Intervention de Nicolas Dupont-Aignan

Réunion du mercredi 27 novembre 2019 à 9h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNicolas Dupont-Aignan :

Je vous renvoie à des textes du général de Gaulle avant 1966, notamment la lettre écrite au président américain. C'était il y a plus d'un demi-siècle et il avait anticipé le caractère multipolaire du monde. Ce qui est fascinant, c'est que 53 ans après, nous sommes en train d'essayer de comprendre pourquoi l'OTAN explose en plein vol, mais c'est tout simplement parce qu'un outil de défense n'est qu'au service d'une politique étrangère. C'est d'ailleurs parce que Donald Trump a sa propre politique étrangère qu'il n'est pas d'accord avec ce qu'a fait l'OTAN. C'est parce que la Turquie a sa propre politique étrangère qu'elle s'exonère de ses responsabilités. Malheureusement, la France, qui avait pu conquérir peu à peu une certaine autonomie stratégique, a opéré un contresens total en 2009 en rentrant dans le commandement militaire intégré de l'OTAN. Je vous rappelle qu'à l'époque, nous avions très fortement critiqué cette réintégration. On nous avait expliqué que cela allait être formidable, que nous allions influencer l'OTAN, que nous allions construire une politique européenne et que si nos partenaires européens ne voulaient pas construire une politique européenne, c'est parce que nous n'étions pas dans le commandement militaire intégré de l'OTAN.

Or en vérité, c'est un fiasco intégral : obsession contre-productive contre la Russie parce que les menaces ont changé, comportement absolument scandaleux de la Turquie avec une soumission des Européens, contradiction des Américains qui veulent se désengager, mais qui veulent continuer à vendre leurs équipements et l'acheter de nos partenaires européens qui sont ravis de profiter de l'argent américain et du sacrifice de nos soldats pour s'exonérer du fardeau. La vraie question aujourd'hui est que l'OTAN est contraire aux intérêts de la France et que notre pays doit quitter cette organisation. C'est la meilleure façon, à terme, de construire une politique européenne. Mme Genetet vient de citer les déclarations de M. Le Drian qui me paraissent totalement contre-productives. Il n'y aura pas de construction de défense européenne dans le cadre de l'OTAN parce que l'OTAN interdit une autonomie stratégique européenne. Nous ne pourrons construire un pôle de défense européen à terme non pas par une unité, mais par des coopérations techniques, ne serait-ce que militaires, que si c'est au service d'une indépendance stratégique. Voilà pourquoi cette organisation est vouée à mourir. Elle mourra à la fois par les Américains et, je l'espère, par les Français. D'ailleurs, c'est intéressant, je crois que l'un des experts de l'OTAN a dit qu'il n'y avait que trois pays respectés : les États-Unis, la Turquie et la France. Pourquoi ? Parce qu'ils défendent leurs intérêts ; la France l'a fait à un moment.

La parole du Président de la République est assez bienvenue. Pour une fois, je suis d'accord. C'est une mort cérébrale parce que cet outil n'est plus adapté aux menaces du temps présent et ne répond pas au désir des peuples qui constituent cet outil. Que l'on garde une organisation atlantique pour échanger ne me gêne pas, et il y aura besoin de coopération. En revanche, il est urgent que la France retrouve sa liberté – liberté stratégique et liberté de matériel militaire – et mette au pied du mur nos partenaires européens. Sinon, nous rentrerons dans un sable mouvant supplémentaire qui serait celui d'une pseudo Europe de la défense qui sera soumise à l'OTAN et donc totalement impuissante.

Enfin, je voudrais dire que pour que nous ayons une politique étrangère indépendante, il faut que nous ayons un outil performant. Cela pose la question des matériels, de l'investissement de la nation et de l'investissement de nos partenaires. En tout cas, la France doit maintenir son effort de défense très fortement et doit inciter nos partenaires à faire de même, mais ne pas céder à cette organisation qui aujourd'hui joue ouvertement contre nos intérêts.

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