Intervention de Nassif Hitti

Réunion du mercredi 10 juin 2020 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Nassif Hitti, ministre des affaires étrangères et des émigrés du Liban :

. On peut ne pas être d'accord avec l'idéologie du Hezbollah ou certains hommes politiques du Hezbollah mais cela reste un parti libanais qui a joué un grand rôle dans la résistance et qui a été créé au moment de l'occupation israélienne du sud du Liban. Permettez‑moi de vous rappeler également que l'occupation, le fait de nier le droit à un peuple – le peuple palestinien – à avoir sa nation et à avoir un État est constitutif d'un terrorisme structurel. Nous sommes allés nous‑mêmes très loin, dans les efforts, dans les démarches – je parle du Liban et des pays arabes – pour créer cette paix‑là. Je reviens à nouveau à l'initiative de paix arabe de Beyrouth de 2002. C'est la normalisation et l'acceptation par tous les pays de la région – incluant Israël – qui permettront de tourner la page et de donner aux Palestiniens le droit à l'autodétermination et d'avoir leur État. Le plan de paix est toujours sur la table et nous espérons que demain nous irons dans cette direction pour avoir un nouveau Moyen‑Orient de coopération, de fraternité, basé sur le respect de chaque pays, en incluant Israël, sur la fin des territoires libanais encore occupés, du Golan et d'autres. Certains me parlent des relations avec le président syrien Bachar el‑Assad : à un certain moment, tous les pays avaient ces relations. Je tiens simplement à le rappeler. On peut critiquer ce qu'on veut critiquer, chacun est libre, mais il faut s'intéresser aux causes profondes et structurelles de chaque problème, démarche qui permettra de mettre un terme à toute radicalisation dans la région.

Pour ce qui est des problèmes économiques, je reviens un peu sur ce sujet, vraiment, c'est une situation désastreuse. La France peut nous apporter son soutien. Entre autres, nos amis français, sénateurs, députés et autres, peuvent aider l'ambassade du Liban à Paris, qui va créer une caravane humanitaire pour le Liban. Il faut sensibiliser nos amis français, la population française qui est très sensible, bien sûr. Il y a les franco‑libanais qui sont, je considère, des acteurs majeurs dans les relations entre nos deux pays, qui sont des passerelles entre nos deux pays pour essayer d'apporter plus d'aide humanitaire au Liban, dans tous les domaines. Ce sont des choses assez importantes, vraiment, à souligner, à indiquer. La France peut nous aider beaucoup aussi, comme je le disais, à travers l'Union européenne, à travers les Nations unies, comme elle le fait déjà concernant la FINUL. Mais on attend toujours plus d'un ami qu'on considère comme un ami privilégié, un partenaire privilégié. Nous sommes toujours à l'écoute. Nous ne venons pas avec des idées précises, mais nous venons toujours avec une ouverture, nous souhaitons écouter, entendre, débattre et développer certaines politiques communes ou certains partenariats ou demander un certain appui mais en s'ouvrant entièrement sur des idées, des suggestions de nos amis.

Pour ce qui est des compagnies françaises, je comprends très bien la question. La France a déjà un avantage au Liban : c'est cette relation historique. Ces relations, qui ne sont pas simplement des relations entre deux États mais ce sont des relations sociétales. Nous avons le plus grand nombre d'élèves libanais à l'étranger qui étudient en France. La communauté franco‑libanaise a toujours joué et joue un rôle très important dans les relations entre nos deux pays. Je pense, et je reste sûr, que ces compagnies trouveront vraiment la possibilité d'œuvrer et d'avancer dans le pays, mais nous sommes actuellement dans un état de crise.

Concernant la question des découvertes pétrolières et gazières. La chute du prix du pétrole peut ralentir ce processus. Mais, à mon avis, cela a toujours été notre politique au Liban, bien avant notre gouvernement : si demain il y a des problèmes avec un certain pays qui essaye de s'étendre ou d'étendre son influence ici et là, la diplomatie sera mobilisée régler ce problème‑là et, si la diplomatie directe ne fonctionne pas, reste le droit international des Nations unies. Certains disent : « ce n'est pas très efficace », mais nous n'avons que ce chemin, le chemin de la diplomatie, mais le chemin, aussi, du droit international pour pouvoir avancer.

Pour ce qui est du FMI et aussi de l'aide de CEDRE, nous considérons qu'ils se complètent entièrement. Le passage par le FMI, je le dis en toute franchise, est un passage obligé. On va réussir dans nos négociations avec le FMI. Je reste sûr et confiant. Ce n'est pas une chose facile. Mais on sera accompagné par nos amis, pays et organisations internationales, et par nos relais dans la société civile. Ce processus facilitera la tâche, par la suite, pour la mise en œuvre des projets de CEDRE. Le temps est l'ennemi de la situation au Liban. Il faut que nous avancions très vite et d'une manière très courageuse et c'est pourquoi nous tendons nos mains en direction de nos amis qui souhaitent nous venir en aide, pour discuter avec nous. Je ne demande pas de l'aide financière, économique mais seulement diplomatique. Je demande l'aide dans le sens du dialogue : dialoguer avec nous sur ce que vous considérez que nous pouvons faire de mieux et comment nous pouvons faire évoluer la situation.

Le Caesar Act américain est un texte qui vise en premier la Syrie. Mais, bien sûr, je pense qu'il y aura des répercussions pour certains acteurs, que ces acteurs soient des compagnies ou des individus au Liban et nous nous pencherons sur ces questions pour voir la meilleure manière de ne pas avoir des implications négatives pour les Libanais, dans le droit libanais, dans le respect du droit du Liban, de l'indépendance du Liban et de la souveraineté du pays.

Sur le rôle des femmes et la place des femmes au Liban, en tant que citoyen libanais, avant d'être un officiel libanais, je m'inscris entièrement dans ce que vous venez de dire. Bien sûr, la situation de la femme doit évoluer. Il y a tous ces problèmes qui résident dans une situation socio-culturelle particulière, mais il y a vraiment eu des avancées. Je ne dis pas cela parce que je suis un officiel. Il y a eu des avancées, il y a des avancées. Actuellement, par exemple, six ministres femmes sont membres d'un gouvernement de vingt ministres. Je reconnais cette situation terrible, pénible, inacceptable et on fait de notre mieux pour faire avancer les choses. Cela, je peux vous le garantir. Je promets de faire ce que je peux. Si je ne réussis pas, je resterai engagé sur cette voie. Je suis entièrement sensible et entièrement engagé, ceux qui me connaissent personnellement le savent déjà, sur la question de l'égalité homme‑femme.

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