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...u'il ne s'est finalement rien passé, comme si la vague #MeToo n'avait pas déferlé, comme si tous ces flots de témoignages bouleversants et révoltants n'avaient produit aucun sursaut gouvernemental, sursaut que l'on aurait pu espérer trouver au moins là, sur un sujet qui aurait pu nous rassembler. En lieu et place d'une grande loi, d'une vraie loi, d'une loi-cadre contre les violences sexistes et sexuelles, nous voilà, pour lutter contre ces violences, face à quatre maigres articles comportant au mieux une extension de quelques droits et sanctions, et induisant au pire un abaissement de la qualification juridique de certaines violences faites aux femmes et, notamment avec l'article 2, une correctionnalisation assumée du viol commis sur des mineurs de quinze ans.
...sur trois a déjà été harcelée ou agressée sur son lieu de travail, et le sexisme s'épanouit, comme on le sait maintenant, sur les réseaux sociaux. Nous mesurons mieux – mais encore insuffisamment – les conséquences de ces violences. Elles sont profondes, lourdes, souvent dramatiques parce que l'estime de soi est mise en miettes, parce que la peur s'installe et s'incruste, parce que les violences sexuelles entraînent généralement un dégoût du corps et parce que les somatisations produisent leurs méfaits : c'est souvent le corps qui imprime les douleurs et qui incorpore les traumatismes.
Je ne dresserai pas ici de liste à la Prévert, mais je veux témoigner et rappeler combien ces violences détruisent. Les traumatismes ne sont évidemment pas de même nature selon la gravité des faits ou selon les victimes, mais nous savons que les violences sexuelles et sexistes emmènent les femmes sur le chemin de la mort. Il y a une raison fondamentale à cela, et je voudrais que chacun d'entre nous la mesure : par ces actes, par ces violences, les femmes sont niées comme sujets, elles sont traitées comme des objets. Je pense souvent à ces mots de Virginie Despentes dans King Kong Théorie, dont je me dis qu'ils doivent résonner pour tant de victimes : « De...
...i agissaient à tour de rôle dans une salle d'immeuble. Le procès a été médiatisé en 2012, notamment parce que quatre des accusés – accusés de viol – ont été acquittés. Aurélie, une des victimes, a refusé d'aller au procès en appel parce que, disait-elle, « c'est infernal, on est limite plus les accusées que les victimes ». Car voilà le traumatisme qui suit si souvent le traumatisme de la violence sexuelle : ne pas être crue, manquer d'éléments tangibles, matériels et entendre la justice exprimer un non-lieu. Au défaut de cette preuve, de la preuve, de la maudite preuve si difficile à fournir dans le cas de violences sexistes et sexuelles, s'ajoute le soupçon sur les victimes. Ce sont les fameux « Elle l'a bien cherché », « Comment était-elle habillée ? » – on connaît la chanson – et, dans un autr...
Dans 60 % des cas, quand une femme se rend au commissariat, les dépôts de plainte sont refusés ou fortement découragés par les agents de police, et les procédures sont mal vécues par 80 % des victimes. C'est donc la double peine : au traumatisme des violences sexuelles s'ajoute celui infligé par des institutions qui remettent trop couramment en cause la parole des victimes.
Nos institutions sont, de ce point de vue, le reflet d'un sexisme et d'une méconnaissance de ces violences, même si le mouvement #MeToo a permis une forme de bond en avant – les plaintes pour viols et agressions sexuelles ont augmenté de 11 % en 2017 par rapport à 2016, ce qui est considérable. La difficulté, voire l'incapacité à entendre, se retrouve partout. Je ne prendrai qu'un exemple, que je crois assez frappant, celui d'Évelyne, violée par son père, et qui décide de consulter un psychanalyste. Elle raconte le viol qu'elle a subi et le psy conclut la séance ainsi : « Il faut maintenant comprendre pourquoi vo...
...rançais. Le mouvement des femmes s'est battu pour le définir ; auparavant, les viols n'étaient en réalité jamais jugés aux assises, mais au sein des tribunaux correctionnels. Grâce à la mobilisation féministe, à l'engagement des femmes, en 1980, nous avons réussi à arracher une définition du viol, liée à « tout acte de pénétration ». C'est ce qui spécifie le viol par rapport aux autres agressions sexuelles. C'est une définition qui peut évidemment être discutée, dans la mesure où elle présente un caractère phallocentrique affirmé – la sexualité est définie par la pénétration – mais elle a le mérite d'exister et de permettre que le viol soit jugé devant les assises. Le viol se différencie donc de l'agression sexuelle et de l'atteinte sexuelle, non par des facteurs liés au consentement ou à la menac...
...ée et porteuse de reculs, d'une loi sans envergure, qui passe à côté de son sujet, et je dirais même, de sa raison d'être. Dans la « start-up nation » chère à la Macronie, on demande toujours des résultats : aux cheminots, aux étudiants, aux chômeurs. On se veut pragmatique. Alors je vous le demande : quel sera le résultat concret de cette loi ? Combien de femmes victimes de violences sexistes et sexuelles vont voir leur situation améliorée par cette loi ? Combien vont être accompagnées ? Des actes de violences sexistes et sexuelles vont-ils être empêchés grâce à cette loi ? Pour chasser les souris et soulever les montagnes, nous vous proposons, par cette motion de renvoi, de reprendre la discussion et les travaux en commission. Donnez-nous le temps de vous convaincre que la lutte contre les viol...
Vous faites, me semble-t-il, une confusion sur l'article 2, que je tiens à rectifier, ayant énormément travaillé sur cet article et procédé à de nombreuses auditions : vous évoquez le délit d'atteinte sexuelle, chère madame Autain, mais cette infraction existe déjà dans notre législation !
Elle comprend déjà l'acte de pénétration. Une relation sexuelle entre un mineur de moins de quinze ans et un majeur est déjà sanctionnée, qu'il y ait pénétration ou non, sous l'angle de l'atteinte sexuelle. Vous confondez plusieurs infractions, et nous y reviendrons car les débats sur cet article seront très riches. Il faut d'ores et déjà clarifier les choses : nous parlons de trois infractions différentes et nous n'abolissons pas la distinction entre elles. ...
...l'avis du Défenseur des droits, dont vous ne manquez habituellement pas de vous faire l'écho, chers collègues du groupe La France insoumise, mais que, ici, vous occultez étrangement : il affirme sans détour que l'article 2 ne comporte aucune déqualification du crime de viol. Au contraire, avec ce texte, nous proposons d'aller aussi loin que possible dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Nous le faisons en responsabilité, car il n'est pas question de reproduire les erreurs passées s'agissant de l'inceste ou de l'agression sexuelle, ni de voter aujourd'hui des mesures qui ne seraient pas appliquées demain dans les prétoires au motif qu'elles seraient inconstitutionnelles. C'est un pari que nous ne prendrons pas, tout simplement parce que ce n'est pas un jeu. Nous aurons ultérie...
...e et de défendre les femmes victimes de viol. Il faut bouleverser la donne en la matière. Or il faut bien convenir – et je présume que la discussion générale permettra de nous en assurer – que, à ce jour, certains éléments d'appréciation et certaines réponses manquent dans le texte. Il y manque également un souffle pour faire face efficacement aux enjeux de société que constituent les violences sexuelles. Mentionnons par exemple le silence du texte sur la présomption simple de contrainte s'agissant de la qualification de viol d'un rapport sexuel entre un adulte et un mineur. Pour ces raisons, rapidement exposées, les membres du groupe Les Républicains voteront la motion de renvoi en commission.
Chaque article doit être enrichi de nos réflexions. Je prendrai un exemple très simple qui n'a pas encore été évoqué, celui du fichier judiciaire automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes. S'il n'est pas condamné à une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à cinq ans, un auteur d'agression ou de violence sexuelles n'y est pas obligatoirement inscrit. Il l'est à la discrétion du procureur ou de la juridiction compétente. Or un professeur de musique, condamné à une peine d'emprisonnement inférieure à cinq ans pour attouchements sexuels dans le sud de la France, a...
J'ignore si son inscription au fichier des auteurs d'infractions sexuelles aurait pu changer les choses, mais j'estime que, en tout état de cause un auteur de violences sexuelles condamné à une peine de prison ferme doit y être inscrit.
Il faut être précis, madame la rapporteure, mais le moins que l'on puisse dire, c'est que la confusion entre infraction et délit ou entre agression sexuelle et viol a le plus souvent caractérisé les débats que nous avons eus en commission sur les bancs du Gouvernement et de la majorité, qui défendent le texte. Nous dressons donc le constat que le débat mérite d'aller au fond des choses et de clarifier la situation. Il ne s'agit pas d'être caricatural pour être caricatural. Vous pouvez affirmer qu'il s'agit d'une posture du groupe La France insoumise...