Intervention de Florence Parly

Réunion du mardi 7 juillet 2020 à 19h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Florence Parly, ministre des armées :

J'ai bien noté que ce rapport comptait des plus et des petits moins. Nous essaierons de faire mieux l'année prochaine !

La performance enregistrée en 2019 est-elle appelée à se reproduire ? Je ne pense pas faire excès de prudence en vous disant que l'année 2020 sera moins bonne. D'abord parce que nous avions, cette année, les trois gros contrats que sont les dragueurs de mines, à destination de la Belgique et des Pays-Bas, les hélicoptères pour la Hongrie et les satellites pour l'Espagne ; ensuite, si des pays peuvent confirmer leur volonté de faire croître l'effort de défense, d'autres feront le choix inverse ; enfin, la crise a retardé la prise de décision, et les contrats qui auraient pu être concrétisés en 2020 ne le seront probablement qu'en 2021, année où l'on pourra constater, comme dans bien des domaines, un rattrapage.

S'agissant du contrôle sur les exportations d'armement, ce qui est important à mes yeux, c'est que nos produits soient fiables et reconnus, et que nous puissions agir ensemble lorsque des exportations sont inclues dans les partenariats. Il ne m'a jamais été indiqué que nos partenaires et clients considéraient le système de contrôle français comme un handicap.

Je relève que le partenariat, dans le cadre d'un contrat de gouvernement à gouvernement, tel celui que nous avons conclu avec la Belgique, est très apprécié. Cela fait partie des atouts que nous pouvons mettre en avant.

Il est vrai que l'année 2019 a été particulièrement brillante pour le secteur naval. Les grandes entreprises sont performantes. Leur visibilité sur le marché mondial est accentuée par le développement de produits pour le compte du client France, comme les sous-marins nucléaires d'attaque de nouvelle génération, dont les essais sont prometteurs, les frégates de défense et d'intervention – j'ai récemment assisté à la cérémonie de découpe de la première tôle – ou les bâtiments ravitailleurs de forces (BRF), dans le cadre du partenariat franco-italien.

Quelles sont les perspectives ? J'espère pouvoir répondre plus précisément sur le contrat passé avec la Grèce. Vous vous souviendrez peut-être que Naval Group a remporté l'année dernière le contrat avec la Roumanie, au terme d'une compétition très disputée. Mais l'un des vaincus, mauvais joueur, dépose recours sur recours. J'ai expliqué récemment à mon homologue qu'à ce rythme, la Roumanie ne pourrait espérer disposer des corvettes avant vingt ans ! Mais je ne désespère pas que la victoire de Naval Group se concrétise prochainement. Le groupe français a été également présélectionné, aux côtés de deux autres finalistes, pour la commande de sous-marins par les Pays-Bas. Nous entrerons bientôt dans une phase de dialogue compétitif ; croyez que je serai très mobilisée sur ce dossier.

Quel soutien l'État apporte-t-il aux exportations ? D'abord, le ministère est fort actif, à commencer par la DGA ; nos armées ont à cœur de démontrer les performances des matériels, et les exercices conjoints sont aussi l'occasion de promouvoir les produits français. Moins d'événements de ce type ont été organisés cette année en raison de la crise sanitaire, mais ce n'est que partie remise. Il convient ensuite de souligner l'effort du réseau diplomatique : les ambassades soutiennent les entreprises, celles, notamment de la BITD. Enfin, les membres du Gouvernement dont c'est le rôle assurent la promotion jusqu'à la finalisation des contrats.

S'agissant des mesures contracycliques, le plan de soutien à la filière aéronautique sera suivi d'un plan de relance à l'automne. J'espère pouvoir mettre en avant les industries de défense : ce sont des investissements qui profitent aux territoires, puisqu'ils se traduisent par des emplois, pour la plus grande part français.

J'ai lancé, il y a quelque temps déjà, le fonds d'investissement Definvest, qui permet de financer en fonds propres les entreprises en difficulté. La crise, et les besoins bien plus importants qu'elle entraîne, m'ont amenée à décider le doublement de ce fonds, dès 2020. Nous travaillons à d'autres outils ; nous cherchons notamment à fédérer les grandes entreprises de l'aéronautique autour d'un système qui leur permette de venir en aide et de financer les entreprises de plus petite taille.

En ce qui concerne les tentatives de prédation, une sorte de task force a été mise en place au sein de la DGA : en lien avec la Direction générale des entreprises à Bercy, elle identifie les entreprises qui sont en difficulté et celles qui ont besoin d'être secourues en urgence. Nous essayons, avec le ministère de l'économie, dont c'est la prérogative, de mobiliser les bons outils. Il faut éviter qu'à la faveur de la crise, les savoir-faire ne partent à l'étranger.

S'agissant du SCAF, le contrat d'architecture a été passé à la fin de l'année 2019, pour un montant de 65 millions d'euros ; le contrat de recherche et de technologie a été validé début 2020, pour un montant de 150 millions. Le démonstrateur devant pouvoir voler en 2026, nous travaillons à un contrat qui porte sur les années 2021 à 2026 et qui devrait être validé avant les élections allemandes, au plus tard en mars de l'année prochaine. Nous avons conclu en mai, sans tambours ni trompettes – confinement oblige –, le contrat d'architecture du char de combat du futur. L'idée est de notifier le contrat de recherche et de technologie au premier semestre 2021.

Notre partenaire américain est un concurrent qui reste agressif, voire le devient davantage. La situation, que j'ose qualifier de catastrophique, de Boeing incite l'entreprise à se montrer plus offensive encore à l'exportation. Et s'agissant de l'utilisation des outils extraterritoriaux, nous ne constatons, hélas, aucune amélioration.

Il est vrai que la filière des munitions de petit calibre n'a pas été considérée comme essentielle à la souveraineté française. Le contexte nous invite à nous demander si elle est désormais incontournable. Le fait est que ni le ministère des armées ni le ministère de l'intérieur n'ont rencontré de problème d'accès à ces munitions : les fournisseurs, notamment en Europe, sont nombreux, le marché est très ouvert et fluide. Je ne peux que vous inviter à poursuivre la réflexion, mais il me semble qu'il est d'autres domaines où nous devons retrouver en priorité, et de façon urgente, notre souveraineté.

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