Intervention de l'ingénieure générale hors classe de l'armement Legrand-Larroche

Réunion du mercredi 1er juillet 2020 à 9h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

l'ingénieure générale hors classe de l'armement Legrand-Larroche :

. Concernant les stocks de pièces, il faut voir de quelle situation nous partions. Ils étaient parfois insuffisants. Faute de renouvellement pendant plusieurs années, nos aéronefs étaient souvent immobilisés par manque de pièces. Nous transférons la gestion des stocks à des industriels privés avec lesquels nous signons des contrats, mais nous ne leur en transférons pas la propriété. Nous avons un droit de regard sur les stocks, qui restent propriété de l'État. Il leur revient de les gérer, c'est-à-dire de les entretenir, de mieux anticiper leur diminution et leur passage sous un seuil critique et de les régénérer. Lorsqu'on commande des pièces de rechange, le délai de production est de douze à vingt-quatre mois. L'industriel doit gérer les stocks mieux que nous jusqu'à présent et être mieux capable que nous d'anticiper, gérer les pièces, les réparer, en racheter.

Nos mécaniciens des armées doivent garder la compétence d'intervention sur les aéronefs, en particulier en opération extérieure, où ce sont toujours eux qui interviennent. Ce que nous faisons en métropole est destiné à soulager les mécaniciens. L'externalisation du soutien des Fennec de l'ALAT répondait à une demande de l'armée de Terre qui, par manque de mécaniciens pour réaliser les opérations de maintenance, se retrouvait avec des appareils indisponibles. L'externalisation du soutien des appareils écoles dont l'activité est reproductible et aisément prévisible a permis à l'armée de Terre de réaffecter des mécaniciens au soutien d'hélicoptères Puma et de réduire leur indisponibilité pour manque de ressources humaines.

Concernant notre tissu industriel, nous sommes attentifs à l'état des maîtres d'œuvre mais également à celui de leur chaîne de fournisseurs. En aéronautique, le client « défense » est souvent petit, comparé au reste de l'industrie. Les difficultés rencontrées par l'industrie aéronautique civile sont alarmantes pour certains de nos fournisseurs de rang 2 ou 3, qui risquent de perdre une grosse part de leur clientèle. Nous volons beaucoup moins que l'aéronautique civile et nous ne représentons pas la majorité de leurs commandes. En liaison étroite avec la DGA, qui a mis en place une mission d'examen, nous faisons remonter des cas d'industriels présentant des fragilités. Dans tous mes contacts réguliers avec les maîtres d'œuvre, je leur demande comment ils estiment leur chaîne de sous-traitance, quelles en sont les fragilités, afin de ne pas perdre de fournisseurs importants. C'est un souci constant depuis le début de la crise. Nous poursuivrons cette action puisque, malheureusement, la crise de l'aéronautique civile risque de durer.

Nos aéronefs doivent répondre aux conditions des opérations extérieures et être capables de répondre à la menace. Les plus vieux sont fragiles et moins bien adaptés. Du point de vue du MCO, moins on a de flottes différentes, moins l'entretien est coûteux et plus il est facile. On peut disposer de stocks plus importants de pièces de rechange et on n'a pas besoin de former les mécaniciens sur beaucoup de flottes. Le projet hélicoptère interarmées léger (HIL) lancé récemment, qui vise à remplacer plusieurs flottes d'hélicoptères, aura des effets très positifs en termes de MCO. Du point de vue capacitaire, je comprends le besoin de flottes différentes, mais égoïstement, du point de vue de MCO, moins il y a de flottes et plus le soutien est facile.

Quant aux accidents qui ont endeuillé nos armées à la fin de l'année dernière et au début de cette année, je ne suis pas en charge des enquêtes. Nous avons immédiatement examiné avec les forces si un élément des matériels ou le MCO était en cause. Ce n'était pas le cas. Les flottes n'ont d'ailleurs pas été arrêtées. Si quelque chose apparaissait dans les enquêtes, nous serions informés mais, à ce stade, rien n'a été mis en évidence.

En aéronautique, on ne peut pas utiliser du matériel dont la fabrication n'a pas été certifiée conforme aux normes de sécurité aérienne et dont on ne s'est pas assuré de la tenue dans la durée. L'impression 3D peut être une solution pour des pièces qui ne contribuent pas à la sécurité aérienne ou dont on peut s'assurer qu'elles répondent aux conditions imposées, comme nous l'avons fait pour le Rafale. Une expérimentation est en cours pour définir le cadre d'utilisation de l'impression 3D, mais nous ne pourrions pas, aujourd'hui, valider la fabrication de toutes les pièces. Nous allons l'orienter vers des pièces non structurales, qui ne concourent pas à la sécurité des vols ou des pièces dont on peut rapidement dédouaner l'application.

La réforme a été notamment mise en place pour pallier le manque d'entraînement de nos pilotes. Le soutien de nos appareils assurait à nos forces la disponibilité nécessaire en opération au détriment de l'activité en métropole. Nous savions que la mise en place des actions demanderait quelque temps. La remise à niveau du stock de pièces de rechange nécessitant douze à vingt-quatre mois, il fallait des actions plus rapides pour garantir des formations plus rapides. L'externalisation a été retenue pour les Fennec et pour cinq Cougar afin de libérer immédiatement des heures de vol pour la formation et l'entraînement en attendant que nos autres actions produisent leur effet et améliorent significativement la disponibilité. Auparavant, l'armée de terre devait suspendre des stages de formation sur les Fennec, donc ne pas qualifier ses pilotes aux vols en condition IFR (Instrument Meteorological Conditions) faute de disponibilité d'aéronefs. Le général commandant de l'école au Luc me disait récemment qu'il ne rencontrait plus ce problème et que les causes de non-vol se limitaient aux conditions météo, ce qui est très satisfaisant à entendre pour les équipes qui ont consenti d'énormes efforts.

Le SIAé est un élément capital de notre MCO. J'ai participé à la mise en place du rapatriement du soutien du C-130 au SIAé, qui était auparavant effectué par la société OGMA, au Portugal. Le SIAé est une clé de voûte. Nous venons de signer avec lui un contrat de dix ans pour le soutien des hélicoptères Dauphin et Panther de la marine. Il n'y a aucune raison d'inquiétude ni pour qu'il revoie ses investissements ou son plan d'embauche.

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