Monsieur le secrétaire d'Etat, bravo pour votre ténacité et celle du Gouvernement. Vous avez mené à bien cette bataille économique, juridique et politique. Ma question concernera les droits de l'Homme et le règlement du Parlement européen, plus particulièrement le mécanisme de surveillance des droits. Je suis inquiet car le débat que nous menons actuellement à Paris ou à Bruxelles n'est pas du tout le même que celui qui se tient à Varsovie ou à Budapest.
À Budapest, le Premier ministre Viktor Orbán décrit ce débat comme une lutte pour la liberté de son peuple contre Bruxelles qui voudrait envoyer en Hongrie des centaines de milliers de sans-papiers et étendre en Hongrie et en Pologne les droits des LGBT. Il ajoute que ce combat est mené contre l'expérience sociologique ratée des sociétés ouvertes et multiculturelles de l'ouest, qui serait largement entretenue par un réseau d'agents payés par M. Soros.
Il présente donc le résultat de ce règlement comme une grande victoire et la validation de ce qu'il appelle l'État de droit, à savoir un régime autocratique corrompu qui réprime les libertés. Je m'inquiète donc de l'effectivité de ce règlement.
Au-delà d'une protection de l'État de droit en général, le mécanisme peut-il être utilisé si les intérêts financiers de l'Union européenne ne sont pas en danger ? L'Union européenne aura-t-elle les moyens d'agir si le gouvernement hongrois continue de brimer les médias indépendants. Pourra-t-il le faire sans conséquence financière ?
Il est par ailleurs prévu que, si le règlement était attaqué devant la Cour de justice, la Commission devrait attendre les conclusions des juges pour arrêter ses modalités de mise en œuvre. Hongrie et Pologne pourraient-elles ainsi reporter de plusieurs années sa mise en œuvre, par exemple après les élections législatives de 2022 en Hongrie ?
Le mécanisme ne s'applique pas aux paiements qui seraient décaissés dans le cadre de l'actuel cycle et se limite au cycle 2021-2027. Les fonds du cycle qui s'achève en 2020 mais ne seront déboursés qu'en 2021 seront-ils exemptés du mécanisme de l'État de droit ?
Aujourd'hui, je ne suis pas certain que nous ayons gagné la bataille de l'opinion des démocrates en Hongrie et en Pologne. La propagande d'État, dans ces pays, a rapporté le résultat des discussions sur un ton euphorique. Je crains que, si ce mécanisme tarde à être mis en œuvre, alors que l'État de droit est régulièrement violé dans ces pays, leurs gouvernements gagnent sur deux points : ils pourront agir comme aujourd'hui et affirmer qu'ils respectent l'État de droit puisqu'ils ne sont pas condamnés. Rassurez-nous.