Merci monsieur le président.
Sans vouloir faire de l'archéologie fiscale, le STDR est l'enfant légitime de la « cellule de régularisation » de 2009, et, forcément, cette nouvelle version est plus développée que la précédente.
La création de la cellule de 2009, qui a suscité des fantasmes incroyables et des polémiques, tenait à deux raisons. D'une part, la crise rendait l'évasion fiscale encore plus insupportable qu'auparavant. Alors que l'on demandait beaucoup d'efforts aux Français et aux peuples du monde entier, il fallait marquer un coup plus important dans la lutte classique contre l'évasion fiscale. D'autre part, il y avait cette liste étonnante de 3 000 titulaires de comptes en Suisse, ouverts à la banque HSBC, d'ailleurs précédée par d'autres listes moins médiatisées, dont l'une en provenance du Liechtenstein. Évidemment, l'administration fiscale a examiné toute cette liste ; l'idée était non pas d'exonérer ceux qui y figuraient, mais de faire beaucoup plus que des contrôles fiscaux des contribuables français concernés, de lancer une sorte de pavé dans la mare de l'évasion fiscale. Cette cellule, composée d'agents de la DGFiP, a évidemment été saisie de beaucoup de dossiers de comptes en Suisse. Il est intéressant de voir que le STDR en a également reçu beaucoup, avant de recevoir des dossiers d'avoirs détenus dans d'autres pays.
Ne sachant pas où nous allions, il était difficile de fixer un barème, mais, évidemment, les agents avaient des références. Et l'idée était quand même d'attirer les dossiers ; sinon, cela n'avait pas d'intérêt. Cela passait notamment par l'absence de poursuites pénales dans le cas de régularisations se passant correctement. Évidemment, lorsqu'un agent remarquait des infractions pénales graves et caractérisées, Bercy pouvait intenter des poursuites ; un certain nombre de procès ont d'ailleurs eu lieu.
La distinction entre fraudeurs actifs et fraudeurs passifs était aussi importante. Au fond, beaucoup de contribuables avaient hérité d'une fraude, étaient « fraudeurs par héritage ». Certains ne savaient même pas qu'ils avaient hérité d'avoirs non déclarés. L'administration fiscale leur annonçait une bonne et une mauvaise nouvelle : la bonne, c'était qu'ils avaient hérité un compte au Liechtenstein, évidemment non déclaré, de leur grand-père ou de je ne sais qui ; la mauvaise, c'était – pas de chance ! – qu'elle le savait... Les cas de ce type étaient nombreux. Évidemment, il y avait aussi des fraudes plus actives, dans l'organisation de laquelle la personne concernée avait joué un rôle majeur.
L'anonymat était très important. Évidemment, il devait être levé un jour, mais le premier contact était anonyme, via des cabinets de conseil et des avocats. Le contribuable voulait savoir si l'eau était froide ou tiède, si l'administration fiscale n'était pas en train de le tromper, s'il n'allait pas s'enliser dans une histoire sans fin. L'anonymat permettait d'engager la discussion ; ensuite, il était levé. Comme dans le cas des régularisations gérées par le STDR, le rendement était très concentré sur des dossiers importants, aux côtés desquels il y avait une multitude de « petits » dossiers. Évidemment, la déclaration spontanée valait quand même présomption de bonne volonté de la part du déclarant. Dans le même temps, une forte pression internationale s'exerçait pour que soit levé le secret bancaire ; si vous ne levez pas le secret bancaire, cela n'a pas d'intérêt. Il fallait lever le secret bancaire, et aboutir à cet échange de données automatique et global, non pas au cas par cas, l'administration demandant des informations sur tel ou tel contribuable.
Nous y sommes aujourd'hui. La suppression du STDR me semble donc intervenir au bon moment. Ce type de dispositifs ne peut servir que d'amorçage. C'est une bonne idée que d'y mettre fin.
En tout cas, les gouvernements de Nicolas Sarkozy et de François Hollande ont réussi à éviter l'amnistie, et c'est heureux car il n'y a rien de pire : entre deux amnisties, le stock d'évasion fiscale se reconstitue. Il était important de ne pas procéder ainsi.