Intervention de Thibault Bazin

Séance en hémicycle du mercredi 29 novembre 2017 à 15h00
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 — Article 11

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThibault Bazin :

Madame la ministre, vous vous apprêtez à supprimer le régime social des indépendants – RSI. Certes, il faut le réformer, car de nombreux dysfonctionnements ont été constatés. Pour autant, la suppression de l'entité juridique que forme l'organisme RSI guérira-t-elle les travailleurs indépendants des maux dont ils souffrent ? Nous avons de sérieuses raisons d'en douter.

À partir du 1er janvier 2018, les travailleurs indépendants auront affaire aux mêmes interlocuteurs qu'auparavant. Leurs réponses seront certainement identiques aux précédentes. Peut-être prendra-t-on alors conscience que les problèmes du RSI dissimulaient un mal plus profond !

Depuis sa création en 2006, l'efficacité de son pilotage diminue. Tout l'enjeu consiste à tisser des liens entre des organismes qui n'ont pas besoin de travailler ensemble. Êtes-vous certaine, madame la ministre, que les flux liant les caisses d'assurance retraite et de la santé au travail – CARSAT – et les unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales – URSSAF – seront fiables et sécurisés ? Les problèmes, essentiellement informatiques, ne risquent-ils pas de perdurer, voire d'empirer ? Les outils informatiques de l'URSSAF seront-ils à la hauteur ? Ils ne sont pas prévus pour une telle réforme. Espérons que la situation n'empirera pas !

Nos inquiétudes portent surtout sur la nécessaire prise en compte de la spécificité des travailleurs indépendants. Ne risquent-ils pas d'être noyés dans la masse ? Chaque travailleur indépendant fera-t-il l'objet d'une approche personnalisée ? Les spécificités de l'accompagnement des indépendants, telles que l'intégration du risque accident du travail-maladie professionnelle sans augmentation des charges au-delà de deux ans, seront-elles garanties à long terme ?

Certes, le recouvrement avec l'URSSAF sera meilleur qu'avec le RSI. D'ailleurs, lorsqu'il s'est agi d'aider les gens en difficulté, celui-ci a établi des échéanciers sur vingt-quatre mois alors que l'URSSAF imposait un délai de six mois.

Par ailleurs, l'action sociale destinée aux indépendants permet une meilleure prise en charge médicale dès 60 ans, notamment en matière d'implants dentaires, alors que le régime général s'en tient à l'âge de 75 ans et à des critères plus durs. Mentionnons également l'aide au chauffage. Ces spécificités seront-elles maintenues ?

Les programmes spécifiques de prévention sanitaire et sociale, particulièrement importants dans ces métiers, seront-ils poursuivis ? Qu'adviendra-t-il des réserves des régimes de retraite complémentaire des indépendants, qui s'élèvent à 17 milliards d'euros ? Seront-elles transférées à l'association générale des institutions de retraite des cadres – AGIRC – et à l'association pour le régime de retraite complémentaire des salariés – ARRCO – , qui sont déficitaires ?

La France est riche de ses travailleurs indépendants, qui sont autant d'entrepreneurs, d'artisans et de talents aux savoir-faire essentiels. Dans leur intérêt, nous ne pouvons pas nous tromper et courir le risque de tomber de Charybde en Scylla.

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