Merci, monsieur le rapporteur, pour votre rapport très complet. Les deux textes que nous examinons aujourd'hui doivent permettre de revisiter des conventions devenues obsolètes. Les conventions d'extradition sont essentielles mais elles doivent être examinées attentivement car elles sont lourdes de conséquences. Nous devons être vigilants quant au respect des droits fondamentaux dans les processus d'extradition. À ce titre, les articles 5 des deux conventions d'extradition disposent que l'extradition est refusée si l'infraction commise est punie par la peine capitale, sauf si la partie requérante donne des assurances jugées suffisantes par la partie requise que cette peine ne sera pas requise et que, si elle est prononcée, elle ne sera pas exécutée.
Si la peine de mort a été abolie au Burkina Faso, elle reste en vigueur au Niger même si aucune exécution n'a eu lieu depuis 1976. Cependant, en mars 2019, la cour d'assises de Zinder a condamné un homme à la peine de mort pour assassinat. Monsieur le rapporteur, quelle suite a-t-il été donné à cette sentence ?
Enfin, ces quatre conventions doivent permettre de lutter plus efficacement contre les réseaux internationaux de criminalité et le terrorisme. Si ces conventions doivent avoir ce rôle, la lutte contre le terrorisme dépend surtout de nos actions de développement, qui doivent être concrètes dans cette région du monde. Je suis revenue avant-hier d'un déplacement au Burkina Faso où la situation est très inquiétante. Plus d'un million de personnes ont été déplacées, des centaines d'écoles sont fermées, l'économie informelle est en pleine expansion, les zones de non-droit se propagent inexorablement. Tous nos interlocuteurs nous ont alertés. Seules certaines ONG continuent à intervenir physiquement dans des zones très rouges où seules les entreprises locales peuvent se maintenir. Je salue, à cet égard, le travail d'un Franco-Burkinabè, Patrice Chevalier, qui, depuis trente-cinq ans, alimente les villages en eau et en électricité, au Burkina, au Mali, au Niger, jusque dans les zones les plus difficiles.
Nous devons intensifier et accélérer nos efforts pour mettre au point, le plus vite possible, des outils d'intervention opérationnels pour les populations, sinon nous resterons impuissants face à des forces qui défendent un modèle contraire à nos aspirations et à celles des populations mais qui apportent opportunément des réponses à leurs besoins essentiels et vitaux. Ce sont, hélas, des forces criminelles, qui prolifèrent dans les zones de non-droit. Les problèmes structurels doivent être résolus sur le long terme et nous devons soutenir tous les efforts en faveur de la démocratie. Précipiter l'investiture de dirigeants élus au mépris de la Constitution de leur pays ou qui risquent de l'être à travers des processus électoraux entachés d'irrégularité, comme l'a fait notre ministre des affaires étrangères en Côte d'Ivoire ou au Niger est, à mon sens, une grave erreur dont nous déplorerons très bientôt les conséquences. Apporter une légitimité aux manquements avérés à l'État de droit par un soutien affiché crée un immense ressentiment. En contribuant à l'affaiblissement de la démocratie, conjugué au recul de la sécurité et l'absence de services publics efficients sur le territoire, nous accélérons la survenue de ce que nous passons notre temps à dénoncer et redouter : une immigration massive, la montée des actes terroristes ou criminels, l'aggravation des ressentiments, l'explosion de la cohésion sociale. Les conventions d'extradition, si elles sont nécessaires dès lors qu'elles respectent les droits fondamentaux, n'y pourront pas grand-chose.