Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du mercredi 20 mai 2020 à 15h00
Commission des affaires étrangères

Jean-Yves le Drian, ministre :

Je n'ai pas le sentiment que nos opérateurs qui travaillent à l'étranger soient en demande d'une modification des COM, ni que la création d'une nouvelle ligne budgétaire soit nécessaire. Si cela devait néanmoins ressortir du travail de votre commission, je le prendrai en considération.

L'avance de France Trésor, je l'ai déjà dit, devait nous permettre d'aller vite, sans attendre le prochain exercice budgétaire. Ces financements sont destinés à l'ensemble des familles et des établissements du réseau, et leur répartition sera faite selon les besoins par les ambassadeurs. Pour l'heure, nous « sauvons les meubles », nous verrons ensuite les modalités futures d'inscription de ces crédits. Je compte beaucoup sur votre commission pour cela.

Il existe un Centre européen de prévention et de contrôle des maladies, basé à Stockholm. Il n'a hélas pas les moyens de jouer pleinement son rôle. Nous voulons donc lui donner les capacités nécessaires pour agir dans le cadre de l'Europe sanitaire, qui fait consensus, car la mutualisation des recherches et des capacités participe de la protection et de la sécurité de nos concitoyens. En outre, mettre en œuvre l'Europe de la santé ne nécessite pas de modifier les traités.

Nous avons initié, avec le Président de la République, un dispositif de financement ACT-A, qui diffère de la BARDA américaine en ce qu'il repose sur le principe selon lequel le vaccin est un bien public mondial. C'est une innovation considérable et un pas en avant formidable pour la sécurité sanitaire mondiale.

Les modalités de remboursement du plan de relance de 500 milliards ne sont pas encore fixées. Je n'anticiperai pas.

En ce qui concerne l'arrêt de la Cour de Karlsruhe, et la BCE et la Commission ont réagi, la première pour rappeler sa détermination à tout faire pour assurer la stabilité des prix, la seconde pour rappeler la primauté du droit de l'Union et l'indépendance de la BCE dans la mise en œuvre de la politique monétaire, et évoquer une éventuelle procédure d'infraction pour manquement contre l'Allemagne. La Cour de justice a également rappelé sa compétence exclusive pour se prononcer sur la validité des actes de l'Union ainsi que le caractère obligatoire de ses arrêts pour les juridictions nationales.

Des terroristes français ont, en effet, été condamnés à mort par la justice irakienne. J'ai personnellement demandé au Président de la République irakien que la peine capitale ne leur soit pas appliquée.

Je me suis déjà exprimé sur la pointe des Ardennes où les contraintes sanitaires sont très pénalisantes. Nous discutons avec les Belges pour assouplir les contrôles aux frontières, mais je ne peux pas prendre de mesures dérogatoires.

Il y a trente-deux instituts Pasteur dans le monde, dont sept en Afrique. L'institut de Dakar est essentiel pour la réalisation des tests, et celui de Madagascar joue un rôle important pour la surveillance épidémiologique. Nous avons augmenté leurs financements, en particulier pour ceux qui travaillent sur le covid-19.

Dans le cadre de la transformation du franc CFA en eco, le rôle de la France se limitera désormais à celui de garant financier de la zone, la parité fixe et la convertibilité en euro étant maintenues. Le projet de loi devrait être prochainement examiné par le Parlement, concrétisant les engagements pris par le Président de la République à Ouagadougou.

Quant à la révision de la LOP-DSI, personne ne comprendrait qu'elle n'ait pas lieu, mais la pandémie a bousculé l'agenda parlementaire et retarde son examen.

Je ne reviens pas sur ma position concernant une possible annexion d'une partie de la Cisjordanie. Je m'entretiens régulièrement avec Mahmoud Abbas et son ministre des affaires étrangères, comme je m'entretiens avec mes homologues israélien, égyptien et jordanien. Se contenter de paroles incantatoires à l'intention de l'Autorité palestinienne ne suffira pas, il faut faire en sorte que les principes du droit international soient respectés par toutes les parties. Telle est notre position, qui n'a rien à voir, je le rappelle, avec une croisade.

Au Sahel, la zone des trois frontières est le cadre de combats entre des groupes terroristes affiliés à l'État islamique et des groupes liés à al-Qaïda. De tout temps, ces groupes se sont financés grâce au trafic d'essence, d'armes ou de drogue. Les militaires de Barkhane n'ignorent rien de ces opérations, qui s'étendent jusqu'en Libye et au Nigéria. Ils les interceptent dès qu'ils le peuvent, et notre souhait est de les combattre.

Au Burkina Faso, nous sommes vigilants à la manière dont sont traités les prisonniers. Nous avons à plusieurs reprises fait savoir aux autorités burkinabées que toute exaction commise par l'armée était intolérable.

En Afghanistan, il faut saluer l'accord intervenu entre le Pachtoune Ashraf Ghani et le Tadjik Abdullah Abdullah, qui se disputaient le résultat de l'élection présidentielle. Il était urgent que le pays dispose d'autorités régulières, au moment où les Américains négociaient avec les talibans un échange de prisonniers et un retrait progressif de leurs troupes, tandis que les talibans devaient, de leur côté, négocier avec les autorités afghanes. Cette situation complexe avait suscité un fort regain de violence. Souhaitons que le fait qu'Ashraf Ghani prenne la présidence de l'État, et Abdullah Abdullah la présidence du Haut Conseil pour la réconciliation nationale contribue à apaiser les tensions. L'attaque récente de la maternité de MSF montre néanmoins que, pendant la pandémie, le terrorisme continue.

Monsieur Bourlanges, nous allons examiner la situation du ressortissant français qui n'a pu faire partie des 30 000 ressortissants français rapatriés du Maroc.

La réaction de nos partenaires européens, y compris parmi les nouveaux États membres, à l'initiative franco-allemande nous paraît plutôt positive. L'Autriche est la seule à avoir manifesté son opposition. Nous espérons que la force de conviction de l'Allemagne et de la France permettra de rallier l'unanimité.

Entreprendre une réflexion sur les grandes orientations de notre politique étrangère : pourquoi pas ? Le renforcement de la conflictualité entre la Chine et les États-Unis sous n'importe quel prétexte – Taïwan ou l'OMS –, semble malheureusement me donner raison quant à ma vision pessimiste du monde d'après. Face à cela, notre meilleure carte est la multiplication des initiatives multilatérales, qui s'avèrent payantes, qu'il s'agisse de la mise en œuvre du dispositif ACT-A, de la résolution de l'OMS demandant une évaluation des origines de la pandémie et de sa propagation, ou de l'initiative franco-allemande sur le plan de relance.

Il y a eu enfin l'initiative spectaculaire du Président de la République de mobiliser dix-huit chefs d'États européens et africains en faveur de l'Afrique où, fort heureusement, la pandémie ne s'est pas développée comme on le craignait. Pour autant, l'Afrique souffre de la pénurie alimentaire provoquée par l'interruption des échanges. C'est pourquoi la France a lancé l'idée d'un pont aérien humanitaire européen destiné à la distribution de produits alimentaires et de matériel sanitaire. Le premier vol a eu lieu il y a dix jours vers la République centrafricaine ; une trentaine d'autres sont programmés tout au long du mois de juin.

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