Intervention de Geneviève Darrieussecq

Réunion du mercredi 7 octobre 2020 à 9h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Geneviève Darrieussecq, ministre :

Le meilleur moyen de faire partager quelque chose, c'est de mettre les gens autour de la table. Si un nouveau projet sur la terre normande avait la caution de chacun, il ne ferait sans doute pas concurrence à l'existant, parce que le monde attire le monde. Le meilleur garde-fou pour ses promoteurs, c'est de réunir des historiens, des représentants du monde combattant, des représentants des collectivités territoriales. S'il faut participer à la réflexion avec les historiens de notre ministère, nous sommes prêts à proposer notre expertise. Pour ce qui est des 35 hectares de terres, les plans locaux d'urbanisme (PLU) sont aussi un garde-fou, aux mains des élus locaux.

J'ai déjà évoqué le cadre du SNU, l'évolution des JDM et leur articulation. Une évaluation des journées défense et mémoire développées pendant la première génération du service national universel a été réalisée. Des révisions simples ont été opérées. Les autres ministères concernés sont intervenus ; la durée des séquences a été réduite, passant d'une heure à cinquante minutes ; les jeux de stratégie ont été simplifiés. Les jeunes les comprennent très vite, mais ils n'avaient pas suffisamment de temps pour y participer pleinement. Ils peuvent y jouer le soir ; on peut les leur mettre à disposition dans des conditions différentes.

Florence Parly m'a confié le suivi de l'évolution du service de santé des armées, qui bénéficiera de crédits supplémentaires par rapport au budget 2020 : nous avons besoin de reconstituer des stocks de médicaments et de renouveler des dispositifs médicaux au profit de la médecine des forces. Nous souhaitons finaliser la mise en œuvre du projet « SSA 2020 ». Nous devons continuer de penser l'avenir. À l'hôpital de Brest, nous avons inauguré le service des urgences mais conservé des services qui, initialement, devaient être partagés avec l'hôpital public. Le service de santé des armées est entièrement tourné vers le soutien aux forces : tous les projets de transformation en coopération avec l'hôpital public ou d'autres partenaires, à Metz, à Lyon, à Brest, à Bordeaux, visent d'abord à répondre à ce besoin.

Des investissements sont prévus dans certains hôpitaux – je viens de lancer les travaux du service des urgences de l'hôpital Percy. Outre la reconstitution des stocks, des projets de remontée en puissance des ressources humaines viseront à consolider ce service indispensable, mis à rude épreuve par la crise du covid, comme tous les services de santé publique en France. Nos hôpitaux ont pris en charge des malades, multipliés par trois leurs capacités de réanimation, participé au soutien des régions les plus touchées, notamment à Mulhouse, et aux évacuations sanitaires de patients en réanimation dans d'autres régions. Le service a été particulièrement actif. Trente-cinq personnels ont été envoyés en Guadeloupe. Les membres du service doivent être remerciés pour leur implication dans les crises. Grâce à eux, nous avons pu soutenir des forces, maintenir la présence dans les opérations extérieures, agir en soutien pendant les crises sanitaires : il faut les en saluer. La remontée en puissance du budget est un bon signe pour le service de santé des armées qui doit être soutenu à proportion de ce qu'il apporte à nos armées et à notre pays.

En Algérie, les morts pour la France sont inhumés dans des nécropoles militaires, sauf si la famille a demandé, à l'époque, leur rapatriement. Les familles ont la possibilité de le demander aux autorités algériennes. Le sujet est différent de celui des disparus militaires et de la recherche des corps qui nécessitent un travail avec l'Algérie. Le service historique de la défense et l'association Soldis finalisent la liste des militaires disparus en Algérie, qui sera présentée début décembre. Nous devons aussi renouer le dialogue avec les autorités algériennes, ce qui n'était pas simple : pendant de longs mois, nous n'avions plus d'interlocuteur politique.

J'ai souhaité un contrat d'objectifs et de performance 2020-2025, soit six ans, contre trois ans auparavant, afin de donner de la perspective à l'ONACVG. La modernisation de l'office est déjà lancée. La dématérialisation des demandes de cartes de titres et d'aides sociales est une avancée précieuse, qui fait gagner du temps et de l'efficacité et décharge du temps d'agent pour d'autres missions. Le COP confirme le rôle d'opérateur mémoriel de l'ONACVG. C'est un opérateur des mémoires de l'État au niveau local, responsable de la mise en œuvre, de l'entretien et de la valorisation des nécropoles et des dix hauts lieux de la mémoire nationale, dont le Struthof. Nous lui transférons les crédits. Un montant de 56 millions d'euros est prévu dans le projet de budget, dont 53,5 millions d'euros en subventions de fonctionnement et 2,5 millions d'euros pour l'entretien des nécropoles et des hauts lieux de mémoire. De plus, un budget d'investissement de 8 millions d'euros est dévolu à la restauration des hauts lieux de mémoire.

L'ONACVG, notre opérateur principal, prévoit des efforts de réorganisation et des diminutions de coûts de fonctionnement, tout en préservant le réseau des services de proximité. Nous avons atteint un équilibre dans le contrat voté à l'unanimité du conseil d'administration.

Enfin, le COP lance le processus d'amélioration du modèle économique du Bleuet de France et de sa sécurisation, ce qui conforte l'ONACVG dans son rôle d'opérateur.

Aucun gouvernement n'est insensible à la situation des orphelins de la Seconde Guerre mondiale. En application des décrets pris en 2000 et 2004, l'ONACVG procède au réexamen de chaque dossier. Nous maintenons un examen au cas par cas des dossiers aux orphelins afin de garantir une égalité de traitement. Ces décrets contribuent au soutien des orphelins dont les parents sont morts dans des camps de concentration, dans des situations de barbarie extrême. C'est une spécificité. Cela figure au programme 158, programme particulier sous l'autorité du Premier ministre. Si des situations particulières motivent l'entrée d'autres orphelins dans ce cadre, elles seront examinées. Mais tous les orphelins de guerre et pupilles de la nation peuvent être soutenus par l'ONACVG au titre de l'action sociale, puisqu'ils en sont des ressortissants.

Pourquoi seulement 28 % de femmes participent-elles au service militaire volontaire ? Probablement parce que nous recevons davantage de dossiers de garçons que de filles… Il faut sensibiliser les prescripteurs, que sont également les missions locales, les organismes sociaux des communes, en leur expliquant que les femmes y ont toute leur place et qu'elles y seront accueillies dans d'excellentes conditions. Avec Florence Parly, nous soutenons résolument la mixité dans le ministère des armées.

Quant au taux d'insertion professionnelle, il est en moyenne de 75 % : c'est excellent. Quand j'étais élue locale, je voyais fonctionner les services d'insertion ; aucun d'eux n'atteint un résultat aussi élevé. Nous pouvons en être fiers.

Les tirailleurs d'Afrique sont un sujet auquel nous prêtons une grande attention. J'ai souhaité créer cet ouvrage à l'attention des élus locaux qui veulent baptiser des espaces publics de noms de tirailleurs sénégalais ou de combattants africains. Le livre en donne cent, mais la liste n'est pas exhaustive ; une commune peut s'attacher à un autre nom. Le service historique de la défense est à la disposition des communes pour leur fournir toutes les informations souhaitables. C'est un beau travail. Je vous remercie de continuer, chacun dans vos territoires, à défendre l'histoire et la diversité de nos armées, miroir de la diversité de notre nation. Ces combattants africains ont combattu pour la liberté de la France, pour notre République et nous devons leur en être reconnaissants.

S'agissant de la méconnaissance de notre histoire, sans doute devons-nous intensifier nos efforts de transmission avec l'aide de l'Éducation nationale, qui en reste le pilier. Peut-être faut-il faire évoluer les programmes. Nous souhaitons continuer à travailler avec eux.

Nous devons multiplier les supports, les rendre plus attractifs pour la jeunesse et plus interactifs. Compte tenu de nos contraintes dans l'organisation des cérémonies, j'ai souhaité la création d'une web-série sur l'année 1940, composée de films courts mais denses. Nous devons continuer à utiliser des supports pédagogiques différents. Un crédit d'environ 550 000 euros est inscrit pour les actions pédagogiques de l'ONACVG, les actions directes de la direction des patrimoines, de la mémoire et des archives et les publications. Par ailleurs, des subventions dont le montant varie chaque année en fonction des besoins sont également attribuées.

Pour ce qui est des conjoints survivants, quand on prend des décisions, il faut les appliquer. Le service des pensions de La Rochelle réalise un important travail de suivi et de mise en œuvre des dossiers. Chacun peut être rassuré, ces mesures seront mises en œuvre et le seuil de 6 000 points se substituera tout simplement dans le code des pensions à l'actuel seuil de 10 000 points. C'est sur cette base nouvelle que les pensions seront liquidées.

Les hauts lieux de mémoire font l'objet d'investissements importants. Le Struthof est un site particulièrement émouvant. Tous les investissements prévus y seront réalisés. Le meilleur moyen d'y parvenir, c'est de passer par un plan pluriannuel d'investissement qui présente l'avantage d'offrir une visibilité.

Nous devons soutenir le tourisme de mémoire avec les collectivités. Les régions, les départements et les intercommunalités sont dotés de la compétence touristique. Nous continuerons bien entendu à travailler avec eux.

Nous avons commémoré le conflit de 1870 : je me suis rendue à Gravelotte et à Bazeilles. Nous souhaitons transmettre la mémoire de cet épisode déterminant pour le XXe siècle : il a contribué à l'arrivée de la République dans notre pays et il est à l'origine des deux guerres mondiales. Il a profondément marqué une partie du territoire français, l'Alsace et la Moselle.

Nous n'oublions pas Napoléon. De nombreuses expositions seront organisées. Le patrimoine d'envergure du dôme des Invalides sera valorisé avec une restauration du tombeau, de la chapelle Napoléon, la cathédrale Saint-Louis, des expositions patrimoniales temporaires et un parcours d'art contemporain, à partir du mai 2021, intitulé « Napoléon ? Encore ! ». D'autres actions importantes seront conduites par le service historique de la défense et plusieurs partenaires, tels qu'un colloque international et la projection d'un film. Toutes ces actions seront développées sous l'angle historique.

Faute de temps, je m'engage à répondre par écrit à Mme Trastour-Isnart et à M. Jean-Charles Larsonneur.

Les conditions d'accès aux aides pour les harkis sont simplifiées. Nous avons élargi le cadre d'intervention, le nombre de lieux, hameaux de forestage et camps, ouvrant droit aux fonds.

Pour de qui est du 12 mai 1962, les harkis ont la journée du 25 septembre : ce jour-là, nous pouvons parler de tout. Les présidents de la République successifs, ainsi que le Président Macron, se sont clairement exprimés sur le sujet. Ils ont tous condamné l'abandon des harkis et reconnu que ceux accueillis en France l'avaient été dans des conditions exécrables, qui ne correspondaient pas à la reconnaissance due par la nation à des personnes ayant participé aux combats aux côtés de l'armée française. Tout cela, nous le traitons, nous en parlons, nous mettons en œuvre des moyens de reconnaissance et de réparation. Nous poursuivrons le dialogue avec les harkis. Mais créer une nouvelle date, je n'y suis pas favorable.

Vos questions nombreuses montrent votre intérêt à toutes et tous. Cet intérêt va droit au cœur des anciens combattants et me permet de travailler activement avec vous pour la mémoire sur tous les territoires. Je vous en remercie infiniment.

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