Madame la présidente, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, il fut un temps, pas si lointain, où la France avait le meilleur système de santé au monde. C'était en 1995 : la France était classée au premier rang des systèmes de santé. Elle est aujourd'hui au vingt-quatrième rang mondial. Vous qui aimez la compétitivité, monsieur le ministre, voilà un domaine dans lequel nous ferions bien d'investir pour maintenir un haut rang mondial. Car notre pays, sixième puissance économique mondiale, est riche. Nous ne sommes donc pas condamnés au déremboursement des médicaments, à un hôpital en « burn-out », à l'inégalité sociale et territoriale dans l'accès aux soins.
Oui, les politiques menées ces dernières années ont eu des conséquences sanitaires néfastes sur la vie quotidienne de millions de Français. Beaucoup d'entre eux se trouvent aujourd'hui désemparés quand leur médecin généraliste est parti en retraite et qu'ils ne parviennent pas à retrouver un médecin traitant près de chez eux, quand ils doivent attendre plusieurs mois pour obtenir un rendez-vous médical chez un spécialiste, quand ils doivent se résigner à payer plus cher un service en clinique privée, faute de place à l'hôpital public, quand ils sont sans solution devant la caisse primaire d'assurance maladie, fermée plusieurs jours par semaine, ou quand ils renoncent à une consultation de prévention, à une paire de lunettes ou à un soin dentaire parce que c'est trop cher.
Notre système de santé est au bord de l'asphyxie, on le sait maintenant. Et pourtant le Gouvernement se lance dans une vaste entreprise de déconstruction radicale et méthodique des protections sociales dans notre pays. C'est un cran de plus, particulièrement violent, dans la destruction de notre système de santé, qui est proposé à travers ce budget. Alors que les besoins de la population grandissent, en raison de l'allongement de la vie, de la démographie ou encore des progrès de la médecine, le Gouvernement diminue les capacités du grand nombre de se soigner.
Comment ? D'abord en remettant en cause le principe même de la Sécurité sociale : le principe de cotisation, selon lequel chacun et chacune cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins. Ce budget poursuit la fiscalisation du financement de la Sécurité sociale, en supprimant les cotisations chômage et maladie, et en augmentant la CSG de 1,7 point, mesure injuste car fondée sur un impôt non progressif, frappant indistinctement tous les citoyens – on l'a beaucoup dit et je le répète.
Mais, malgré vos promesses, tous les Français ne gagneront pas au change – c'est le moins que l'on puisse dire : les retraités, les fonctionnaires et certains indépendants verront leur pouvoir d'achat diminuer. Le Gouvernement s'attaque ainsi au caractère solidaire de notre modèle social et au coeur du programme du Conseil national de la Résistance.
Qui plus est, vous faites supporter à l'assurance maladie l'essentiel des coupes budgétaires. L'objectif national des dépenses d'assurance maladie, l'ONDAM, est fixé pour 2018 à 2,3 %, soit 4,4 milliards de nouvelles dépenses ; mais, dans le même temps, la croissance naturelle des dépenses de santé est estimée à 4,3 %. Sur 5,2 milliards d'euros d'économies annoncées sur les dépenses sociales, le Gouvernement va en faire 4,2 milliards sur la santé : jamais un tel objectif n'avait été visé depuis la création du PLFSS, en 1997.
L'hôpital sera le premier poste touché, avec 1,2 milliard d'économies prévues en 2018. À l'hôpital, les politiques d'austérité se suivent et se ressemblent depuis 2004. Plan hôpital 2007, loi Bachelot – dite HPST – en 2009, plan hôpital 2012, loi de santé de 2016 : au total, une politique d'austérité continue, et qui s'amplifie dans les hôpitaux, lesquels devront faire autant, si ce n'est mieux, avec toujours moins.
À ce sujet, je vous invite à regarder, si vous ne l'avez déjà fait, le documentaire Burning out. Dans le ventre de l'hôpital, de Jérôme le Maire, qui montre la triste réalité d'un hôpital entreprise, d'un hôpital déshumanisé qui induit une véritable souffrance au travail.
Les interventions sont minutées, comme dans les EHPAD ou dans les services de gériatrie, où le personnel se heurte à l'augmentation incessante du nombre de patients. Je pense en particulier aux personnels de l'hôpital René-Muret, à Sevran, avec qui j'ai eu le plaisir, mais aussi la tristesse – tant ce qu'ils me rapportaient était difficile – de discuter. Dans un service de gériatrie, quand le temps est compté, c'est le rapport humain, vis-à-vis de personnes vieillissantes, malades, qui n'est plus possible : on y va, on change, on donne un médicament et on repart.