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...Enfin, restera à notre crédit – je nous considère ici collectivement – l'élaboration d'un droit nouveau, capable de relever les défis de notre temps. La proposition de loi dont nous débattons aujourd'hui, brillamment défendue par Christophe Bouillon, procède de cette intention. Si nous l'adoptons, elle s'inscrira dans la lignée des grandes lois qui ont marqué l'histoire. En lisant le texte sur l'écocide et son exposé des motifs, je me suis dit que nous étions à la hauteur de l'abolition de l'esclavage en 1848, de la levée d'impunité concernant la responsabilité dans la survenue des accidents du travail en 1898 et de l'abolition de la peine de mort en 1981. Ces grands textes, au-delà de leur effectivité, sont de ceux qui fondent une civilisation. Cette proposition de loi est à la hauteur des enj...
...passant par les syndicats, sont mobilisées pour atteindre cet objectif. Madrid devrait voter un texte comparable, Berlin l'étudie. À l'époque, les mêmes réserves nous étaient pourtant opposées sur notre capacité à légiférer avec une ambition extraterritoriale. Nous devons franchir ces obstacles et, ensemble, porter haut les valeurs universelles de notre pays, son humanisme : la pénalisation de l'écocide est une défense de ce que l'humanité a de plus fragile. Dignité humaine et maison commune, même combat !
...s naturels ou des réserves naturelles est une bonne mesure. De même, définir un délit d'imprudence caractérisée en termes d'atteinte à l'environnement constitue une piste intéressante. En effet, il ne s'agit pas d'affirmer que notre droit positif est suffisant – nous prenons un peu plus conscience chaque jour de ses faiblesses. Cependant, le coeur du dispositif du texte, la définition du crime d'écocide, soulève des difficultés. La définition de l'élément matériel n'est pas claire : qu'est-ce en effet qu'un dommage irréversible et irréparable ? S'agissant d'un texte de droit pénal, nous devons être attentifs au respect de certaines conditions tenant à la précision et à la clarté de la loi pénale, qui sont des exigences de nature constitutionnelle. Comment les juges pourront-ils déterminer que l...
...e l'a rappelé Philippe Saint-Marc, « Le coût de la protection du milieu naturel est beaucoup plus faible que le coût de sa reconstitution. La défense de la nature est rentable pour les nations. » Face à cette évidence, je préfère recourir au droit plutôt qu'au fatalisme de l'inaction. De nombreux juristes, tels que Mme Valérie Cabanes, travaillent depuis plusieurs années sur la notion de crime d'écocide. Ce concept pénal repose sur un postulat juste : la nature n'est pas une chose, ce n'est pas un bien meuble, une matière inerte coupée de l'humanité. Je sais que c'est extrêmement difficile à comprendre en Occident car, dans la pensée judéo-chrétienne, le divin n'habite pas le monde, il est hors du monde. La nature n'y est pas divine, c'est une chose créée au service des hommes, asservie aux hom...
...de masse et que les scénarios les plus noirs du GIEC – groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat – se confirment, ce paradoxe perd de son intérêt. Pour qu'il y ait théorie des jeux, encore faut-il qu'il y ait jeu. Or, à ce rythme, la partie sera bientôt finie. Je ne doute pas que beaucoup de têtes bien faites et d'esprits brillants continuent à ricaner lorsqu'on leur parle d'écocide. Je rappellerai simplement ce précepte de Darwin : « Les espèces qui survivent ne sont ni les plus intelligentes ni les plus fortes. Ce sont celles qui s'adaptent le mieux aux changements. »
...apitaux et son patrimoine à court terme. L'urgence écologique est un combat que l'on ne peut mener qu'en assumant collectivement d'identifier et de nommer ses ennemis. Ceux-ci s'appellent notamment Total, Monsanto et Vinci. Il faut les nommer et les punir. Je remercie donc le groupe Socialistes et apparentés de nous permettre d'avoir cette discussion importante pour faire reconnaître le crime d'écocide. Car tout le monde connaît ces écocides, même s'ils demeurent impunis. Ils relèvent de ce que la sociologue Annie Thébaud-Mony a qualifié de « permis de tuer » donné aux transnationales, en citant l'exemple du chlordécone. Tout le monde savait ce qu'il en était depuis au moins 1976, mais cet insecticide a été utilisé dans les Antilles jusqu'en 1993, polluant pour 700 ans les terres et les eaux et...
...r à agir, et à agir mieux. Les auteurs du texte proposent de renforcer le droit de l'environnement en durcissant les sanctions encourues par les auteurs de certaines pollutions et définissent de nouvelles infractions véritablement dissuasives. Je vous ai écoutée, madame la ministre. Selon vous, il existe déjà un arsenal législatif ; mais ce n'est pas parce que nous ferons reconnaître le terme d'écocide que nous ne devrons pas nous appuyer sur le droit environnemental actuel ni le faire mieux appliquer. La proposition de M. Bouillon ajoute quelque chose. J'en veux pour preuve, s'il en était besoin, les sanctions dérisoires prononcées aux termes de l'arsenal législatif existant. Je pense à un exemple que nous devons tous avoir en tête : le groupe Total, mis en cause pour avoir affrété l'Erika, a...
..., elle exige des réponses appropriées. Nous sommes en désaccord avec celle-ci, mais au moins pouvons-nous discuter de ce sujet. La lutte contre la criminalité environnementale est l'une des préoccupations constantes de la majorité ; le Président de la République l'a réaffirmé cet été à la suite des incendies qui ont ravagé plus de 9 millions d'hectares de forêt amazonienne. Les faits qualifiés d'écocide justifient l'élaboration de dispositions internationales. Il s'agit de l'un des objectifs du Pacte mondial pour l'environnement, pour lequel nous sommes mobilisés, et j'observe que la plupart des exemples cités au cours des interventions précédentes sont de dimension internationale. Au niveau national, il importe de souligner que l'arsenal législatif en vigueur permet déjà de répondre à l'ensemb...
...on est extensive et l'absence de ligne de démarcation claire apparaît problématique, compte tenu de la lourdeur des sanctions envisagées – jusqu'à vingt ans de réclusion et 10 millions d'euros d'amende pour une personne physique. Le simple fait que nous cherchions à évaluer la pertinence de ses dispositions illustre les lacunes de ce texte. Par ailleurs, outre le fait que les crimes relatifs aux écocides seraient imprescriptibles, nous ne partageons pas la volonté de consacrer une compétence universelle des juridictions françaises sur les crimes d'écocide commis à l'étranger, à l'instar de celle existant pour les crimes contre l'humanité et pour le génocide. Par conséquent, puisque l'objectif est légitime mais que cet outil n'est pas souhaitable en l'état, que faire ? Pour notre groupe, la mise...
...ses lacunes : les normes sont complexes et leur éclatement entre le droit administratif et le code de l'environnement ne facilite pas le travail des juges. C'est un fait, cette dispersion du droit met à mal son application par les magistrats, et le faible nombre de jugements prononcées donnent le sentiment d'une impunité accordée aux auteurs de ces infractions. Dès lors, la création d'un crime d'écocide est-elle la solution ? Si cette avancée est nécessaire et peut constituer une partie de la solution, elle ne doit pas masquer l'immense travail que nous devons réaliser sur notre droit et sur son effectivité. En l'état, ce texte n'aurait qu'une portée symbolique. Doit-on s'en contenter ? Je ne le pense pas. Qu'ils soient le fait de mafias faisant commerce illégal d'espèces protégées ou de multin...
Madame la ministre, j'aimerais vous remercier : dans vos propos, vous avez été très claire. Ni aujourd'hui, ni demain, vous n'envisagez de reconnaître le crime d'écocide dans le code pénal. Vous l'avez avoué en indiquant d'emblée que vous opposerez à la présente proposition de loi les mêmes arguments que ceux opposés à la proposition de loi défendue par notre collègue Jérôme Durain au Sénat. Pourtant, il ne s'agit pas de la même proposition de loi. Le travail mené à l'Assemblée, ainsi que les auditions que nous avons organisées, ont permis de formuler une défini...
L'été, le Président de la République s'exprime au sujet des ravages provoqués par l'incendie de la forêt amazonienne et utilise le mot « écocide » ; et, lorsque nous nous retrouvons au Parlement pour légiférer, le mot est inapproprié !
...pour l'environnement. Mais chacun en convient, celui-ci est ensablé et n'avance guère. Dans le cadre de la COP25, le gouvernement espagnol a sponsorisé et organisé une réunion à laquelle les représentants français ont participé. Pourtant, nous n'avons pas avancé d'un pas sur ce sujet. Pire : en 1995, la première tentative d'amendement du statut de Rome visant justement à y introduire la notion d'écocide a été balayée, notamment parce que la France s'y était opposée.
Je conclurai en citant une phrase du président Chirac, qui l'a souvent été et que nous connaissons tous : « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs ». Avant de la prononcer en 2002 à Johannesbourg, il avait également dit : « Dans un environnement qui change, il n'y a pas de plus grand risque que de rester immobile ». Madame la ministre, s'agissant de l'écocide, j'ai le sentiment que vous souhaitez rester immobile.