Notre haut niveau d'engagement avait limité l'octroi des permissions, mais j'ai commencé à relâcher la pression. La zone de gendarmerie représente 95 % du territoire mais, s'agissant de contrôles de flux, le besoin est devenu moindre. Sur les 108 escadrons manœuvrables, une trentaine ont donc été neutralisés pour une semaine.
Les visioconférences que j'organise quotidiennement jusqu'au niveau des brigades montrent que l'état d'esprit est bon. Après quelques interrogations au sujet des équipements, la responsabilisation et le choix laissé pour adapter les réponses au terrain ont contribué à l'engagement des gendarmes.
L'augmentation de la durée des contrats des gendarmes volontaires évitera le renouvellement précipité des contrats et permettra une souplesse dans les entrées, au moment où la réouverture des écoles dans de strictes conditions sanitaires limite le nombre d'élèves. En plus des 3 700 élèves, les officiers des écoles ont été redéployés vers les unités ou les états-majors de planification, et les cadres des écoles engagées avec les brigades territoriales. La polyvalence est utile en période de crise.
La réserve est un moyen de compenser l'attrition. Cette dernière ayant été faible, les réservistes opérationnels n'ont été engagés que pour accompagner la réouverture des agences postales en vue de la délivrance des prestations sociales. En compensant les escadrons neutralisés ou les gendarmes envoyés en permissions, ils vont désormais permettre le maintien d'un haut niveau d'engagement.
Les services de renseignement suivent les risques d'agitation sociale, car nous devons anticiper la réponse. Par la réinstauration d'une relation de confiance, l'opération « #Répondreprésent » permettra de répondre plus facilement demain. Les gendarmes, qui connaissent les gilets jaunes, sont parvenus à dégager des ronds-points, par la discussion. Dans les territoires, la gendarmerie doit vivre en proximité totale avec tous les élus et contribuer ainsi à la régulation sociale. Cela restera une de mes priorités.
Je souhaite que de moins en moins de gens viennent dans les brigades et que nous allions au contact des gens. Grâce à l'évolution des moyens techniques, les brigades ne devraient plus faire d'accueil dans une grande partie du territoire. Nous allons expérimenter des dispositifs permettant aux gendarmes d'aller vers la population plutôt que d'obliger celle-ci à venir à la brigade.
La deuxième version du rétrofitage des véhicules blindés à roues de la gendarmerie (VBRG) a donné des résultats intéressants. Et depuis que nous parlons de rétrofit, il semblerait que le prix des engins neufs baisse… Reste que le renouvellement de ces engins utiles pour le maintien de l'ordre « dur » doit être engagé. Pour ce qui est des hélicoptères, nous discutons avec la sécurité civile sur ce que sera la flotte de demain : sans doute faudra-t-il mieux partager les modèles, privilégier la subsidiarité et les hélicoptères de transport par rapport aux petits engins. Comme en matière d'immobilier, un plan de relance serait bienvenu.
Je viendrai avec plaisir au centre de Saint-Astier.
Nous avions un stock de masques FFP2 qui ont été remis aux soignants, ce qui m'a conduit à mettre l'accent sur les gestes barrières et les comportements individuels. Très peu de gendarmes ont été infectés. Au demeurant, avec un stock de 3,5 millions d'unités, nous avons de la marge, même si chaque gendarme en utilisait un par journée de travail. Et les visières ont été distribuées assez rapidement.
Les modèles de casernes que nous nous imposons, pas toujours adaptés, renchérissent le coût pour un effet discutable. Nous devons réviser les normes pour rendre le coût de construction plus supportable pour les collectivités.
Nous réajustons çà et là les effectifs. Le maillage a été beaucoup réduit, ces dix dernières années, et nous allons cesser de le faire. Le mode de fonctionnement de la brigade va évoluer dans les territoires les moins sous tension, mais dans d'autres, comme le Var, il n'est plus possible d'organiser de rendez-vous avec la population, sinon l'hiver. Je reviendrai vers vous pour évoquer les mesures afin d'améliorer notre fonctionnement.
L'opération « #Répondreprésent » visait à accompagner aussi loin que possible les élus et les personnes vulnérables. Au moyen d'une boucle de messagerie sécurisée, les commandants de groupement m'ont fait quotidiennement des remontées d'activité, de la distribution de médicaments dans des villages corses à la distribution de copies à des élèves confinés privés d'accès à internet. Nous avons proposé l'animation de classes de soignants par des clubs locaux. Afin de lutter contre les violences familiales, nous avons mis en place des postes de gendarmerie dans des bureaux de poste et des centres commerciaux. Nous avons pris de nombreux contacts avec des personnes âgées ou de femmes victimes potentielles. Nous avons organisé 2 200 000 missions de prévention de proximité pour des gens confinés et sensibilisé près de 6 000 collectivités aux cyber-menaces et 37 000 commerçants et 1 500 élus et administrations à la prévention technique de la malveillance.
Il est parfois difficile de concilier discernement et directives : les gendarmes ne verbalisent pas tous les conducteurs roulant à plus de 80 km/h par exemple. Le grand nombre de cas particuliers oblige à faire preuve de discernement ; ce ne fut pas toujours le cas. Mais d'autres fois, la remontée des médias n'était pas conforme à la réalité. J'ai eu au téléphone le chef des gendarmes de l'île de Ré, vilipendé au motif que l'on aurait empêché un homme qui voulait se rendre au chevet de son père mourant. Si les gendarmes avaient eu toutes les informations qu'a rapportées la presse, ils auraient réagi autrement, d'autant qu'un des leurs venait précisément de perdre un membre de sa famille très proche (non décédé du covid). Toute remontée médiatique ou des réseaux sociaux est vérifiée et, à la moindre erreur, nous annulons les amendes.