Venons-en maintenant au volet européen et international de notre réflexion. Au sein du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères, le pôle « énergies » a proposé à la direction de l'Union européenne, en charge de la préparation de la présidence française du Conseil de l'UE du premier semestre 2022, d'intégrer la transition énergétique aux priorités de la France. Dans ce cadre, il serait intéressant de mettre en évidence les initiatives propres aux armées, en dépit des réticences de quelques pays moins favorables.
Des échanges européens lors de la présidence française de l'Union européenne peuvent nourrir des réflexions autour des solutions énergétiques pour la mobilité des forces armées, notamment l'hydrogène et l'énergie nucléaire. Sur cette dernière, la France pourrait tirer parti de ce moment européen pour la promouvoir comme une énergie verte et fortement décarbonée auprès de la Commission européenne, afin de la rendre éligible aux mécanismes de financements mis en place pour avancer dans la transition énergétique.
La France pourrait également faire avancer les discussions sur le développement de filières européennes de recyclage, y compris pour les armées, non seulement pour des questions de coûts mais aussi pour le renforcement de leur autonomie stratégique. Le ministère de l'Europe et des Affaires étrangères et le ministère des Armées, en particulier la DGRIS, travaillent étroitement autour de ces questions de souveraineté. L'exportation du savoir-faire énergétique des armées françaises sur le territoire national à l'occasion de la présidence française du Conseil de l'Union pourrait, de surcroît, ouvrir des débouchés supplémentaires pour notre diplomatie économique.
Enfin, la France espère accueillir la quatrième conférence de la troisième phase du forum consultatif sur l'énergie dans le secteur de la défense et de la sécurité lors de sa présidence du Conseil de l'Union. L'objectif de l'événement sera d'identifier de nouveaux financements disponibles pour mener les actions de recherche et d'innovation dans le domaine de l'énergie de défense, et surtout de mettre en avant les solutions développées par les armées françaises.
Il serait pertinent de croiser ces efforts avec les programmes en lien avec le Pacte vert pour l'Europe et le plan de relance, afin de créer une dynamique européenne et d'emmener les partenaires volontaires. Si les besoins des forces françaises sont certes particuliers en comparaison avec d'autres pays n'ayant pas la même culture militaire, des convergences d'intérêts peuvent exister, par exemple sur le verdissement des infrastructures, les autres armées européennes étant souvent, comme l'armée française, de grands propriétaires fonciers.
Cependant, le véritable défi pour la France sera d'occuper le terrain politique de Bruxelles jusqu'au 31 décembre 2021, c'est-à-dire avant le début de sa présidence. En effet, les travaux doivent être amorcés dès aujourd'hui et orientés vers les priorités françaises, notamment les initiatives climat-défense, afin que le passage de relais se déroule le mieux possible. Dans cet exercice, du retard a malheureusement été accumulé, en raison de la gestion de la pandémie et des difficultés de la reprise économique.
Le 1er juillet 2021, la Slovénie succèdera au Portugal à la tête du Conseil de l'Union. La Slovénie est d'ores et déjà l'un des pays les plus impliqués sur la transition énergétique des armées européennes, avec qui Paris entretient une relation de confiance. La France devra s'impliquer dans les initiatives slovènes, en proposant par exemple l'organisation d'événements réunissant think tanks, industriels et spécialistes des nouvelles technologies, lors desquels des experts français pourront présenter certains projets prometteurs portés par les armées, comme les travaux de l'éco-camp ou les avancées de la fonction « énergie opérationnelle », menée dans le cadre de la coopération structurée permanente.
Nous plaidons donc pour que la France engage dès à présent un travail soutenu avec la Slovénie dans le cadre de sa future présidence du Conseil de l'Union, afin que, lors de la présidence française de l'Union européenne, la transition énergétique des armées à l'échelle européenne, pour laquelle la France serait leader, soit enclenchée.