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Je tiens tout d'abord à saluer les responsables associatifs et les représentants des plateformes qui nous font l'honneur d'assister à nos débats. Lorsque j'avais 17 ans et que j'étais sur le point d'entrer à Sciences Po, mon médecin de famille m'a dit : « Laetitia, surtout, ne fais pas de politique. On te ramènera sans cesse à ta couleur de peau, et tu deviendras une militante de la lutte contre les discriminations. » C'est donc avec un certain sentiment de fatalité que je vous présente la...
...ue l'on peut subir en ligne, d'autre part. Enfin, je vous propose d'écrire une nouvelle page de notre rapport au numérique. L'autorégulation ne suffit plus, et le statu quo n'est pas une option. Je le répète, ce qui n'est pas toléré dans la rue ne doit pas l'être sur internet. C'est en ce sens que j'ai mené avec Karim Amellal et Gil Taïeb une concertation avec les différentes parties prenantes – plateformes, associations, magistrats, policiers et universitaires. Le 20 septembre dernier, nous avons remis au Premier ministre vingt recommandations dont la présente proposition de loi est la traduction. Le coeur du texte est l'obligation pour les grandes plateformes de retirer les contenus manifestement haineux dans un délai maximum de vingt-quatre heures après leur signalement. Pour la mettre en oeuvr...
La lutte contre les contenus haineux repose sur un triptyque : la responsabilisation des plateformes ; la responsabilisation des auteurs de contenus haineux, qui sont des délinquants ; enfin, la responsabilisation de la société tout entière. La responsabilisation des plateformes est couverte pour l'essentiel par le texte. En ce qui concerne la réponse pénale, il faut faire mieux. C'est pourquoi je salue d'ores et déjà l'amendement déposé par le Gouvernement et créant un parquet spécialisé. Le...
... juste mesure. Liberté totale d'expression, absence de règles et de barrières, anonymat : ces paramètres permettent un déferlement de propos discriminatoires et d'injures dans un monde virtuel qui se révèle hostile à un grand nombre de citoyens et où les auteurs de contenus haineux évoluent dans une impunité quasi-totale. Les groupes d'incitation à la haine l'ont bien compris, et se servent des plateformes en ligne pour diffuser massivement leurs idées. Pourtant, ces propos ne sont pas plus autorisés dans l'espace numérique que dans l'espace public ; il n'est donc pas acceptable qu'ils y soient tolérés plus longtemps. Les opérateurs de plateformes sont au coeur du développement du phénomène. Leurs algorithmes donnent aux contenus haineux leur viralité et leur puissance, que subissent les victimes...
... pas poli. Quel remède apportez-vous à cette violence, à ces injures, à cette haine que je déplore ? Vous confiez la censure à Google, à Facebook, à Twitter – une censure privée, surtout. Pire : une censure technologique. La motion de rejet que nous déposons est une alerte, monsieur le secrétaire d'État. Un mot en particulier m'ennuie dans ce texte de loi. C'est le mot « technologique » : « [les plateformes] mettent en oeuvre les moyens humains ou technologiques [… ] ». Cette censure technologique – algorithmique, en vérité – me gêne. La censure a une longue histoire dans notre pays. L'Église catholique s'en est d'abord chargée. Le roi François Ier a chassé les imprimeurs. Puis viennent les Lumières : Voltaire embastillé pour ses écrits satiriques, Diderot à la prison de Vincennes pour sa Lettre s...
Cher collègue, vous avez défendu une motion de rejet préalable : cela signifie que vous souhaitez le maintien du statu quo. Quel est-il ? Depuis la LCEN – loi pour la confiance dans l'économie numérique – , adoptée en 2004, les plateformes sont d'ores et déjà obligées de retirer les contenus illicites, une obligation qu'elles appliquent de manière arbitraire – d'une semaine à l'autre, un même contenu sera retiré ou non – , sans aucune transparence et sans en rendre compte à qui que ce soit. Sur Facebook, que vous avez évoqué plusieurs fois, plus de 60 % des contenus sont retirés de manière proactive, c'est-à-dire technologique, s...
... la commission des lois pourront témoigner que nous avons veillé, tout au long des discussions, à ce qu'elle ne soit jamais entravée. Cette question est revenue à chaque étape des échanges : nous avons été les garants collectifs de la liberté d'expression. Notre groupe, mais aussi le vôtre, comme tous ceux qui étaient représentés, ont alerté quant au risque de censure systématique de la part des plateformes. Nous pouvons d'ailleurs nous féliciter de cette démarche commune, qui prouve, s'il le fallait encore, que les membres de la représentation nationale savent travailler conjointement pour protéger les libertés. La rapporteure a donné suffisamment de gages à ce sujet. Il s'agit maintenant de responsabiliser les acteurs car, ne nous y trompons pas, ceux qui souhaitent pouvoir continuer de « trolle...
...la liberté d'expression sont moins nombreux qu'ils ne l'étaient auparavant, alors qu'internet a des milliards d'utilisateurs. L'État se trouve obligé, sinon d'obtenir des résultats – que j'espère toutefois – , du moins d'agir au vu de la situation : il ne peut pas ne pas entendre les cris de détresse qu'on pousse autour de nous à ce sujet. Il ne faut pas non plus oublier les moyens colossaux des plateformes. Des dispositifs législatifs ont déjà été adoptés les années précédentes ; ils n'ont pas toujours été efficaces. Il s'agit d'adopter une proposition de loi a minima, permettant à la société de réagir à la publication sur internet d'un propos manifestement injurieux qui lèse un internaute. Le groupe Socialistes et apparentés ne votera donc pas la motion de rejet préalable.
Le groupe Libertés et territoires est conscient de la nécessité qui s'impose aux États, aux plateformes et aux entreprises actives dans le domaine des médias sociaux d'agir afin qu'internet ne devienne pas un refuge sûr pour des discours haineux illégaux et violents. Nous sommes collectivement responsables de la promotion et du soutien de la liberté d'expression en ligne, dans le respect de la dignité humaine, des droits fondamentaux, de l'État de droit – des valeurs sur lesquelles notre démocrat...
...l'a dit, la motion de rejet préalable lui a servi à lancer une alerte. Vous avez tous convenu, quelque passion que vous ayez mise à lui riposter, qu'il y avait là un réel problème. Monsieur le secrétaire d'État, dans une certaine mesure, j'ai apprécié vos propos. Vous avez indiqué qu'il y avait un point d'équilibre à trouver. Vous considérez que le texte y parvient ; nous pensons l'inverse : les plateformes prétendant que les algorithmes sont un secret industriel qu'elles n'ont pas à livrer, vous n'en connaîtrez pas véritablement le contenu. Cette responsabilité sera donc confiée à de grands groupes privés, qui sont d'ores et déjà intervenus dans la vie politique de certains pays, notamment par une censure intolérable, et pourront le faire à nouveau demain. C'est là tout le problème, et c'est ce qu...
... outil d'échanges, de connaissances, au-delà des frontières et des différences de langues. Aussi des individus, des groupes, voire des États s'en sont-ils emparés pour troubler les consciences et appeler à la haine, au racisme, à l'antisémitisme, à l'homophobie, au sexisme. Il faut les combattre dans la vraie vie – c'est le rôle de la justice, de la police, de la diplomatie – , mais aussi sur les plateformes, de manière technique. Cependant, vous avez dit vous-même, monsieur le secrétaire d'État, que la liberté de tous ne doit pas être remise en cause par les abus de certains, et que nous étions sur une ligne de crête. C'est bien de cela qu'il faut que nous discutions, avec une grande ouverture d'esprit, dans les heures qui viennent. Comment garantir qu'on ne donne pas un pouvoir excessif de sur-ce...
Donnera-t-on à cette plateforme et à la magistrature les moyens nécessaires pour jouer leur rôle ?
...citoyen de 1789 protègent la liberté d'opinion, de même que la liberté d'expression qui en découle. La Cour européenne des droits de l'homme exige en outre la prévisibilité et la proportionnalité des blocages, ainsi que la protection renforcée de la parole à visée politique ou militante. Or le texte que vous nous proposez d'adopter ne prévoit pas les garanties nécessaires pour cela. Le champ des plateformes visées est bien trop large. La Quadrature du net souligne ainsi que les exigences de retrait de contenu en vingt-quatre heures font peser une obligation disproportionnée sur les plateformes à visée non commerciale mais recevant de nombreuses visites. C'est le cas, par exemple, de Wikipédia, qui n'a pas les moyens de Facebook. Ce défaut du texte initial a été aggravé par les modifications apport...
...osition de loi s'emploie beaucoup à cacher la haine, mais peu à la combattre. Or ce n'est pas parce que l'on masque les contenus haineux que les discriminations disparaissent. L'un des enjeux actuels en la matière est, en réalité, le contrôle des algorithmes, plus particulièrement des biais discriminants qu'ils produisent ou reproduisent. Voilà un objectif d'encadrement, de responsabilisation des plateformes. Or c'est à des plateformes qui discriminent parfois que vous demandez de lutter contre des agressions discriminantes. Ces biais ont des conséquences concrètes sur le quotidien. Dans la recherche d'emploi, il a été révélé, par exemple, qu'Amazon utilisait un système de tri qui pénalisait les CV contenant le mot « femme », soit en les mettant de côté, soit en proposant des salaires inférieurs. C...
...ous avez en effet évoqué une proposition alternative à celle qui est formulée dans cette proposition de loi : l'interopérabilité, qui permettrait de lutter contre le phénomène de la haine sur internet. Or je ne comprends pas que vous puissiez présenter cela comme une solution. Il s'agit certes d'un élément intéressant en termes de régulation du numérique et d'appréciation du modèle économique des plateformes, mais ce n'est pas une solution à proposer aux victimes. Cela revient à dire à une femme que, si elle est victime de sexisme en passant dans tel quartier, elle devrait passer par une autre rue, ou à dire, comme l'on fait certaines personnes après le suicide de la jeune Evaëlle, victime de harcèlement scolaire, qu'elle aurait peut-être dû changer d'école. On ne dit pas à une victime de changer de...
Si la victime veut rester sur une plateforme, elle doit pouvoir le faire.
Cette motion de renvoi en commission est le dernier moment où nous pouvons nous interroger, avant d'engager le débat, pour savoir si nous avons suffisamment travaillé en commission des lois. Dans le cadre circonscrit de cette proposition de loi, qui ne traite pas de certaines questions judicieusement posées par Mme Obono à la tribune, en particulier sur le mode de fonctionnement de ces plateformes et sur les conditions de travail des personnes qu'elles emploient, nous avons travaillé et le temps est maintenant au débat. Cette motion de renvoi était en quelque sorte un raccourci du débat que nous devons mener avec les amendements que nous allons examiner. On peut considérer que la motion de renvoi n'a plus de pertinence, en ce sens que les objectifs que nous avons poursuivis avec ce text...
...if, et – par les combats menés dans l'hémicycle et au-delà – à garantir le respect de la liberté d'expression. En dépit du travail mené en commission, il subsiste des zones floues. On sait à quel point la qualification « manifestement illicite » de certains contenus demeure floue. Par ailleurs, contrairement à ce que suggérait tout à l'heure Philippe Dunoyer, estimant que le texte s'attaque aux plateformes, il nous semble que leur abandonner le travail de détection de ces contenus légitime leur place prépondérante, alors même qu'elles ne participent pas à la lutte que nous menons et qu'elles sont en partie à l'origine du système. Je rejoins à tout point de vue la position exprimée par Danièle Obono. Nous voterons la motion de renvoi en commission.
Cette loi, dont certains ont relevé le côté liberticide, a donné lieu à des débats enflammés outre-Rhin ; la procédure, qui se veut à la fois efficace et transparente, permet de faire bloquer dans les vingt-quatre heures un contenu jugé illicite. Toutefois, le résultat n'est pas optimal : les chiffres publiés par les différentes plateformes révèlent beaucoup de vent médiatique et peu de résultats concrets. Nous sommes donc, avec ce texte, invités à faire mieux que nos amis allemands, qui sont d'ailleurs en train de remettre l'ouvrage sur le métier. Mark Zuckerberg a déclaré le 10 avril 2018 devant le Sénat américain que Facebook était responsable du contenu diffusé sur sa plateforme bien que l'entreprise ne le produise pas. On peu...
...ar le plus grand nombre de parties à la Convention 108 + – pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel – du Conseil de l'Europe, afin de faciliter la création d'un régime juridique global de protection des données. Dans la lutte contre les contenus haineux sur internet, il faudrait s'en inspirer. Dans sa résolution du 15 juin 2017 sur les plateformes en ligne et le marché unique numérique, le Parlement européen, demandait déjà aux plateformes une attitude proactive afin de « renforcer leurs mesures de lutte contre les contenus en ligne illégaux et dangereux ». Cela fut confirmé par le Conseil européen des 22 et 23 juin 2017, préoccupé par les attaques terroristes dans l'Union européenne et la diffusion de la propagande terroriste en ligne. ...