Intervention de Delphine Bagarry

Séance en hémicycle du mardi 30 mars 2021 à 15h00
Lutte contre le dérèglement climatique — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDelphine Bagarry :

« Le changement climatique est l'un des plus grands défis de notre temps. Il change déjà nos vies quotidiennes, à l'échelle mondiale. Chacun d'entre nous est impacté. Et si nous ne faisons rien, nos enfants vont connaître un monde de migrations, de guerres, et de pénuries. » À ces mots, prononcés en juin 2017 par le Président de la République, peuvent être ajoutés d'autres maux dont l'un s'est imposé à nous avec violence : la pandémie de covid-19.

Le dérèglement climatique, la déperdition de notre biodiversité et l'érosion du vivant sont les plus grands défis de notre temps. Ils affectent tout le monde, mais ils touchent d'abord ceux qui sont les plus fragiles en raison de leur condition physique, de leur âge ou de leur environnement de vie.

Si l'enjeu ne peut plus être ignoré, si l'action est devenue si évidente, pourquoi tergiverser, renoncer à l'ambition, accepter des régressions en commission ? Virus de l'immunodéficience humaine – VIH – , épidémie de syndrome respiratoire aigu sévère – SRAS – , fièvre de la vallée du Rift, fièvre jaune, épidémie de chikungunya, grippe A H1N1, grippe aviaire H5N1, virus Ebola, épidémie de dengue, pandémie de covid-19 : par l'emprise humaine sur les habitats sauvages, le XXIe siècle est déjà celui des épidémies, des pandémies et des zoonoses – maladies transmises de l'animal à l'homme. Chaque jour, la pression s'intensifie sur les habitats et le risque sanitaire grandit en raison de la déforestation massive liée à la production d'huile de palme, de l'agriculture et de l'élevage intensif.

En France, 100 000 décès prématurés sont attribués chaque année à la pollution de l'air liée aux énergies fossiles, soit 17,3 % du nombre total des décès. L'exposition à l'humidité, aux moisissures, au manque de luminosité, au bruit et au froid augmente le risque de maladie. En France, les carences de l'habitat touchent 3,5 millions de ménages et privent les enfants des milieux les plus modestes de 2 millions de jours de classe par an. Pire : la précarité énergétique tue. Pour protéger nos concitoyens du mal-logement, le Parlement devrait avoir pour ambition de supprimer toutes les passoires énergétiques, tous les logements classés E, F et G, au lieu de se contenter d'empêcher les hausses de loyers. La lutte contre le dérèglement climatique, la pollution et la précarité énergétique est un enjeu majeur en termes de santé publique et de cohésion sociale, car les plus précaires et les plus fragiles sont les premières victimes de ces phénomènes.

Or le présent texte ne permettra pas d'endiguer cette précarité : il ne va pas assez loin dans les exigences de rénovation énergétique accessible à tous ; il n'a pas l'ambition d'une vraie loi climat. Ce n'est pas moi qui le dis, mais le Haut Conseil pour le climat, qui dénonce un manque d'ambition dans la portée, le périmètre et le calendrier des mesures. Il est pourtant indéniable qu'une loi ambitieuse pourrait produire des bénéfices individuels et collectifs. Une action forte de la puissance publique aurait des effets bénéfiques sur la santé publique mais aussi sur l'économie, par le biais d'une amélioration de la santé et du pouvoir de vivre de nos concitoyens. Le climat, c'est la santé !

À cette tribune, le chef du Gouvernement a affirmé qu'à l'avenir, on fera Prades-Perpignan à vélo. Ce projet de loi traduit-il cette ambition ? La quasi-totalité des 150 amendements déposés en commission sur ce sujet ayant été déclarés irrecevables, on ne peut répondre que par la négative. Il y a pourtant tant à faire : promouvoir l'apprentissage dès le plus jeune âge, rendre obligatoire le forfait mobilités durables, augmenter le montant du fonds vélo. Le vélo représente un enjeu de santé publique, car il permet de lutter contre la sédentarité. Selon certaines études, il permettrait même d'améliorer la productivité des salariés de plus de 20 % : quand on est en forme et en bonne santé, on travaille mieux.

Voilà quelques exemples du manque d'ambition de ce texte : il a beau compter près de 130 articles, il demeure bien insuffisant. Il ne permet pas de changer la donne, de renverser la table ; il n'offre pas la bouffée d'air dont nous aurions besoin. Je fais le voeu qu'ici et bientôt, nous puissions débattre d'une vraie loi pour le climat, et vous invite à vous pencher sur la proposition de loi déposée par Delphine Batho, Matthieu Orphelin et le collectif Écologie démocratie solidarité.

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