Intervention de Aina Kuric

Réunion du mercredi 21 octobre 2020 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAina Kuric :

Dans un contexte international instable et incertain, marqué par la multiplication des zones de crises et de conflit, la mission Action extérieure de l'État confiée au ministère de l'Europe et des Affaires étrangères est au cœur de la diplomatie d'influence de la France. Tout au long du confinement, le programme 151 a même été au cœur de l'action du Quai d'Orsay, alors que bien souvent nous échappe le fait que près de 3,5 millions de nos compatriotes vivent à l'étranger. À ce titre, nous ne pouvons que nous réjouir de la réapparition, lors du dernier remaniement, d'un secrétariat d'État aux Français de l'étranger également en charge du tourisme et de la francophonie. Ce fut un signal important adressé à la communauté française qui réside à l'international.

Il est souvent commun de parler du caractère universel de notre réseau diplomatique et consulaire, avec ses 160 ambassades, ses 89 consulats généraux et consulats ou ses 112 sections consulaires d'ambassade, sans que l'on puisse en appréhender toute la dimension. Or nul autre pays que la France ne peut se targuer d'avoir pu permettre le retour de plus de 370 000 de ses citoyens, qui se sont retrouvés du jour au lendemain bloqués partout dans le monde sans aucune possibilité de rapatriement. Notre ministère de l'Europe et des affaires étrangères a fait preuve d'ingéniosité et de disponibilité pour répondre à un certain nombre de situations dramatiques, pour lesquelles nous avons presque tous été sollicités dans nos circonscriptions.

Nos compatriotes ont ainsi pu mesurer tout l'engagement de nos diplomates en général, et de nos agents consulaires en particulier. Avec un total de 136 millions d'euros hors dépenses de personnel, les moyens de l'action consulaire s'en trouvent ainsi stabilisés. Les conséquences économiques de la pandémie sur les Français de l'étranger ont fait l'objet de mesures budgétaires anticipées avec l'adoption de la loi de finances rectificative de juillet 2020. Ainsi, 100 millions d'euros additionnels ont été ouverts dans le programme 151, dont 50 millions pour l'aide à la scolarité et 50 millions pour le financement d'un secours occasionnel de solidarité à nos compatriotes de l'étranger affectés par la crise sanitaire.

Ces aides ont été plus que salutaires pour notre réseau d'établissements français à l'étranger et pour les parents d'élèves. En effet, fin septembre, le budget annuel de l'enveloppe de bourse a été intégralement consommé, alors qu'habituellement le ratio est de 70 % à la même époque. Cet exercice a été mené conjointement par l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger, l'AEFE, et les postes consulaires, dans un souci constant de rigueur et d'humanité face à une précarisation de certains Français privés de revenus depuis le mois de mars et ne pouvant bénéficier des mêmes plans d'aide que leurs concitoyens de l'hexagone.

Le PLF 2021 porte donc la dotation pour les affaires sociales à 20 millions. Elle est en hausse de 17 % par rapport à l'année 2020. Dans le même temps, l'enveloppe des bourses, qui favorise la scolarisation des enfants français, est maintenue à 105 millions d'euros. Ces deux lignes budgétaires sont amenées à évoluer pendant la gestion de l'exercice 2021. En effet, au regard de l'évolution de la pandémie, les moyens nécessaires à la poursuite du soutien de nos compatriotes à l'étranger doivent être actualisés pour coller au plus près des besoins, alors que la situation diffère d'un pays à l'autre.

La crise sanitaire a impacté le bon déroulement de notre démocratie. Ce fut le cas pour les élections municipales sur le territoire national, mais également à l'étranger pour les élections consulaires, différées aussi en raison de la pandémie. Le programme bénéficiera d'un report pour 2021 des crédits votés en 2020. Ce contretemps doit toutefois accélérer notre réflexion sur la mise en place du vote électronique, prévu pour ces élections. Il s'agit là d'une véritable urgence démocratique, à l'heure où d'élection en élection, le taux d'abstention ne cesse d'augmenter, celui-ci étant encore plus fort à l'étranger en raison en partie des contraintes de déplacement pour accéder à un bureau de vote, dans certains pays aussi vastes que des continents.

Je profite de l'occasion qui m'est donnée pour saluer le travail quotidien, souvent méconnu, des élus consulaires auprès de nos compatriotes. Ils ne comptent pas leurs heures de présence au plus près de la communauté française alors que les enjeux éducatifs, sécuritaires, environnementaux, culturels ou économiques se multiplient.

Ainsi, il nous faut poursuivre les réformes de modernisation de l'administration consulaire. La mise en place, à titre expérimental, d'une plateforme d'accueil consulaire a été différée de 2020 à 2021 en raison de la crise sanitaire, alors que l'avancement du projet de registre de l'état civil électronique devrait permettre de dégager une économie d'un demi-million d'euros.

Dans le cadre du plan de relance, il paraît important d'intégrer pleinement cette communauté de 3,5 millions « d'ambassadeurs du savoir-faire français » qui a souvent tendance à se sentir oubliée. Les données disponibles quant aux transferts de fonds des Français de l'étranger vers la France montrent que ceux-ci sont souvent sous-estimés. Ils représentaient 24 milliards d'euros en 2016. Ils sont en augmentation régulière, comme a pu le rappeler notre collègue Anne Genetet dans son rapport relatif à la mobilité internationale des Français, remis en juin 2018 au Gouvernement. L'importance de ces rentrées d'argent sur le sol français ne peut être négligée. Cette richesse doit participer activement à l'économie française. Il faut donc proposer des solutions et faciliter au mieux ces transferts d'argents.

L'Europe et l'international sont profondément ancrés dans l'ADN du groupe Agir Ensemble. Dans le cadre du plan de relance, nous avons ainsi présenté au Premier ministre six propositions relatives aux affaires étrangères, dont la n° 17 qui concerne tout particulièrement les Français de l'étranger en suggérant de créer un label francophone dédié aux entreprises de la diaspora française – « Entrepreneurs du Monde » – qui permettrait de faciliter leur accès au financement bancaire.

Notre groupe propose même d'aller plus loin en avançant l'idée d'une convention des Français de l'étranger, sur le modèle du Ségur pour la santé ou du Grenelle pour le travail, qui pourrait être organisée très prochainement afin de réunir tous les acteurs politiques, associatifs, administratifs ou encore civils qui traitent du sujet.

Pour y faire leurs études ou y occuper un emploi, les Français n'ont jamais été aussi nombreux à vivre à l'étranger. Loin des fantasmes qui leur sont souvent accolés, ils constituent une richesse indéniable pour la France et nous offrent souvent un regard différent sur notre pays à l'image de l'ancien Président de notre Assemblée, Jacques Chaban Delmas, qui disait « aller en Chine pour mieux voir la France et ses problèmes ».

Pour la première fois depuis vingt ans, le Quai d'Orsay ne connaîtra pas de baisse de ses effectifs. Attentif à ce que cette conjoncture soit pérennisée voire amplifiée dans les prochains PLF, le groupe Agir Ensemble votera les crédits de la mission Action de la France en Europe et dans le monde.

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