Intervention de Geneviève Darrieussecq

Réunion du jeudi 4 juin 2020 à 15h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Geneviève Darrieussecq, ministre :

Vous l'avez souligné, le plan Famille a fait la preuve de son utilité. Je peine à imaginer ce qu'aurait été, à défaut de ce dispositif, l'expérience du confinement, comment les personnels se trouvant dans un lieu éloigné, parfois projetés en opération, auraient pu communiquer avec leur famille. Au-delà des mesures telles que l'équipement wifi, nous avons, à titre temporaire et exceptionnel, à la demande du Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO), doublé les forfaits de communication, pour que chacun puisse parler à ses proches aussi souvent qu'il en éprouvait le besoin. Le plan Famille nous a également permis d'accompagner les gardes d'enfants. Compte tenu du nombre insuffisant de crèches ouvertes, nous avons financé des aides pour rendre accessible la garde des enfants de soignants du service de santé des armées ou dont l'un des parents était projeté en opération. Nous avons également apporté des moyens destinés à favoriser le soutien scolaire.

Certaines activités, liées au plan Famille, ont été ralenties pendant le confinement, en particulier le programme d'infrastructures et de travaux pour améliorer les conditions d'hébergement, construire de nouvelles crèches ou déployer les espaces ATLAS.

Il est essentiel que le plan annuel de mutation puisse se dérouler convenablement. Nous nous étions engagés à ce que les ordres de mutation soient communiqués aux intéressés au minimum cinq mois avant le changement d'affectation. Cet objectif a été tenu en 2020, ce qui n'est pas le moindre des mérites de nos personnels. La plupart d'entre eux avaient connaissance de leur future affectation avant la crise sanitaire. Ils devaient engager un certain nombre de démarches, à commencer par les déménagements. Ceux-ci ont été soigneusement réalisés, avec le plein soutien de la chambre syndicale des déménageurs, qui a accepté de considérer comme prioritaires les déménagements de nos personnels. S'agissant des inscriptions des enfants dans les écoles, en accord avec l'Éducation nationale, une procédure très simplifiée de constitution des dossiers administratifs a été appliquée.

La crise nous a montré, dans ce domaine comme dans bien d'autres, que nous pouvions agir de façon efficace et, peut-être, plus simple. Il faudra s'en souvenir. Nous devons impérativement rester à l'écoute des familles et les accompagner du mieux que nous pouvons au moment où la vie reprend peu à peu un cours plus normal.

Monsieur de La Verpillière, sans éluder aucune de vos questions, je rappelle que nous travaillons encore sur l'ensemble des sujets que vous avez évoqués. Au cours d'une année normale, on serait à peine au début des arbitrages budgétaires. Peut-être avons-nous quelques semaines de décalage ; les arbitrages auront lieu d'ici à la césure de l'été. Nous avons une feuille de route claire : la loi de programmation militaire. Elle reste la référence absolue.

S'agissant de la relance, j'ai indiqué qu'une task force avait pour objet d'identifier les besoins des PME. Nous avons également mis en place une task force interministérielle consacrée aux industries de défense, pilotée par un ingénieur général de l'armement, en lien très étroit avec la direction générale des entreprises de Bercy et Bpifrance, ainsi qu'avec les syndicats professionnels des industries de défense : le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (GIFAS), le Groupement des industries de construction et activités navales (GICAN) et le Groupement des industries françaises de défense et de sécurité terrestres et aéroterrestres (GICAT). Cette structure, qui a à sa disposition une centaine de personnes, doit nous permettre d'identifier les entreprises qui présentent des risques de cessation d'activité totale ou partielle et de mobiliser des outils tels que les prises de participations ou les investissements dans ces sociétés. Je ne dévoilerai pas, à ce stade, un plan qui est encore sur le métier.

Nous mobiliserons tous les outils entre nos mains, prévus par la loi de programmation militaire et, à plus court terme, par le budget 2020 – avant même d'évoquer celui de 2021 –, en nous assurant que chaque euro sera utilisé de façon utile, efficace et rapide pour soutenir l'économie française, nos savoir-faire et nos emplois. Nous veillerons en particulier à ce que les commandes qui pourraient être faites selon un calendrier différent de celui qui avait été envisagé aient des répercussions positives, pas simplement vis-à-vis des grands maîtres d'œuvre, que nous connaissons tous, mais aussi sur la chaîne de sous-traitance, de valeur, dont nous ne pouvons nous passer. Monsieur le député, je vous demande encore un peu de patience. Nous en avons pour quelques semaines de travail supplémentaires. Nous serons au rendez-vous.

Le sas est une structure qui a été mise en place après l'expérimentation par nos armées de situations de combat et de projection en opérations extérieures dures. Une proportion non négligeable de personnels ont été accueillis en Crète à leur retour d'opération. Au début du confinement, nous avons dû suspendre l'activité de ce centre, puisque les frontières fermaient. Nous avons mis en place depuis lors un dispositif spécifique, qui comporte une dimension sanitaire liée au virus. Tout personnel qui rentre d'opération extérieure passe un test PCR à son retour en France et, dans l'attente du résultat, reste confiné. Au-delà de cette précaution sanitaire, on prend en charge de manière plus large la fatigue, les problèmes éventuels que chaque militaire a pu éprouver sur place. Il ne faut pas oublier que les missions, au cours des derniers mois, ont pu être allongées, faute de retour possible en France. Nous avons réactivé un centre Pierre et Vacances, dans l'Ardèche. Les familles sont très attachées à ce dispositif, qui facilite grandement les retrouvailles. Cette solution temporaire est bienvenue mais, dès que ce sera possible, nous rouvrirons le centre crétois.

Monsieur le vice-président Pueyo, vous avez rappelé que l'Eurodrone est un projet important de coopération européenne, qui doit permettre de répondre à un besoin capacitaire avéré. Nous avons fixé des objectifs, en particulier une enveloppe et des spécifications techniques et de performances. Nous n'avons pas encore atteint le montant de 7,1 milliards qui a été défini. Nous n'avons pas la certitude absolue qu'à l'intérieur de cette enveloppe, l'ensemble des capacités et performances techniques seront garanties. Tant que je n'aurai pas cette assurance, nous poursuivrons les discussions avec les industriels. C'est un message que je leur ai adressé à plusieurs reprises.

Le Fonds européen de défense était une priorité pour notre pays dès avant la crise sanitaire, dans le cadre des discussions budgétaires avec l'Union européenne. Notre objectif était de le doter de 13 milliards. La présidence finlandaise avait proposé de réduire l'enveloppe de moitié, ce qui n'était pas acceptable. Depuis, nous avons repris les discussions, et les crédits ont été significativement majorés, à hauteur de 9 milliards. Toutefois, je ne considère pas que nous ayons dit notre dernier mot. La crise que nous avons traversée montre que la souveraineté ne doit pas être un vain mot. Ce n'est donc pas le moment d'en rabattre sur nos ambitions en matière de souveraineté européenne et industrielle. Les discussions se poursuivent.

Monsieur Lachaud, je vous ai dit, le 11 mai, que je m'étais engagée à présenter les conclusions des enquêtes que j'avais commandées. C'est ce que j'ai fait. Je considère que tout ce qui est utile à la compréhension des faits et de la manière dont l'épidémie s'est propagée sur le Charles-de-Gaulle a été rendu public. L'enquête épidémiologique vous a été transmise le lendemain de mon audition. Elle est librement accessible en ligne. Je ne suis pas rétive à la transparence, mais, comme toute enquête de commandement, celles-ci comportent des informations relatives à l'organisation interne du ministère ou révélant l'identité de personnes qui n'ont aucunement vocation à être connues du public. Leur divulgation serait sans utilité pour la compréhension du sujet. Il faut avoir une appréhension pragmatique de la transparence. Tout ce qui peut contribuer à nous faire progresser doit être partagé, mais la transparence ne doit pas être une fin en soi. J'ajoute que votre assemblée a décidé d'entendre, autant que nécessaire, les ministres, afin de pouvoir évaluer leur gestion de la crise sanitaire, dans le cadre d'une mission d'information et, à présent, d'une commission d'enquête. Nous restons naturellement à votre entière disposition pour répondre à toutes les questions qui pourraient se poser.

Monsieur Gassilloud, la bataille informationnelle a fait rage pendant la crise sanitaire. Ce n'est pas nouveau, mais le contexte l'a illustré de façon magistrale. La pandémie a constitué un terreau favorable à de nombreuses manipulations d'information, à des batailles narratives émanant de puissances étrangères. Celles-ci ont des conséquences potentiellement dangereuses pour la sécurité des Français et portent atteinte à la crédibilité de l'action publique et à l'influence de notre pays à l'étranger. Sans revenir sur tout ce qui a été décidé dans le champ informationnel, je rappelle que nous avons systématiquement rejeté les accusations mensongères qui ont été proférées à notre encontre. Récemment encore, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a réagi vigoureusement lorsque l'ambassadeur de Chine en France s'est permis un certain nombre de commentaires déplacés, largement relayés sur les réseaux sociaux. Ce sont des manœuvres qui ne sont absolument pas à l'image de la qualité de la relation que nous entretenons avec la Chine. Nous devons continuer de lutter, jour après jour, contre toutes les manipulations, les détecter, les analyser, les caractériser et réagir aux falsifications. Nous nous sommes donné les moyens de le faire.

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