Je ne reviendrai pas sur l'organisation de l'opération Grande America en elle-même, qui a démontré l'efficacité du système français de mobilisation très rapide des moyens dans la main d'un seul décideur, qui nous permet de dépasser tous les conflits interministériels et toutes les susceptibilités que l'on peut connaître dans ce type d'affaires. En revanche, je voudrais insister sur trois points. D'abord, comme dans toute gestion de crise, la communication a été primordiale. Les populations riveraines étaient très sensibles à la moindre information donnée – souvent fausse, d'ailleurs – quant à l'arrivée d'une pollution sur les côtes. Le moindre signal était survalorisé. Le Gouvernement a alors décidé de confier l'intégralité et le monopole de la communication de l'État à propos du Grande America au préfet maritime de Brest, donc à l'amiral Lozier. Je pense que tout le monde s'en est bien porté, car une voix unique parlait au nom de l'État et tenait, vis-à-vis des populations inquiètes, un discours structuré, cohérent, objectif et argumenté.
Ensuite, après en avoir longuement discuté, l'amiral Lozier et moi avons pris la décision de diffuser le descriptif de la cargaison du Grande America. Je crois que c'était une première dans la gestion de ce type de catastrophe maritime. Vous vous souvenez qu'il existait un début de polémique quant au fait que l'État voulait dissimuler le fait que le Grande America transportait des matières dangereuses. L'amiral a donc diffusé le descriptif de cette cargaison lors d'une conférence de presse. C'était une sage décision. Je pense qu'il faudra agir ainsi plus systématiquement. En effet, il me semble que c'est un gage de transparence qui apaise nos relations avec les riverains.
Enfin, autant l'organisation en mer a été parfaite, autant le retex du Grande America nous incite à repenser notre organisation de lutte contre les pollutions marines à terre. Heureusement, nous n'avons pas eu besoin de solliciter les préfets de département concernés, car la pollution n'est pas arrivée à terre, ou de façon tellement disséminée qu'elle n'était pas visible. En tout état de cause, nous avons besoin d'une coordination plus musclée et plus resserrée pour gérer un événement de ce type.