Intervention de Emmanuel Dubois de Prisque

Réunion du mercredi 11 décembre 2019 à 9h35
Commission de la défense nationale et des forces armées

Emmanuel Dubois de Prisque :

Nous sommes à un mois de l'élection présidentielle et des élections législatives taïwanaises. Taïwan est une cause sacrée dans la Constitution chinoise. Les seules occurrences du mot « sacré » concernent le territoire chinois et spécifiquement Taïwan. Quand nous parlons de sacré, nous ne sommes plus simplement dans la défense des intérêts, même si nous parlons de « core interests », d'intérêts vitaux. Il s'agit là d'articles de foi. Taïwan appartient à la Chine. C'est un article de foi auquel nous devons tous adhérer. On lit couramment que la Chine revendique Taïwan, mais en fait, la Chine déclare qu'elle possède déjà Taïwan et nous demande de faire comme si c'était le cas. Il y a une ambiguïté. La Chine dit simultanément quelque chose de contradictoire. Elle est la seule des grands pays à ne pas être réunifiée. Il faut à la fois qu'elle se réunisse et que tout le monde reconnaisse qu'elle est déjà réunifiée. C'est un élément très curieux, qui relève de la foi et qui peut être très dangereux sur le long terme. D'une certaine façon, cela pointe la singularité chinoise. Si vous regardez les cartes françaises entre la guerre de 1870 et celle de 1914, l'Alsace-Lorraine était indiquée dans une couleur différente. Nous admettions qu'elle appartenait à l'Empire prussien, mais nous la revendiquions. Nous faisions une différence entre la réalité et ce que nous voulions. Les Chinois refusent que cette différence existe. Ils écrasent cette différence sous leur désir et nous demandent de faire comme si, sur les cartes et dans un aspect plus symbolique, Taïwan appartenait déjà à la Chine. Ceci dépasse largement la défense des intérêts et touche l'aspect religieux.

Quand les Chinois regardent leur histoire, ils se disent qu'ils ont raté quelque chose au moment où, dans leur passé, ils ont été faibles, et qu'ils doivent être forts. Nous avons tendance à faire l'inverse. Quand nous regardons notre histoire, nous nous disons que c'est notre nationalisme et les rodomontades face à l'Allemagne qui ont mené à cette longue guerre civile européenne, qu'il faut que nous soyons gentils avec les autres pour que cela se passe bien. Les Chinois ont l'idée symétriquement inverse. Ont-ils raison ? Je l'ignore.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.