Intervention de Pierre Moscovici

Réunion du mercredi 3 février 2021 à 14h30
Commission des affaires étrangères

Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes :

Je suis très heureux d'intervenir devant vous à plusieurs titres. Premièrement, le renforcement de la dimension européenne et internationale de nos travaux est pour moi un axe prioritaire, tout comme le développement de liens plus étroit avec le parlement. Deuxièmement, je connais bien votre commission, y étant intervenu à plusieurs reprises, d'abord comme ministre des affaires européennes, plus récemment comme ministre de l'économie et des finances, et comme commissaire européen. Enfin, je fus membre de cette commission entre 2007 et 2009.

Évidemment, je n'ai pas compétence pour m'exprimer sur le fond du projet de loi et pour commenter à chaud la politique du gouvernement. Ce n'est pas mon rôle et je ne le ferai pas. En revanche, j'aborderai les deux sujets du contrôle et de l'évaluation, car la Cour exerce ces deux activités. J'exposerai en un premier temps les travaux de la Cour portant sur le périmètre de la commission. Je présenterai ensuite les avantages que pourrait présenter son rattachement à la Cour des comptes si vous le décidez.

La Cour a établi cinq rapports depuis 2018 sur l'aide publique au développement. Le principal rapport concerne le groupe Agence française de développement lui-même, qui a fait l'objet d'une insertion spécifique dans notre rapport public annuel en 2019. Ce groupe comprend l'Agence et sa filiale Proparco. Il est aujourd'hui l'opérateur pivot de l'aide bilatérale française, et reconnu comme tel. Depuis une quinzaine d'années, il s'est beaucoup s'est développé, grâce à une augmentation notable de ses ressources propres et à un renforcement régulier de son assiste financière par l'État. Son directeur général monsieur Rioux a beaucoup agi en ce sens. Notre rapport expose différentes voies d'amélioration relative à la gestion et à l'organisation de l'Agence française de développement. Il souligne d'abord que sa soutenabilité financière dépendra à l'avenir de sa capacité à maîtriser ses charges, notamment de personnel. Notre rapport appelle d'une part, à refondre le statut de ces personnels, dont le régime de rémunération est assez coûteux et d'autre part, à moderniser ses systèmes d'information. Il souligne aussi que le maintien de son efficacité économique et la qualité de son portefeuille financier sont déterminants. Le prêt devrait demeurer dans les années à venir l'instrument privilégié de financement du développement.

Vous avez évoqué le pilotage de l'Agence française de développement. Dans une enquête menée en 2010, la Cour avait pointé les insuffisances du pilotage interministériel. Elles demeurent pour nous d'actualité en 2019. Le rapport recommande une réunion au moins annuelle du comité interministériel de coopération internationale et du développement (CICID). Ces recommandations sont émises depuis sa création en 1998. Il importe maintenant de soutenir son plein déploiement, ainsi que celui du conseil d'orientation stratégique qui accompagne l'AFD dans la définition de sa stratégie. Nous plaidons également pour doter les instances de gouvernance du groupe de compétences plus diversifiées, notamment bancaires et financières pour l'agence, ou d'expertise et de développement pour Proparco. Le rapport souligne enfin la nécessité d'une plus grande intégration de l'AFD et de Proparco dans les réseaux économiques et diplomatiques français. Il préconise de renforcer la capacité de l'AFD à évaluer les résultats des projets qu'elle a financés, et plus globalement sa contribution aux objectifs de l'aide publique au développement française. Je précise que nous avons inscrit au deuxième semestre de l'année 2021 un contrôle de la fonction d'évaluation au sein de l'Agence française de développement.

En sus de cette enquête sur le groupe AFD, mon prédécesseur Didier Migaud a adressé en 2019 au premier ministre un référé qui portait sur la contribution de la France au fonds vert pour le climat. Ce contrôle complétait celui par la Cour en 2015 sur le fonds mondial de lutte contre le SIDA, la tuberculose et le paludisme, et celui de 2018 sur le fonds européen de développement.

Le fonds vert pour le climat est né en 2009 pour aider les pays en développement à atténuer les effets du changement climatique et à adapter leurs économies en conséquence. Il a été installé en Corée du sud en 2012. Il a fallu attendre 2015 pour que les pays donateurs effectuent les premiers versements et 2016 pour que les projets agréés bénéficient des premiers décaissements. En 2014, le président de la République François Hollande s'était engagé à faire contribuer la France à hauteur d'un milliard de dollars entre 2015 et 2018, soit près de 780 millions d'euros. Cela correspondant à 10 % du montant total des promesses. L'engagement a été tenu sous deux formes : un prêt concessionnel de 285 millions d'euros, que l'Agence française de développement a versé en 2017 avec une bonification d'Etat ; et un don de 489 millions d'euros que le fonds de solidarité pour le développement a versé en plusieurs tranches jusqu'en 2018. La France est aujourd'hui quatrième donateur du fond. Elle est membre de son conseil et donc pleinement légitime à s'assurer de l'emploi des contributions au plus près de l'objet du fond. Dans son référé, la Cour a attiré l'attention du gouvernement sur les délocalisations coûteuses des réunions du conseil du fond, ainsi que sur la nécessité de maîtriser les coûts élevés d'instruction et de gestion des actions financées. Le fonds vert approuve les projets, mais en confie l'exécution à des agences de développement qu'il agrée, dont l'AFD. L'addition des coûts de gestion peut sembler disproportionnée dans certains cas par rapport au bénéfice final pour les économies locales. La Cour ajoute qu'il est également important de s'assurer du caractère complémentaire et concordant des financements multilatéraux de la France en faveur de l'environnement et du climat, de façon à ce que les priorités de la France se reflètent dans celles du fonds vert pour le climat.

Un autre fonds fait l'objet d'un travail de la Cour remis aux assemblées parlementaires l'année dernière. Il s'agit du fonds d'investissement et de soutien aux entreprises en Afrique. Créé par Nicolas Sarkozy pour soutenir les PME africaines, le FISEA a été doté de 250 millions d'euros et c'est le premier fonds d'impact français doté en capital. Il avait pour objectif de créer ou soutenir 100 000 emplois et de regrouper 1 milliard d'euros d'investissements. Il s'agit d'un instrument financier assez original, à mi-chemin entre subvention et fonds de capital. Il revêt la forme d'une société par actions simplifiées, dont la gestion est assurée par Proparco. L'intégralité du capital n'a été libérée que fin 2019. Notre rapport fait état d'une distribution des investissements certes diversifiée, mais trop orientée vers l'Afrique orientale anglophone. En outre, l'objectif de parité entre le nombre des investissements directs dans les entreprises et les prises de participation dans d'autres fonds n'est pas respecté. Le bilan financier des dix dernières années, en perte de 80 millions d'euros, nous est apparu décevant. La Cour, constatant que l'activité du fond est rentable pour Proparco, recommande aussi de mieux mesurer la création d'emplois directs et indirects liée à l'intervention du FISEA, notamment au moyen d'évaluations contrefactuelles.

J'en viens au quatrième rapport. En 2020, la Cour a mené à la demande du Sénat une enquête sur le pilotage stratégique des opérateurs du ministère de l'Europe et des affaires étrangères. Une large part de cette enquête a été consacrée à l'aide au développement. Le rapport souligne la nécessité d'une plus grande coordination tant entre les directions du ministère qu'avec les autres ministères compétents et avec les opérateurs eux-mêmes. Cela répond indirectement à la question que vous posiez concernant les tutelles et illustre la progression de la force de frappe de l'Agence française de développement. L'élargissement de ses périmètres géographique, thématique et sectoriel lui permet de couvrir l'ensemble du champ de la coopération et de la solidarité internationale. Elle apparaît à la Cour des comptes comme l'héritière institutionnelle de l'ancien ministère de la coopération.

La Cour pointe plusieurs défaillances du dispositif de pilotage stratégique de l'AFD, déjà mises en évidence lors de son contrôle de la direction générale de la mondialisation en 2018. Elles se traduisent par l'absence de contrats d'objectif et de moyens, de lettres de mission du directeur général, ainsi que par l'absence de révision depuis 2007 de la convention régissant les relations financières entre l'État et l'AFD. Par conséquent, la Cour recommande la mise en place d'une instance de pilotage stratégique au niveau des tutelles de l'AFD, ainsi qu'un meilleur encadrement de l'activité de don financée sur crédits budgétaires. La Cour a également émis des réserves quant au rapprochement d'Expertise France et de l'AFD prévu prochainement. Cette opération ne doit pas conduire à amoindrir la capacité du ministère de l'Europe et des affaires étrangères à orienter et à contrôler les travaux d'expertise internationale.

Nous formulons régulièrement, dans nos notes d'exécution budgétaire, l'observation suivante : en 2019, le montant total des crédits de la mission d'aide publique au développement s'élève à 4,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 3,8 milliards d'euros en crédits de paiement. La mission est interministérielle, regroupant le ministère de l'Europe et des affaires étrangères et le ministère des finances. Elle ne représente que 42 % de l'effort budgétaire de l'État en matière d'aide publique au développement, le reste étant réparti dans vingt-deux autres programmes budgétaires, notamment au sein des missions actions extérieures de l'Etat ou en prêts à des États étrangers. Cela soulève trois grandes difficultés. La première est la soutenabilité budgétaire, c'est-à-dire la reconstitution des fonds multilatéraux, et notamment le doublement de notre contribution au fonds vert pour le climat. La deuxième difficulté est liée à l'importance des crédits extrabudgétaires. Dans tous ses travaux effectués sur le budget de l'État, la Cour déplore depuis plusieurs années cette tendance qui porte atteinte au principe d'unité et d'universalité budgétaires dont nous sommes les gardiens. S'agissant de la mission Aide publique au développement, ces crédits extrabudgétaires proviennent de la taxe sur les billets d'avion et de la taxe sur les transactions financières françaises. Nous attentons toujours l'établissement d'une taxe européenne, projet auquel j'ai ardemment travaillé dès 2013 lorsque j'étais ministre, puis pendant cinq ans en tant que commissaire européen. Quoi qu'il en soit, la tendance s'est inversée en 2019 avec la réintégration au sein de la mission de 270 millions d'euros issus du produit de la taxe sur les transactions financières. La troisième difficulté est une efficacité insuffisante de la fonction évaluation au sein de l'AFD, au regard des montants envisagés.

De manière générale, la Cour des comptes a abordé ces dernières années l'aide publique au développement dans plusieurs travaux d'envergure qui mobilisent des équipes nombreuses et indépendantes. Les enquêtes conduites viennent compléter les anciennes et elles nourrissent de futurs travaux d'instruction. Elles permettent d'aborder le sujet de façon globale et d'entretenir une expertise de longue date sur le sujet. La fonction de contrôle est importante à la Cour et elle persistera. Nous sommes en train de mener une enquête sur la contribution de la France en matière d'APD dans le domaine de la santé. Elle aborde notamment la lutte contre les grandes épidémies, le renforcement des systèmes de santé et la gouvernance sanitaire dans les pays bénéficiaires. Le rapport sera prolongé au second semestre 2021 par l'examen de la présence française dans les institutions internationales en charge de la santé, en particulier l'OMS.

Tous les travaux que j'ai présentés défendent au fond deux convictions. Premièrement, l'aide publique au développement est d'une importance cruciale pour les pays concernés, notamment au niveau multilatéral. Cela fait partie intégrante du rayonnement de notre pays et de son devoir, presque moral, à l'égard du sud. Deuxièmement, il convient d'être très attentif à l'efficacité de cette aide en évaluant ses impacts directs et indirects. Il est préférable de raisonner en termes de résultats concrets et durables plutôt qu'en termes d'enveloppes allouées. Au regard des enjeux qu'elle défend, le climat, la santé, l'éducation et les inégalités, l'aide publique au développement ne peut pas se permettre de ne pas atteindre ses objectifs. C'est pourquoi l'évaluation et le contrôle sont les deux faces d'une même pièce.

J'en viens ainsi à la commission indépendante d'évaluation prévue par le projet de loi de programmation. Du fait de sa mission constitutionnelle d'évaluation des politiques publiques, la Cour des comptes souscrit à la nécessité d'une évaluation renforcée de la politique de développement. Elle l'a appelée de ses vœux dans plusieurs de ses travaux. Dès lors, la Cour des comptes ne peut que saluer l'objectif porté par le projet de loi. La commission d'évaluation existe déjà dans d'autres pays, notamment au Royaume-Uni et en Allemagne. Je pense comme vous, monsieur le député, que la politique de développement ne peut pas échapper plus qu'une autre à l'exigence accrue de redevabilité. J'ai moi aussi la conviction que la redevabilité peut devenir un axe stratégique. La place que vous lui accordez dans votre projet de loi me semble tout à fait bienvenue.

Le projet de loi est actuellement discuté dans votre assemblée. Je sais que parmi les dispositions à clarifier figure l'organisme de rattachement de la commission d'évaluation. Les débats de votre commission et de l'assemblée sont souverains. Mon rôle n'est pas de participer à vos échanges, mais je peux contribuer à les éclairer. Dans cette perspective, je souhaiterais présenter les différents avantages que présenterait une commission indépendante d'évaluation de la politique de développement rattachée à la Cour des comptes. Le premier serait de faire bénéficier la commission de l'expertise de la Cour sur les sujets se trouvant au cœur de son activité. Cette expertise s'exerce aussi bien dans le contrôle et l'audit des fonds publics que dans l'évaluation des politiques publiques. La mission nous en a été confiée par la constitution en 2008 dans le cadre de notre rôle d'assistance au parlement et au gouvernement. L'évaluation complète depuis lors nos missions plus historiques que sont le contrôle juridictionnel, la certification des comptes publics et le contrôle de gestion des organismes publics. Ces missions traditionnelles sont précieuses pour l'évaluation, car elles nous offrent une connaissance intime des acteurs publics, et la capacité à travailler de manière interdisciplinaire. Nous avons progressivement bâti notre propre méthode d'évaluation, exercée dans le respect des principes fondamentaux d'indépendance, de collégialité et de contradiction qui s'attachent à l'ensemble de nos travaux. Travailler avec la Cour des comptes est une garantie d'indépendance absolue. Le choix a été fait de ne pas confier exclusivement l'évaluation à une chambre spécialisée. Elle s'exerce ainsi de manière transversale, c'est-à-dire que chacun peut faire de l'évaluation à la Cour des comptes. Dans le cadre du projet stratégique que je prépare pour la Cour, je souhaite que nous multipliions par cinq les ressources que nous consacrons à l'évaluation durant les cinq années qui viennent. Elle représente aujourd'hui 4 à 5 % de nos missions. Je souhaite faire croître ce taux à 20 % dans cinq ans. Nous confrontons régulièrement notre méthode avec celles d'autres institutions supérieures de contrôle. Nous présidons notamment le groupe de travail sur l'évaluation des politiques publiques de l'INTOSAI. Cette organisation anime en particulier des formations sur ce thème.

La Cour des comptes s'est par ailleurs dotée d'un guide méthodologique dédié à la conduite de projets. En matière d'analyse quantitative, nous comptons désormais une équipe importante de data-scientists. Nous avons noué plusieurs partenariats avec des laboratoires universitaires de recherche, avec Sciences-Po, avec l'École d'économie de Paris et avec le CNRS. Grâce à ces adaptations et à la robustesse de ses méthodes, la Cour a été amenée à évaluer depuis 2011 vingt-cinq politiques ou dispositifs publics, et ce en grande partie à la demande du parlement. Nous avons évalué récemment à sa demande les politiques publiques de lutte contre la pollution de l'air. Nous ne sommes pas le seul acteur de l'évaluation des politiques publiques en France et ne revendiquons pas de l'être. Néanmoins, nous disposons d'atouts que les autres ne possèdent pas. Le premier est notre assise constitutionnelle, notre lien privilégié avec le parlement. Nous sommes habitués à travailler ensemble. Je pense également à certaines pratiques bien établies comme les enquêtes de terrain, la constitution d'échantillons de travail représentatifs ou au suivi des recommandations. Je pense encore au travail mené en réseau avec les chambres régionales et territoriales des comptes qui permet de coordonner les niveaux central et territorial lors d'une enquête. J'ai annoncé récemment mon intention de défendre ces atouts pour faire de la Cour l'instance de référence en France dans le domaine de l'évaluation des politiques publiques. Si la commission d'évaluation que vous envisagez de créer nous était rattachée, elle pourrait tirer profit de notre expertise en matière d'aide publique au développement, de nos méthodes de travail et de nos partenariats. Elle profiterait en un mot de ce qui fait le sérieux et la qualité des travaux de la Cour. Une autre mission au cœur de notre identité est l'information du citoyen. Sur ce point également, nous pourrions aider la commission à remplir les objectifs que le législateur lui assignerait.

Le deuxième avantage que présenterait une commission d'évaluation adossée à la Cour serait de bénéficier de notre indépendance institutionnelle et de notre positionnement à équidistance du gouvernement et du parlement. Je le répète, la Cour entretient une relation privilégiée avec le parlement. Ces liens étroits sont une chance et une responsabilité que nous mesurons pleinement. L'équilibre entre indépendance et dialogue nous permet de travailler à l'abri des pressions extérieures. Le choix de rattacher la commission d'évaluation à la Cour assurerait une réelle indépendance à celle-ci par rapport au gouvernement et aux administrations qui sont en première ligne de l'aide publique au développement. Le fait que la commission soit représentée à l'extérieur par le premier président de la Cour des comptes enverrait également un signal fort à nos partenaires.

Pour résumer, il m'apparaît pertinent – et c'est la position de la Cour des comptes que j'exprime ici et pas seulement la mienne – que la commission indépendante d'évaluation soit adossée à une institution indépendante qui conduit déjà au nom de la Constitution des évaluations de politiques publiques, notamment de développement. Le législateur a choisi à plusieurs reprises dans le passé des organismes indépendants à la Cour. Je pense notamment au conseil des prélèvements obligatoires et au conseil des finances publiques, que j'ai présidé ès qualités. Le troisième avantage est que la Cour des comptes détient déjà une riche expérience dans l'animation de ce type de structure.

Je vais maintenant répondre aux cinq questions que vous avez posées. Pourquoi avoir choisi de rattacher le conseil des prélèvements obligatoires (CPO) à la Cour ? Au-delà de l'impératif d'indépendance prévu par le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, ce choix était motivé par deux raisons. Premièrement, il nous semblait nécessaire, compte tenu de la place occupée par la Cour dans notre système institutionnel, économique et financier, qu'elle fût partie intégrante du dispositif. Deuxièmement, nous souhaitions pouvoir établir des synergies entre la Cour et le conseil. De ce point de vue, le contrôle et l'évaluation ne s'opposent pas. Le conseil est une structure spécifique, distincte de la Cour des comptes. Il a son service de communication et son propre site internet. Néanmoins, il bénéficie de ses moyens d'expertise. En outre, il est proche du parlement, il en est un allié et lui présente systématiquement ses travaux. Je souligne que ni le haut conseil des finances publiques ni le conseil des prélèvements obligatoires n'ont privé la Cour de ses missions et prérogatives traditionnelles. La Cour ne s'est pas non plus privée de l'ouverture nécessaire et bienvenue à d'autres membres, y compris des parlementaires. Vous déciderez si la commission doit compter ou non des parlementaires et j'entends vos réserves. Les deux conseils des prélèvements obligatoires et des finances publiques ne comptent pas aujourd'hui de parlementaires, mais des personnalités qualifiées nommées par les présidents des deux assemblées. Ils comptent aussi d'anciens parlementaires et d'anciens élus, ce qui n'est pas inutile dans les domaines financiers. Leur présence enrichit l'expérience, au-delà de celle de nos magistrats et rapporteurs.

Il me semble que dans le cadre du projet de loi qui vous occupe, les avantages du rattachement de la commission indépendante à la Cour seraient les mêmes que ceux que j'évoque. Face aux questions que vous avez posées, plusieurs formules sont envisageables. Le CPO, par exemple, est une structure légère qui ne compte pas de personnel permanent et qui établit un rapport par an. Ses réunions sont présidées par le premier président de la Cour des comptes et un secrétariat général, mais le CPO n'est pas une vraie institution. Le haut conseil des finances publiques est une véritable institution qui porte à la fois une mission budgétaire et des méthodes de travail éprouvées. Le haut conseil rapporte systématiquement devant les commissions parlementaires. Se pose aussi la question des moyens. Dans le premier cas, un magistrat de la Cour fait office de secrétaire général à temps partiel. Dans le deuxième, la structure compte maintenant cinq personnes qui conduisent une mission permanente. En somme, l'alternative est, d'un côté, une structure souple et légère et de l'autre une véritable institution dotée de moyens. Dans les deux cas, la commission est rattachée à la Cour et hébergée par elle. Néanmoins, alors que dans le premier cas, les missions seraient portées par des personnes en sus de leur activité principale, dans le deuxième, des personnels seraient affectés à l'institution avec des bureaux, des moyens et un secrétariat.

En conclusion, nous sommes volontaires à la Cour des comptes pour accueillir la commission et participer à son animation dans les conditions que vous définirez. Son existence nous paraît non seulement souhaitable, mais même nécessaire. Les trois avantages d'un rattachement de la commission à la Cour sont l'expertise, l'indépendance et l'expérience, que nous possédons de manière assez unique parmi les évaluateurs. Si vous nous confiez cette responsabilité, nous mettrons tout en œuvre pour défendre dans la politique de développement la transparence, la redevabilité et l'efficacité dont les personnes ont grand besoin. À titre personnel, je serais très enthousiaste de contribuer à l'enrichissement de la politique de développement solidaire, tant je suis persuadé du rôle que peut jouer notre pays peut jouer dans ce domaine. Ce serait pour moi un investissement personnel tout à fait important.

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