Intervention de Lieutenant-colonel Christophe Rohmer

Réunion du jeudi 28 mai 2020 à 14h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

Lieutenant-colonel Christophe Rohmer, du Centre interarmées de la défense nucléaire, radiologique, biologique et chimique :

J'occupe, depuis l'été 2018, les fonctions de chef du bureau doctrine, études et prospective au centre interarmées de la défense nucléaire, radiologique, biologique et chimique. J'interviens devant vous au titre de ma projection, dans le cadre de l'opération Résilience, à l'état-major de zone de défense et de sécurité (ZDS) Sud de Marseille, du 30 mars au 1er mai 2020, où j'étais responsable de la gestion de l'aspect nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC) de la crise. Mon propos traduira donc la vision interarmées que j'ai pu avoir de cette crise, et non pas une vision armée de Terre. J'avais une mission de conseil, de soutien et d'organisation de formations, notamment à la désinfection, au profit des non-spécialistes NRBC.

L'aspect biologique des risques et menaces NRBC est le plus difficile à maîtriser, une difficulté exacerbée, pour la covid-19, par la contagiosité des porteurs asymptomatiques ou peu symptomatiques. L'application de procédures de désinfection et de mesures de prévention face au virus constitue donc en permanence un enjeu majeur nécessitant une implication de chacun. Seuls les spécialistes du domaine NRBC détiennent les capacités à conduire des actions de décontamination ou de désinfection approfondies. Afin d'alléger la pression sur ces derniers, le centre interarmées de défense NRBC a travaillé, dès le début du mois de mars, pour définir un socle commun de procédures qui pourrait s'adresser aux non-spécialistes, de façon qu'ils puissent eux-mêmes conduire des actions de désinfection à la fois préventives et curatives, dans un cadre strictement défini. L'évaluation et la priorisation des besoins relatifs à l'emploi des uns ou des autres ont constitué une préoccupation constante de mon action.

Mon engagement s'est révélé essentiel pour appuyer l'état-major de Marseille, en complément de la présence indispensable de référents NRBC à chaque niveau de commandement. Leur formation a été identifiée comme un processus nécessaire dans les armées bien avant la crise de la covid-19.

La pertinence et la complémentarité du maillage territorial ont également été décisives. Pour le domaine NRBC, cela s'est traduit par le renfort de la ZDS Sud par deux équipes de désinfection, armées par l'armée de Terre et l'armée de l'Air. Celles-ci ont effectué des actions de désinfection et contribué à la formation des non-spécialistes. Cette pertinence justifie donc pleinement de disposer d'un modèle d'armée complet dès le temps de paix.

Un point très positif de cet engagement aura été la capacité des spécialistes NRBC de l'ensemble des armées à fonctionner en réseau, tant horizontalement que verticalement, afin de partager et de diffuser la connaissance et les bonnes pratiques. Là encore, cette capacité repose très largement sur l'identification des bons points de contact dès le temps de paix, et pourrait s'étendre aux spécialistes d'autres ministères.

Ce fonctionnement en réseau a été particulièrement utile lors de la phase de préparation des opérations de désinfection du porte-avions Charles de Gaulle. Les contacts préexistants avec les marins de la base de Toulon ont permis un gain de temps significatif. Au cours de cette mission inédite au caractère éminemment interarmées, les moyens engagés se sont avérés complémentaires : les équipes de désinfection de la marine avaient la connaissance du navire, et le 2e régiment de dragons NRBC apportait sa solide expérience en matière de désinfection. Cette mission a enrichi la connaissance mutuelle des acteurs.

La prestation des équipes de désinfection terre et marine a été excellente, dans un contexte difficile lié à la nature même du chantier – continuité de service des installations nucléaires, multiplicité des acteurs –, alors qu'une grande partie de l'équipage était porteuse du virus. Il s'agit bien d'une réussite collective : les spécialistes y ont largement contribué, grandement aidés par les non-spécialistes, très impliqués dans l'application des mesures visant à empêcher la réintroduction du virus à bord.

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