans envergure, qui passe à côté de son sujet, et je dirais même, de sa raison d'être. Dans la « start-up nation » chère à la Macronie, on demande toujours des résultats : aux cheminots, aux étudiants, aux chômeurs. On se veut pragmatique. Alors je vous le demande : quel sera le résultat concret de cette loi ? Combien de femmes victimes de violences sexistes et sexuelles vont voir leur situation améliorée par cette loi ? Combien vont être accompagnées ? Des actes de violences sexistes et sexuelles vont-ils être empêchés grâce à cette loi ? Pour chasser les souris et soulever les montagnes, nous vous proposons, par cette motion de renvoi, de reprendre la discussion et les travaux en commission. Donnez-nous le temps de vous convaincre que la lutte co...
...pour preuve l'avis du Défenseur des droits, dont vous ne manquez habituellement pas de vous faire l'écho, chers collègues du groupe La France insoumise, mais que, ici, vous occultez étrangement : il affirme sans détour que l'article 2 ne comporte aucune déqualification du crime de viol. Au contraire, avec ce texte, nous proposons d'aller aussi loin que possible dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Nous le faisons en responsabilité, car il n'est pas question de reproduire les erreurs passées s'agissant de l'inceste ou de l'agression sexuelle, ni de voter aujourd'hui des mesures qui ne seraient pas appliquées demain dans les prétoires au motif qu'elles seraient inconstitutionnelles. C'est un pari que nous ne prendrons pas, tout simplement parce que ce n'est pas un jeu. Nous a...
...ollectif national pour les droits des femmes, aux associations et aux 250 personnalités demandant le retrait de l'article 2, qui ne sont pas toutes proches du groupe La France insoumise, tant s'en faut ! Si tant de gens investis dans la justice et les associations affirment que ce texte de quatre articles est particulièrement indigent pour prétendre résoudre la question des violences sexuelles et sexistes, et alors même qu'il a été étudié en une journée, dans la confusion, c'est qu'il n'est pas suffisant. Ce ne sont pas uniquement les membres du groupe La France insoumise qui l'affirment, mais aussi des dizaines d'associations, de magistrats et d'avocats ainsi que le Haut Conseil à l'égalité entre les hommes et les femmes.